Les Québécois ont repris goût à la dépense. En mai, leur frénésie de consommation a fait progresser de 3,1% les ventes au détail, un niveau jamais vu depuis 2010 et un pourcentage nettement plus élevé que la moyenne canadienne de 1,9%. Et ce n'est pas fini puisqu'en vertu d'une décision du Tribunal de la concurrence, certains consommateurs vont pouvoir continuer de payer leur épicerie avec leur carte de crédit.

Après deux mois de recul, les dépenses des consommateurs québécois ont littéralement bondi en mai avec un saut de 3,1% comparativement au mois d'avril. Par rapport à mai 2012, la hausse est encore plus considérable puisqu'elle atteint 4,5%.

Au Canada, la hausse de 1,9% des dépenses à la consommation a aussi été accueillie avec surprise par les économistes, qui tablaient sur une progression beaucoup plus modeste de l'ordre de 0,4%.

Mais qu'est-ce qui a bien pu amener les ménages québécois et canadiens - qui affichaient l'an dernier un taux d'endettement record de 163,4% - à replonger dans le bain de la consommation comme ils l'ont fait en mai?

L'explication la plus plausible, mais pas très scientifique, c'est que les ménages canadiens ont justement réussi à réduire - bien que de façon extrêmement timide - leur exposition à l'endettement et qu'ils ont décidé d'en profiter...

Au dernier trimestre de 2012, le taux d'endettement record de 163,4% a été ramené à 162,6% en fin d'année, et le mouvement de repli s'est poursuivi au premier trimestre de 2013 lorsque le taux d'endettement des ménages a été mesuré à 161,8%.

Ce début de renversement de tendance n'a pas été le fait d'une plus grande discipline des ménages dans leur façon de consommer, mais plutôt le résultat d'une plus grande valorisation de leurs actifs immobiliers et d'épargne-retraite.

En ramenant à 25 ans la période maximale d'amortissement d'un prêt hypothécaire, le gouvernement fédéral a aussi réduit le nombre de nouveaux ménages surendettés qui venaient alourdir le bilan déficitaire moyen des ménages canadiens.

Crédit ou débit?

Les consommateurs canadiens semblent donc partis sur une bonne séquence dépensière, les économistes étant d'avis que l'activité des commerces au détail est demeurée élevée durant le mois de juin.

Et le Tribunal de la concurrence vient de confirmer que les consommateurs n'auront pas à payer des frais excédentaires s'ils utilisent une carte de crédit donnant droit à des privilèges et qu'ils auront surtout l'assurance qu'on ne pourra pas leur refuser leur carte lorsqu'ils vont acquitter leur facture.

En refusant la plainte que lui avait acheminée le Bureau de la concurrence, qui jugeait que les géants Visa et MasterCard s'adonnaient à des pratiques contraires à la concurrence en facturant des frais d'administration plus élevés pour les utilisateurs de leurs cartes Privilège, le Tribunal a choisi le statu quo tout en confirmant que ce dossier méritait un meilleur cadre réglementaire.

Sur le fond, le Bureau de la concurrence avait raison de considérer que les consommateurs qui paient comptant ou par leur carte de débit doivent payer une taxe pour financer les frais d'administration des transactions par cartes de crédit qui varient de 1,5 à 3,0% et qui rapportent plus de 5 milliards aux institutions financières qui font affaire avec Visa et MasterCard.

Alain Bouchard, le PDG de Couche-Tard, avait fait une virulente sortie contre les sociétés émettrices de cartes de crédit en 2009, menaçant même de lancer sa propre carte de «débit-crédit» qui aurait facturé des frais de transaction maximaux de 0,5%.

Pour l'exercice financier de 2008, Couche-Tard avait payé 180 millions US en frais de cartes de crédit, soit à peu près l'équivalent des 189 millions US de profits nets que l'entreprise avait dégagés.

À l'époque, les frais d'administration les plus élevés étaient de 2%. C'était avant l'apparition des nouvelles cartes Privilège qui commandent des frais pouvant atteindre 3%.

Mais la popularité de ces cartes ne se dément pas, et je reste toujours surpris de voir combien de consommateurs paient leur épicerie avec une de ces cartes dans le but d'accumuler des bonis-dollars.

Cette pratique jadis associée à un comportement désespéré du consommateur est maintenant devenue courante. Aurait-elle changé si le marchand avait été en droit d'exiger une prime de 3% pour ces mêmes achats? Ce sera au gouvernement fédéral de trancher la question.