Selon la Fondation de l'entrepreneurship, le Québec aura, d'ici cinq ans, un manque à gagner de près de 38 000 entrepreneurs pour prendre la relève d'autant d'entreprises en activité dont les propriétaires doivent passer le flambeau. Jamais l'urgence d'entreprendre n'aura été aussi aiguë au Québec afin d'assurer la régénérescence de notre tissu économique.

«Il y a un risque évident que le Québec passe d'une économie de propriétaires à une économie de succursales», a résumé hier Louis Vachon, PDG de la Banque Nationale (BN), qui participait au lancement d'une offensive commune de la Caisse de dépôt et placement, du Mouvement Desjardins et de la BN pour renforcer la culture de l'entrepreneuriat au Québec.

Les trois plus importantes institutions financières québécoises vont investir 6 millions de dollars au cours des trois prochaines années pour soutenir une campagne de sensibilisation baptisée «Devenir entrepreneur», en vue d'inciter les jeunes à choisir plus massivement de se lancer en affaires.

Une campagne de pub télé, exposant l'histoire du démarrage de deux jeunes pousses québécoises, a été mise en ondes hier, tout comme le lancement d'un site internet dans lequel jeunes et éducateurs trouveront quantité d'informations sur le «métier» d'entrepreneur.

Plus d'une vingtaine d'organismes qui font la promotion de l'entrepreneuriat se sont joints à l'initiative des trois institutions financières afin de rehausser la pondération de la population québécoise qui aspire à se lancer en affaires. Seulement 19% des Québécois caressent un tel projet comparativement à 27% de la population dans le reste du Canada.

Monique Leroux, PDG du Mouvement Desjardins, a rappelé qu'en raison du vieillissement de la population, ce sont 100 000 entreprises québécoises qui devront changer de main au cours des 10 prochaines années.

Le maintien au Québec d'une économie contrôlée par des propriétaires plutôt que le glissement vers une économie de succursales est donc un enjeu bien réel et est même devenu une préoccupation quotidienne pour nos grandes institutions financières.

Depuis six ans, la Banque Nationale a constitué une équipe qui se consacre au financement du transfert de la propriété familiale. Desjardins offre une multitude de ressources aux jeunes entrepreneurs, dont le programme Créavenir.

Pour sa part, la Caisse de dépôt a lancé, l'été dernier, l'initiative Innove-Agir qui vise à valoriser le rôle de l'entrepreneur et à favoriser l'émergence d'une nouvelle génération de bâtisseurs d'entreprises.

L'émulation, ça marche

Le lancement du projet «Devenir entrepreneur» s'est déroulé hier dans les locaux de la jeune entreprise Busbud qui a créé, il y a quatre ans, une plateforme internationale de réservation de billets d'autocars interurbains.

L'histoire de Busbud est racontée dans l'une des deux pubs télé lancées hier. Dans les deux cas, l'approche est accrocheuse et trouvera manifestement un écho auprès de la jeune clientèle-cible.

Chose certaine, le président-fondateur de Busbud, Louis-Philippe Maurice, croit aux vertus de l'émulation. Il a développé ses talents d'entrepreneur à l'école secondaire après avoir assisté à une présentation de l'organisme Jeune Entrepreneur.

«Après avoir assisté à la présentation de Jeune Entrepreneur, j'ai lancé avec mon associé une entreprise de production de sites internet. J'ai fait ça à temps partiel durant l'année scolaire, puis à temps plein durant l'été. Ç'a été mon premier emploi d'été.

«J'ai continué durant huit ans de développer l'entreprise et, lors d'un voyage au Brésil, durant lequel j'ai beaucoup utilisé l'autobus, j'ai développé le concept de site de réservation international», résume LP Maurice.

Aujourd'hui, Busbud compte une quarantaine d'employés, réalise pour les voyageurs de partout dans le monde des réservations d'autocar dans plus de 10 000 villes d'une centaine de pays.

Depuis janvier, Busbud cumule une croissance de 10% de ses revenus par semaine (!).

«Si je peux servir de modèle, tant mieux. Une étude de Compass vient de révéler que Montréal fait partie des 20 meilleures villes au monde pour démarrer une startup. On est au 20e rang, et il faut que Montréal atteigne rapidement le top 10», estime celui qui incarne avec éloquence le plaisir et la passion que peut générer le métier d'entreprendre.