Nous avons été 1 535 000 téléphages à suivre religieusement l'histoire à la fois tragique et inspirante de la belle Sarah Vaillancourt (excellente Marianne Fortier) tous les lundis soir à TVA.

Comme toute bonne chose a une fin, Pour Sarah nous a ému une dernière fois, lundi, dans un épisode très prenant, où toutes les pièces du puzzle s'imbriqueront les unes dans les autres.

La fiction se termine, mais la réalité, elle, continue. Car Pour Sarah, il ne faut pas l'oublier, raconte une histoire malheureusement vraie, celle du producteur de cette télésérie, François Rozon, et de sa fille Justine, impliquée dans un grave accident d'auto en juillet 2010.

Pendant neuf semaines dans nos salons, François Rozon a donc pris les traits de Luc Vaillancourt, le papa poule campé par Sylvain Marcel. Et Justine Rozon, c'est bien sûr la brave Sarah, un rôle défendu avec une belle sensibilité par Marianne Fortier.

L'enquête policière touffue et les péripéties amoureuses de Sarah ont été inventées par la scénariste Michelle Allen (Vertige, Destinées). Par contre, les scènes très intimes, au coeur de ce drame terrible, ont vraiment été vécues par le père et sa grande fille.

Par exemple, François Rozon, un gars très réservé dans la vraie vie (tout le contraire de son frère Gilbert), a bel et bien dansé pour sa fille à l'hôpital. Il s'est aussi glissé à ses côtés, dans son petit lit, comme elle le lui a réclamé.

Justine et son papa sont également partis en voyage avec la tubulure, les sacs de nourriture liquide et toute la quincaillerie nécessaire à l'alimentation de Justine/Sarah. Mais au lieu d'aller aux baleines, ils ont plutôt visité Las Vegas.

L'épisode de l'escapade à Charlevoix a d'ailleurs rappelé à François Rozon à quel point il surprotégeait sa Justine durant les premiers mois.

Aujourd'hui, Justine Rozon a 22 ans, un amoureux et n'a plus besoin de se nourrir par intraveineuse. Adieu, donc, la routine interminable de désinfection. Sa greffe d'intestin, pratiquée en février dernier à Toronto, lui a redonné une parcelle de sa vie d'avant.

Malheureusement, il y a eu des complications, cet été, et Justine a dû retourner à l'hôpital, où elle séjourne toujours. Non, elle n'a pas regardé Pour Sarah. « Présentement, Justine préfère les émissions qui la font rire », explique son père.

Justine et Sarah partagent la même force de caractère et la même joie de vivre, malgré le malheur et les épreuves qui s'empilent. Dans l'épisode de Pour Sarah de lundi, où Cédric Dutil (Félix-Antoine Duval) subissait son procès, Sarah a prononcé doucement la phrase qui a résonné le plus fort : « Ce n'est pas la punition de Cédric qui va me rendre plus heureuse. »

Clairement, Sarah est la voix de la sagesse dans ce conflit qui déchire les familles Dutil et Vaillancourt. C'est aussi la plus courageuse et la plus lucide.

Pour Sarah a très bien incorporé les éléments de suspense au récit bouleversant de Sarah. Vous avez cru savoir ce qui s'est vraiment passé le soir de la violente sortie de route de Cédric et de Sarah ? Il vous en manquait encore un bout crucial.

L'impact du drame sur l'entourage des deux ados a débouché sur des scènes difficiles de couples qui éclatent, d'amitiés qui implosent et d'avenirs bousillés. Mention spéciale à l'auteure Michelle Allen, qui a réussi à faire parler les ados de Pour Sarah comme de vrais ados, sans que ça sonne faux ou comme dans un épisode de Zoumbadouwowpifpif des Appendices.

Et avant que vous ne posiez la question, voici la réponse : non, pas question que Pour Sarah ait une suite à TVA. C'était prévu comme ça dès le départ : une seule saison, qui provoquerait un gros impact.

C'est mieux comme ça, je pense. La toute dernière séquence de l'épisode final, qui fait un saut de six mois dans le temps, illustre parfaitement ce qu'a été Pour Sarah cet automne.

Une chanson mélancolique s'est mise à jouer et on s'est dit, merde, je vais encore brailler, c'est trop triste. Puis, Sarah a débarqué avec son sourire immense et ses yeux brillants d'espoir. Le moral remonte instantanément et on s'est dit tout va bien aller, finalement. Ça ne pouvait pas faire autrement avec Sarah/Justine.