Marc Trestman a beau l'avoir involontairement rebaptisé cette semaine - il l'a appelé Damian deux fois -, le quart-arrière des Roughriders de la Saskatchewan, Darian Durant, est en train de se faire un nom dans la Ligue canadienne de football.

On a dit de Durant qu'il était trop petit (il fait un généreux cinq pieds 11). On a accusé son bras de manquer de puissance. Et pourtant, dès sa première année comme partant à temps plein, le voici en finale de la Coupe Grey, à l'âge encore tendre de 27 ans. Un an de moins, en fait, qu'Anthony Calvillo lors de la première participation du quart des Alouettes à la classique, il y a neuf ans déjà.

Après avoir pratiqué la politique des portes tournantes, l'an dernier - Durant, Marcus Crandell, Michael Bishop et Steven Jyles ont tous entrepris au moins un match au poste de quart - les Roughriders ont décidé cette année de faire confiance à Durant.

«Nous avons senti qu'il était important de développer le quart-arrière de l'avenir et d'ajouter un autre grand quart à la ligue, plutôt que de recycler une figure établie qui ne cadrait plus dans les plans d'une autre équipe», a expliqué l'entraîneur des Riders, Ken Miller, plus tôt cette semaine.

Les Roughriders n'ont pas regretté leur décision - ni les partisans des Riders, qui ont mis la pédale douce sur les controverses de quart-arrière dont ils sont si friands. (Le dernier quart qui n'a pas été victime d'une telle controverse est Ron Lancaster, a lancé à la blague le spécialiste des longues remises Jocelyn Frenette, l'autre jour. Aujourd'hui décédé, Lancaster avait pris sa retraite en... 1978.)

Durant a compilé des statistiques honnêtes: il a complété 339 passes en 561 tentatives (60,4%), pour 4348 verges, et a réussi 24 passes de touchés, deux de moins que le meneur dans la LCF, Calvillo. Mais il a surtout permis à son équipe de terminer au premier rang de sa division (10-7-1) et d'ainsi disposer de l'avantage du terrain en finale de l'Ouest, que les Riders ont gagnée 27-17 contre les Stampeders de Calgary.

Durant en a fait plus qu'assez pour impressionner l'entraîneur des Alouettes, qui a chanté ses louanges, mercredi. «Les entraîneurs des Roughriders ont fait un travail fantastique avec ce quart-arrière, a dit Marc Trestman. Son développement est une bonne nouvelle pour la ligue. Il peut passer le ballon dans la zone protectrice. Il est très difficile à faire tomber, très fort du haut du corps et des jambes. Il a la capacité de faire des jeux incroyables tant dans la pochette qu'en dehors, en pleine course. Il est très mobile.»

Arrivé chez les Riders en 2006, l'ancien de North Carolina, dont le frère Justin est secondeur chez les Jaguars de Jacksonville, n'a lancé qu'une passe à ses deux premières saisons. Il était sur les lignes de côté quand Kerry Joseph a mené l'équipe à la Coupe Grey, en 2007. «Mais il y a une limite à ce que tu peux apprendre en observant. Beaucoup de choses viennent de l'expérience», a-t-il souligné, hier, au déjeuner des Roughriders.

Même s'il a entrepris quatre parties l'an dernier, la phase d'apprentissage s'est poursuivie cette saison, reconnaît-il. «Au début, j'avais peur de faire des erreurs, de perdre mon job, mais plus l'année avançait et plus le coach était patient quand je faisais des erreurs, car il savait que je rebondirais. Tu mesures la force d'un homme en voyant comme il répond à l'adversité.»

La certitude d'être bien en selle l'a aidé à créer une belle complicité avec son corps de receveurs, qui comprend pas moins de quatre Canadiens: Andy Fantuz, Chris Getzlaf, Jason Clermont et Rob Bagg. «C'est incroyable combien sa confiance en lui-même, en ses receveurs et en sa ligne à l'attaque a grandi au cours de la saison, a dit Fantuz. Son développement en cours de saison a été remarquable. Nous atteignons notre apogée au bon moment.»

Seule tache à son dossier, Durant a été victime de 21 interceptions, un sommet dans la LCF, dont quatre dans les deux défaites des Riders aux dépens des Alouettes. Mais Durant ne s'en fait pas trop. «Tu ne peux pas jouer au football sans commettre des revirements. Aucun quart n'est parfait. Il faut juste que je m'assure que pour chaque erreur, je fasse trois ou quatre autres choses mieux. C'est ma mentalité. Je ne me découragerai pas si je fais une erreur, parce que je sais que je peux réussir les jeux importants.»

Son rival de dimanche n'a aucun doute sur les capacités de son cadet de 10 ans, qui a déjà mené les Riders à une victoire de 41-33 sur les Alouettes, l'an dernier, au stade Mosaic de Regina. «Ce match m'avait montré qu'il pouvait devenir un grand quart-arrière, a dit Calvillo. L'enjeu pour lui était de maintenir sa constance. Il l'a fait cette année et il a l'occasion de conduire son équipe à la Coupe Grey. Ça montre qu'il peut conduire cette organisation et en être la fondation pour les années à venir.»

Mais pour cette année, s'il n'en tient qu'à Calvillo, Durant connaîtra le même sort que lui-même en 2000, quand les Lions du vétéran Damon Allen avaient vaincu ses Alouettes 28-26 en grande finale. «Tu ne veux pas perdre contre un jeune quart-arrière», dit-il en souriant.

Précision

Dans ma chronique de mercredi, j'ai écrit que les Alouettes avaient gagné la Coupe Grey à Montréal en 2002. Le match avait évidemment lieu à Edmonton.