Congestionné, bouchonné ou engorgé, choisissez, tel un Marc Brière ou un Yves Désautels de la circulation, votre mot favori pour décrire l'état des lundis soirs à la télévision québécoise.

C'est achalandé du début à la fin avec des véhicules de grande qualité. Bien sûr, on enregistre, on rattrape. Mais très souvent, on finit par effacer et abandonner de très bonnes séries par manque de temps ou d'espace dans les terminaux numériques.

Voici, avant de sauter à l'analyse plus poussée, la répartition des chiffres de ce lourd trafic télévisuel. À 19 h lundi, District 31 a fracassé son record d'écoute en direct avec 1 399 000 accros pendus aux lèvres de Nadine et Patrick. Imaginez s'il avait plu et fait froid. Les cotes d'écoute auraient gonflé encore plus.

À 19 h 30, la comédie Trop (661 000), que plusieurs clients ont déjà dévorée sur l'Extra de Tou.TV, a été battue par Boomerang (954 000) à TVA.

La nouveauté policière Faits divers (604 000), un coup de coeur pour moi, a été presque doublée par L'échappée (1 112 000) de TVA. Et L'imposteur (891 000) a éclipsé Olivier (675 000) à la télé d'État.

Le contenu, maintenant. Le premier épisode la troisième saison de Boomerang, une comédie que j'aime beaucoup, a été cacophonique et agressant. Trop de personnages qui se crient dessus comme des poules pas de tête, ça finit par taper sur le gros nerf.

Autre irritant : le changement draconien de comportement des parents de Karine (Catherine-Anne Toupin), joués par les formidables Marie-Thérèse Fortin et Marc Messier. Cette métamorphose subite me paraissait incompatible avec leur personnalité plutôt psychorigide.

D'un seul coup, pouf !, Pierre (Marc Messier) et Monique (Marie-Thérèse Fortin) ont embrassé la bohème du Plateau Mont-Royal, éclusé des bières dans le Quartier latin et presque baisé sur le comptoir de cuisine de leur grande fille. Ça ne collait pas.

La meilleure scène de la demi-heure a été portée par la beauté désespérée Stéphanie (Magalie Lépine-Blondeau). Confrontée à sa propre existence morne, dénuée de rêves et d'aspirations, elle a explosé de colère quand sa fille, qui s'amusait avec des Barbie, reproduisait avec enthousiasme tous les stéréotypes associés à la femme au foyer. C'était très juste et criant de vérité.

L'échappée de TVA a repris les ondes avec la pédale de l'accélérateur enfoncée dans le tapis. Enfin, ça bouge à Sainte-Alice. 

En moins de 60 minutes, Brigitte (Julie Perreault) a failli être assassinée, des jeunes du centre ont gobé de l'ecstasy et le psychopathe David (Patrick Hivon) a épinglé une autre victime à son tableau de chasse macabre, en plus de se faire planter un tournevis dans la main. Ce virage plus sombre emprunté par le téléroman-vedette de TVA ne me déplaît pas du tout, au contraire.

Malgré ses manières brusques, la nouvelle éducatrice Cécile (Anne Casabonne) a le radar pas mal plus efficace que ses naïves collègues. Tout de suite, elle a détecté que la nouvelle pensionnaire de L'échappée, la blonde Joëlle, y a été envoyée en mission par des gangs de rue pour recruter des filles. Vigilante, notre Cécile.

Quant à L'imposteur, son retour a été lent et moins palpitant qu'espéré. Plusieurs téléspectateurs - dont moi - avaient oublié le coeur de l'intrigue, et la courte mise en contexte glissée en début d'heure n'a pas été très utile pour nous replonger dans cet univers dense.

Les magouilles de Youri (Marc-André Grondin) avec son patron Zac (Patrice Robitaille), le degré d'implication de la source 253 (Denis Bouchard) et le vol de drogue, tous ces éléments étaient brumeux. Et c'était qui, déjà, Kaplan?

De façon un peu poussive, Youri/Philippe a repris sa double vie. Ça manquait de punch, je trouve. Le récit devrait pourtant s'accélérer étant donné qu'il ne reste que neuf épisodes pour boucler cette série policière haut de gamme. Les auteurs Annie Piérard et Bernard Dansereau ont en effet confirmé qu'ils n'écriraient pas de troisième saison de L'imposteur.

Ils ont, à l'évidence, pris la bonne décision. Il y a des limites à garder un héros sur un fil aussi ténu sans qu'il ne tombe ou sans que ça ne devienne plus crédible. Et j'avoue que le coup de la source 253 qui sort s'acheter de la moutarde de Dijon et qui se fait pincer par la police, c'était un brin amateur. À moins qu'il ait délibérément voulu se faire coffrer?

Comme vous l'avez constaté hier, les mardis ne nous laisseront guère de répit, alors qu'O' s'est installé devant Unité 9 et que L'heure bleue se frotte désormais à Mémoires vives. L'automne, contrairement à l'été, s'annonce chaud, chaud, chaud.