Il y a des entreprises qui, trimestre après trimestre, produisent des résultats financiers qui donnent l'impression de progresser avec la régularité d'un métronome. Alimentation Couche-Tard est sans conteste l'une de ces sociétés virtuoses du surpassement qui arrivent à déjouer les observateurs du marché.

Couche-Tard a une fois de plus étonné les analystes financiers, hier, en dévoilant des résultats qui ont surpassé leurs attentes. Sommairement, la multinationale du dépanneur a dégagé à son deuxième trimestre un bénéfice net de 229 millions US, en hausse de 27% par rapport à l'an dernier, sur des revenus de 9 milliards US.

Mieux encore, l'entreprise a profité de sa bonne tenue financière pour annoncer une hausse de 14% son dividende trimestriel, qui va être porté à 10 cents US.

Dans la foulée de la publication de ces résultats à l'avenant, le titre de Couche-Tard s'est apprécié de plus de 5% pendant la journée hier avant de finalement clôturer à 76,17$ (+3%), cumulant ainsi une plus-value de 55% depuis le 1er janvier. C'est ce qu'on appelle du rendement solide.

Mine de rien, Couche-Tard, qui totalise un bénéfice net de 485 millions pour les 6 premiers mois de son exercice, est en voie de boucler une année où elle dégagera près de 1 milliard de profits, une marque que personne n'aurait jamais crue possible il y a 20 ans.

«Finir l'année avec un milliard de profits? J'imaginais peut-être ce scénario dans mes rêves les plus fous, mais on a commencé à y croire pour vrai lorsqu'on a amorcé, au début des années 2000, notre expansion aux États-Unis», m'a confié hier Alain Bouchard.

«J'ai vu à ce moment-là qu'on pouvait construire quelque chose de gros, mais de très profitable aussi. La profitabilité, c'est la base de toutes les actions que l'on pose, de toutes les acquisitions que l'on réalise», poursuit le président-fondateur de Couche-Tard.

Ainsi, l'aventure européenne entreprise l'an dernier avec l'acquisition du groupe norvégien Statoil Fuel&Retail et ses 2276 dépanneurs avec poste d'essence non seulement contribue grandement aux résultats de Couche-Tard, mais encore commence à générer les synergies escomptées.

En intégrant les activités de Statoil, Couche-Tard prévoyait réaliser des économies d'échelle de 150 millions sur 3 ans. Si la première année d'exploitation a surtout permis au groupe québécois de mieux comprendre la culture de l'entreprise, les économies d'échelle commencent à se matérialiser depuis deux trimestres.

Les analystes financiers s'attendaient à des dépenses d'exploitation de 800 millions au dernier trimestre, Couche-Tard les a surpris en affichant des dépenses de 782 millions.

«On va aller chercher les 150 millions de synergies. On est en train d'implanter notre système de référencement benchmarking] qu'on a développé il y a longtemps, mais qu'on a appliqué scrupuleusement durant la crise de 2008-2009 et ça donne des résultats», souligne Alain Bouchard.

Au cours du dernier trimestre, Couche-Tard a mis la main sur une trentaine de dépanneurs aux États-Unis, poursuivant sa stratégie d'intégration de petites chaînes locales, et le PDG affirme rester à l'affût avec ce type de transaction qui présente «de multiples opportunités».

Alain Bouchard réaffirme qu'il est toujours partant pour réaliser une autre grosse transaction en Europe ou aux États-Unis, disposant de plus de 2 milliards de capacité de financement.

«Les grosses acquisitions sont devenues très complexes à réaliser. Mais peu importe la cible ou sa taille, notre évaluation est toujours fonction du retour sur l'investissement que peut produire la transaction», explique-t-il.

Au Québec, Alain Bouchard accueille positivement l'initiative du groupe IGA de transformer certains dépanneurs Shell en IGA express, des petits magasins qui offriront une offre mixte entre supermarché, dépanneur et restauration rapide.

«On aime ça que des détaillants s'intéressent à notre secteur d'activité en offrant des concepts différents et créatifs. Ça hausse l'achalandage et l'intérêt des consommateurs. On est dans une industrie qui a avantage à bien se développer», observe-t-il.

Enfin, le PDG de Couche-Tard n'est pas particulièrement ému de la rumeur de l'incorporation possible de Couche-Tard à l'indice S&P/TSX 60.

«On est habitués d'être traités comme les derniers des derniers par les institutions comme le TSX. Ça fait des années qu'on a tous les attributs pour être qualifiés. En termes de capitalisation boursière, Couche-Tard se classe parmi les 30 plus grosses compagnies canadiennes et on n'est même pas dans le TSX 60», relève-t-il.

Alain Bouchard n'en fait pas un drame. Il peut se consoler quand il compare le rendement de Couche-Tard avec celui de l'indice de la Bourse de Toronto, toutes périodes confondues, depuis 1987...