Mardi, en Israël, aura lieu l'élection de tous les dangers.

Qui remplacera au poste de premier ministre Ehoud Olmert, l'ancien chef du parti Kadima discrédité par des rumeurs de scandales financiers? Les derniers sondages indiquent que ce sera Benyamin Nétanyahou, nationaliste de droite et chef du Likoud... lequel pourrait faire alliance avec Israël Beitenou, un nouveau parti ultranationaliste qui dépasse le Likoud sur sa droite.

Voilà qui risque de faire reculer tout espoir de paix au Proche-Orient pour les années à venir.

Cette perspective désespérante est en grande partie l'oeuvre du Hamas. En multipliant pendant sept ans ses tirs de roquette et en se livrant à la contrebande des armes, le Hamas a atteint l'objectif de tout bon mouvement terroriste, soit de compromettre à jamais toute possibilité de négociations en poussant l'adversaire à se durcir et à recourir à son tour à la force brute. Les Israéliens, constamment menacés, sont devenus plus que jamais, et on les comprend, obsédés par leur sécurité.

 

Même la riposte brutale du gouvernement à Gaza - une démonstration de force sans suite politique, et qui n'a aucunement refroidi les ardeurs du Hamas - n'a pas rassuré la population israélienne. Après des dizaines d'attentats au coeur des villes israéliennes, après des années d'encerclement par les fanatiques du Hezbollah au nord et du Hamas au sud, après l'échec des pourparlers d'Oslo, de Tabah et d'Annapolis, les Israéliens sont presque unanimement favorables à la ligne dure.

Le Mouvement pour la paix, qui était très fort il y a seulement quelques années (ce mouvement n'avait hélas! aucun équivalent dans le monde arabe), n'existe plus politiquement parce que les modérés ont cessé d'y croire. Même la chef actuelle de Kadima, Tipzi Livni, et le ministre de la Défense Ehoud Barak, qui avaient pourtant dirigé d'une main de fer la dernière offensive à Gaza, n'ont pas réussi à sauver la mise. Nétanyahou mène maintenant dans les sondages, et s'il a reculé récemment, c'est au profit du nouveau champion de l'ultradroite, Avigdor Lieberman, ancien immigré russe et chef du Israël Beitenou (qui veut dire «Israël, notre maison»).

En raison d'un absurde système électoral basé sur la représentation proportionnelle pure, il est très rare qu'un parti puisse former un gouvernement majoritaire. Les gouvernements israéliens sont presque toujours des coalitions. Verra-t-on cette semaine une coalition Likoud-Beitenou succéder à la coalition modérée de Kadima et du Labour (le Parti travailliste)?

Si c'est le cas, cela empirera les choses. Nétanyahou entend poursuivre l'implantation de colonies juives en Cisjordanie, alors que même Ariel Sharon et les dirigeants actuels de Kadima comptaient y mettre fin. Et Lieberman en rajoute. Il considère les Palestiniens vivant en territoire israélien comme une cinquième colonne et a déjà réclamé la peine de mort pour les députés arabes sympathiques au Hamas. Il souhaite un échange de populations entre Israël et l'Autorité palestinienne pour que chaque État soit ethniquement homogène...

La proportion des Juifs ashkénazes, la classe dirigeante instruite et progressiste d'origine européenne qui a fondé et développé le pays, n'a cessé de diminuer. Israël compte aujourd'hui une très forte population de Juifs immigrés des pays arabes. Si quelque 700000 Palestiniens ont été chassés de leurs terres lors de la fondation d'Israël, au moins autant de Juifs ont été chassés des pays arabes depuis 1948... et ceux qui ont trouvé refuge en Israël sont plutôt hostiles aux Arabes. Autre minorité qui prend de plus en plus d'importance, celle des Juifs émigrés plus récemment de l'URSS, qui n'avaient jamais connu la démocratie avant d'arriver en Israël et qui sont instinctivement portés à la méthode forte. Ces électeurs constituent le terreau dont se nourrissent les Nétanyahou et les Lierberman.