On avait été prévenu. Le nouveau Plan Nord, concocté par le gouvernement de Philippe Couillard, allait être une version allégée et beaucoup plus modeste de l'ambitieux projet présenté par Jean Charest, en 2011. Ce qui est rigoureusement le cas, et ce, tant sur le fond que dans la forme.

Le premier ministre Couillard a dévoilé hier les grandes lignes de son programme de relance du développement industriel du Grand Nord québécois. Une nouvelle version du projet initial qui a été adaptée au contexte économique mondial actuel, malheureusement marqué, lui aussi, au coin de l'austérité.

Le Plan Nord de Jean Charest avait été présenté en 2011 dans un document étoffé de 172 pages. La version 2 du même Plan Nord a été résumée dans une plaquette qui ne fait même pas 50 pages où figurent des textes très aérés. À lui seul, le nouveau cadre financier du plan qui couvre l'horizon 2015-2035 tient sur moins de quatre pages.

Accompagné d'une imposante brochette de ministres qui auront tous un rôle à jouer dans le déploiement de son Plan Nord, Philippe Couillard a beaucoup insisté, hier matin, sur le fait que la nouvelle mouture intègre davantage les aspects multiples du développement humain, social et culturel des populations vivant au nord du 49e parallèle.

Cette préoccupation accrue, sinon nouvelle, pour le sort des communautés touchées par le Plan Nord vient aussi compenser en partie la forte réduction des attentes du gouvernement Couillard au chapitre des investissements attendus au cours des 20 prochaines années.

Les 80 milliards d'investissements projetés en 2011 ont été ramenés à 50 milliards dans le nouveau projet. À elle seule, Hydro-Québec accaparera 20 des 50 milliards de nouveaux investissements. Québec prévoit d'injecter 2,7 milliards pour la réalisation de travaux d'infrastructures, tandis qu'on espère que les entreprises du secteur minier dépenseront 28 milliards en nouveaux projets d'exploitation du sous-sol québécois.

Sur le fond, Québec a donc réduit ses attentes financières à l'égard du développement de son territoire nordique, ce qui n'a pas empêché le gouvernement libéral de vouloir davantage inscrire sa démarche dans une optique de développement durable.

On apporte donc un soin et une attention particuliers aux populations blanche et autochtones qui vivent la nordicité, allant même jusqu'à leur promettre maintenant une partie des redevances minières que le gouvernement percevra sur les activités de production des entreprises au cours des 20 prochaines années.

Il s'agit ici d'un engagement ferme dont il reste juste à déterminer les pourcentages qui seront retournés dans les communautés du Nord québécois, m'a confirmé Luc Blanchette, le ministre délégué aux Mines.

On note ici que ce régime de partage des redevances avec la région d'origine d'où on a prélevé la ressource naturelle sera accueilli avec un grand soulagement en Gaspésie, où on espère que l'extraction de pétrole conventionnel va servir à enrichir un fonds de développement industriel régional.

Des redevances décevantes

Pour que le Plan Nord joue pleinement le rôle économique qu'on entend faire jouer, il faut souhaiter un sérieux redressement des prix des matières premières à moyen terme, car le régime de redevances actuel est loin d'enrichir le Québec.

En 2011-2012, Québec a prélevé des redevances minières de 333 millions sur des expéditions minières totales de 8,4 milliards. En 2013-2014, les redevances prélevées ont chuté à 44 millions sur des revenus de 8,09 milliards.

Pour 2014-2015, on observe un léger redressement puisque les impôts miniers atteignaient 95 millions après 11 mois d'exploitation sur un volume d'affaires qui devrait franchir le cap des 8,7 milliards.

À 100 millions par année, comme le prévoit le dernier budget Leitao, on arrive toutefois à un niveau de redevances minières nettement inférieur à celui qui était projeté dans la première mouture du Plan Nord de Jean Charest.

En 2011, le Plan Nord prévoyait générer des redevances minières de 1,4 milliard sur cinq ans. On espère maintenant récolter au mieux 500 millions sur le même horizon temporel.

On constate donc que le Plan Nord a été soumis à un sévère régime minceur qui lui a été imposé, en grande partie, par la conjoncture économique mondiale défavorable.

Mais il faut aussi rappeler que le Plan Nord de 2011 avait été délibérément trop optimiste, tablant sur des prévisions de demande théoriques qui n'étaient manifestement pas arrimées à la réalité des marchés.

C'est bien joli de vouloir vendre à tout prix un projet que l'on souhaite mobilisateur, mais ce n'est pas en travestissant les chiffres ou en surestimant ses retombées potentielles que l'on va réussir à réaliser ses véritables objectifs.

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DES REDEVANCES PLUS MODESTES

Redevances minières Expéditions minières

2011-2012 333,7 millions 8,4 milliards

2012-2013 190,8 millions 8,03 milliards

2013-2014 44,7 millions 8,09 milliards

2014- fév. 2015 95 millions 8,7 milliards

Source : gouvernement du Québec