Le nouveau PDG de Bombardier, Alain Bellemare, a confirmé jeudi ce que la grande majorité des observateurs sensés pressentaient. Il n'est pas question que la multinationale montréalaise vende sa division Bombardier Transport parce qu'on ne vend pas un joyau dont le marché ne reconnaît qu'une fraction de la valeur pleine et réelle. C'est aussi simple que ça.

Alain Bellemare a été on ne peut plus clair, jeudi, lors de l'assemblée annuelle des actionnaires de Bombardier en fermant d'un tour de main le robinet à rumeurs qui avait laissé filtrer que Bombardier négociait depuis quelques semaines déjà la vente de sa division Transport afin de renflouer le niveau de ses liquidités, considérablement affectées par les coûts de développement de la CSeries.

Cette éventualité a fait vivement réagir nos politiciens à Québec qui voyaient là une sombre menace sur un autre des grands fleurons de l'économie québécoise.

Bombardier ne se défera pas de sa filiale active dans le matériel roulant, qui génère près de la moitié de son chiffre d'affaires annuel et qui est dotée d'un carnet de commandes de 30 milliards.

Elle va plutôt chercher à valoriser Bombardier Transport par le biais d'un premier appel public à l'épargne qui, espère-t-on, va permettre à l'ensemble des actionnaires de la multinationale montréalaise d'en tirer profit.

Cette nouvelle a été bien accueillie par les marchés puisque l'action de Bombardier s'est appréciée de près de 7 % au cours de la journée de jeudi. En gagnant 16 cents, le titre a clôturé à 2,54 $ jeudi, ce qui est encore à des années-lumière de son seuil historique de 25 $, atteint à la fin des années 90.

Le titre de Bombardier a amorcé sa descente aux enfers au lendemain des attentats terroristes du 11 septembre 2001, lorsque la valeur de son action a chuté de plus de 50 % en quelques mois seulement. De 2002 à 2008, le titre a vivoté au-dessus de la marque des 3 $ avec une poussée à 8 $ en 2008, qui a été brutalement freinée par la crise boursière et la récession qui a suivi.

En raison des retards et dépassements de coûts du programme de la CSeries, la valeur, déjà fortement déprimée, de l'action de Bombardier a fondu de 44 % de plus depuis le début de 2015. Il est grandement temps que l'entreprise provoque un renversement de tendance.

Les petits actionnaires qui étaient présents jeudi à l'assemblée annuelle de Bombardier n'ont d'ailleurs pas caché leur impatience de voir leur titre reprendre rapidement et durablement de l'altitude.

Une valorisation plus réaliste



La bonne nouvelle pour ces petits actionnaires désabusés, c'est que la direction de l'entreprise semble maintenant pleinement décidée à prendre des mesures concrètes pour répondre à leurs attentes.

Depuis trois ans, la direction de Bombardier a été totalement absorbée par le développement technique, manufacturier, financier et commercial de la CSeries.

Cette préoccupation, proche de l'obsession, de mener à terme ce pari périlleux a cependant déteint sur les cibles de rendement et de profitabilité de l'ensemble du groupe et a occulté la contribution majeure de Bombardier Transport au bilan final de Bombardier inc.

Avec un titre qui a clôturé à 2,54 $ jeudi, le marché attribue au groupe Bombardier une valeur totale de 4,9 milliards alors que, dans les faits, c'est en dessous de sa division Bombardier Transport.

Il faut rappeler que Bombardier est le leader mondial dans le secteur du rail, que c'est une entreprise profitable qui suscite certainement la convoitise de ses principaux concurrents.

En ouvrant le capital de Bombardier Transport dans le cadre d'un premier appel public à l'épargne, on va lui attribuer une valorisation beaucoup plus réaliste que celle qu'elle obtient dans l'ombrage de Bombardier Aéronautique.

Cette valorisation, partagée par le marché, devrait normalement se répercuter sur la valeur de l'action de Bombardier inc. C'est en partie la raison pour laquelle le titre a bien fait jeudi.

Alain Bellemare a convenu qu'il restait beaucoup de travail à faire pour réaliser le redressement opérationnel et financier de sa division aéronautique, mais il a réaffirmé que cet objectif est réalisable.

On a toutefois senti jeudi que la direction de Bombardier a aussi décidé de prendre de front le sort de ses actionnaires, trop longtemps négligés. Il faut maintenant espérer que cette préoccupation donne des résultats à long terme.