Cela fait belle lurette que j'ai abandonné Sophie Thibault et Céline Galipeau les soirs de semaine à 22 h. Rendu à cette heure-là, les nouvelles «cassantes» du jour ont inondé Twitter et Facebook, nourri les applications mobiles pour téléphones intelligents et garni les pages d'accueil de sites web comme celui de votre quotidien préféré.

Une autre demi-heure sur le budget Leitao? Non, merci. De plus, si vous avez consommé votre bulletin télévisé à 18h, chez TVA ou Radio-Canada, les infos présentées à 22h diffèrent rarement de celles relayées quatre heures plus tôt. Et il existe toujours RDI et LCN pour les rebondissements de dernière minute, quand ils ne se produisent pas à Moncton, bien sûr.

Nous sommes des centaines de milliers à avoir largué ce traditionnel rendez-vous des téléjournaux de 22 h. À TVA, les chiffres BBM de Sophie Thibault tournent autour de 463 000 fidèles depuis janvier, alors qu'ils ont déjà frôlé le million, il y a plusieurs années. À la SRC, Le téléjournal (moyenne: 300 000 curieux) sent le souffle chaud du talk-show d'Éric Salvail (270 000 adeptes) dans son cou.

La situation se corse avec les chaînes spécialisées (en divertissement) qui profitent de cette désaffection pour grignoter davantage de parts de marché. Les lundis à 22h, la télésérie Arrow de Ztélé a rejoint, en moyenne, 225 000 accros cet hiver. C'est énorme. Les Québécois dévorent encore beaucoup de télé à 22h, mais plus nécessairement des trucs liés à l'actualité.

Les chaînes généralistes donneront - enfin - un coup de plumeau à leurs bulletins d'information l'automne prochain. TVA a annoncé cette semaine la refonte complète de son bulletin de 22h. La chef d'antenne Sophie Thibault ne lira plus ses textes à partir d'un télésouffleur, mais discutera plutôt de l'actualité du jour avec des chroniqueurs et analystes invités. Pensez à une émission de services mélangée à un journal télévisé classique. Le tout livré sur un plateau moins guindé, sur le ton de la conversation.

Pas bête du tout comme proposition. Je suis un très bon client du 24 heures en 60 minutes d'Anne-Marie Dussault sur RDI. Si TVA explore cette forme de télévision hybride et intelligente, le réseau risque de rapatrier les téléspectateurs déserteurs à son antenne.

À RDI, Anne-Marie Dussault travaille dans un contexte décoincé et n'est pas moins crédible ou rigoureuse pour autant. Ses fous rires la rendent chaleureuse. Le magazine de Mme Dussault résume, fouille, divertit, analyse, décortique et informe dans un format dynamique, jamais barbant. Je le regarderais volontiers à 22h.

Le vice-président de TVA Nouvelles, Serge Fortin, a décliné ma demande d'entrevue sur l'avenir des bulletins de 22h. Du côté de Radio-Canada, les patrons confectionnent présentement un Téléjournal plus rythmé, plus vivant et plus près des gens pour septembre.

«On ne sera pas dans l'opinion. Ça restera de l'information, basée sur des faits. Nous allons cibler davantage le pourquoi des choses. Nous voulons être là où ça se passe», explique la première directrice des émissions d'information de Radio-Canada, Catherine Cano.

La forme du bulletin bougera également. «Il faut être dynamique. On fait de la télévision. C'est aussi très important que nos histoires soient bien racontées», poursuit Catherine Cano.

Le plus difficile dans tout ça, c'est de satisfaire autant les junkies d'information, qui ont tout lu et tout vu pendant la journée, que les gens plus traditionnels, toujours bien ancrés aux rendez-vous de 22h. Communiquer la nouvelle, la commenter et la pousser plus loin, c'est toute une commande dans un espace restreint à une trentaine de minutes.

Personne ne connaît la recette gagnante pour raviver le créneau de l'info à 22h. Il faut cependant casser le moule. Car dans son enveloppe actuelle, le téléjournal traditionnel se meurt.

TVA semble privilégier une approche plus clinquante à la CNN, ce qui n'est pas une mauvaise chose, tandis que Radio-Canada s'aligne sur un modèle moins éclaté. Les deux chaînes généralistes espèrent, évidemment, que ces modifications freineront l'érosion de leurs bulletins respectifs. Leurs chances de succès? Même Nostradumas, pourtant capable de prédire bien des revirements dans Mémoires vives, n'arrive pas à lire l'avenir dans sa boule de plasma.

JE LÉVITE: Avec La déesse des mouches à feu de Geneviève Pettersen

Tout le monde a dit du bien de ce premier roman, qui raconte, dans une langue colorée et crue, la vie d'une adolescente dégourdie à Chicoutimi-Nord. J'en rajoute: c'est captivant. Particulièrement si vous avez «découvert la vie» dans les années 90 avec des Doc Martens aux pieds et du Nirvana dans votre Discman. Très fort.

JE L'ÉVITE: La pub de St-Hubert en chinois

C'est peut-être moi qui ne suis pas vite, vite, ça se pourrait, mais a) je ne saisis pas trop le degré d'humour de cette réclame et b) le message voulant que la rôtisserie écrase la concurrence avec ses bas prix est vraiment mal emballé. Pourquoi c'est un restaurant chinois qui écope et non pas une pizzeria ou un comptoir à poutine? Pas fort.