Les baby-boomers, disions-nous mardi à la suite du dossier que La Presse a publié le week-end dernier, sont déjà arrivés aux portes de la soixantaine... La première cuvée, celle de 1946, a maintenant 62 ans. On est loin de Woodstock et des barricades de Mai 68!

Mais voici une information qui va les consoler.

Selon une récente étude française de l'Insee (Institut national de la statistique et des études économiques), la courbe du bonheur atteint son apogée de 65 et 70 ans!

Deux chercheurs de l'Insee ont scruté les enquêtes effectuées par la communauté européenne depuis 1975 sous l'angle du degré de bien-être ressenti par les répondants. Le bonheur, autrement dit.

Au premier coup d'oeil, le résultat surprend. C'est entre 40 et 50 ans que le sentiment de bien-être est à son plus bas, pour ensuite remonter et atteindre son point culminant de 65 et 70 ans!

Or, notent les auteurs, c'est normalement dans la quarantaine que les revenus sont à leur maximum (en Europe du moins). On pourrait ajouter que c'est l'âge où sa carrière prend son envol, l'âge charnière où l'on est dans la force de l'âge adulte, mais encore beau et jeune...

Voilà donc une autre confirmation du vieil adage voulant que l'argent ne fasse pas le bonheur, puisque le mieux-être ne correspond pas à la période où l'on gagne le plus d'argent. Les chercheurs ne le mentionnent pas, mais il est fort possible que les promotions, l'ajout de nouvelles responsabilités, entraînent un surcroît de stress. On a rarement vu des gestionnaires parfaitement détendus.

En Europe, la majorité des sexagénaires sont à la retraite depuis quelques années. Adieu le stress, bonjour la détente. Les parents dans la quarantaine ont encore leurs enfants sur les bras - des ados dans bien des cas, ce qui n'arrange rien. Mais à 65 ans, les enfants sont vraiment partis, on peut recommencer à vivre pour soi-même.

Ce que l'étude n'a pu mesurer, c'est le facteur primordial que constitue la vie amoureuse. D'autres enquêtes ont montré que les couples mariés étaient en général plus heureux que les couples non mariés et les célibataires. Mais compte tenu du nombre élevé de divorces et de séparations qui surviennent durant la quarantaine et la cinquantaine, on peut présumer que parmi ces sexagénaires heureux, il se trouve une bonne proportion de célibataires ou de couples recomposés.

Selon les chercheurs de l'Insee, le facteur principal expliquant que la courbe du bonheur atteindrait un sommet dans la soixantaine, c'est que le sentiment de bien-être «varie selon les aspirations personnelles, (et) dépend des espérances formées, des buts fixés et des moyens disponibles pour les atteindre. (...) Les objectifs fixés seraient plus fréquemment revus à la baisse au fur et à mesure que l'on vieillit, et seraient donc plus facilement atteignables».

Voilà le hic. À 40 ans, bien des gens ont des attentes impossibles à atteindre: l'amour parfait, le job rêvé, la promotion fabuleuse... À 60 ans, on connaît ses limites, on vise moins haut. Est-ce l'âge de la résignation? Ou du réalisme? Quoi qu'il en soit, il est indéniable que si l'on juge sa vie à l'aune de la réalité plutôt qu'à celle de ses rêves de jeunesse, on aura plus tendance à s'en déclarer satisfait.

Hélas! la courbe du bonheur déclinera rapidement après 70 ans. Les chercheurs ne s'attardent pas sur la cause, mais bien sûr, on la connaît. C'est la période qui amorce, pour la majorité des gens, l'arrivée des grandes épreuves: maladie grave, mort du conjoint... Raison de plus pour profiter du petit répit qu'offre la soixantaine!