Allez-vous prendre un petit extra avec ça? Non, il ne s'agit pas d'un spécial de Charlène dans Série noire, mais bien d'une proposition d'affaires très propre et légale de notre société d'État.

Les habitués de cette chronique savent depuis quelques semaines déjà que Radio-Canada mettra bientôt en orbite une version bonifiée - et payante - de son populaire service Tou.TV, qui portera le nom Tou.TV Extra. Insérez devant le mot ICI, bien sûr, comme dans ICI Radio-Canada Télé ou ICI ARTV.

Qu'avons-nous donc appris hier au dévoilement officiel de cet Extra, où j'ai dénombré plus de patrons et de cadres à cravate que de journalistes? Trop peu de détails. La SRC garde toutes les infos les plus croustillantes dans sa manche pour la mise à feu de la plateforme à la fin du mois.

Combien coûtera cet Extra propulsé par Telus et Rogers? Quelles séries télé offrira-t-il? Nous l'apprendrons plus tard. Chose certaine, pour se situer dans les prix courants, ce Tou.TV Extra ne devra pas exiger des frais de plus d'une dizaine de dollars par mois. C'est ce que facturent mensuellement ses concurrents Netflix (8$) et le Club Illico de Vidéotron (10$).

Ensuite, rassurez-vous: le Tou.TV de base demeure 100% gratuit. Rien ne bouge de ce côté, à part l'interface qui se modernisera. En vertu d'un partenariat noué avec Rogers et Telus, les clients de ces deux géants - autant en téléphonie cellulaire qu'en télévision numérique - pourront se connecter gratuitement à Tou.TV Extra. En revanche, si vous créchez chez Bell ou Vidéotron, désolé, il faudra allonger d'autres billets verts.

Les utilisateurs qui paieront un abonnement à Tou.TV Extra ne se farciront plus jamais de publicités. Ni avant ni pendant les émissions. C'est un pensez-y-bien, si vous êtes allergiques aux mauvaises réclames comme celle du bacon Lafleur avec Bob le Chef. Pitié.

Pour son lancement d'ici trois semaines, Tou.TV Extra offrira notamment, dans leur intégralité et en haute définition, des séries comme Au bout du lac (Top of the Lake) et la production française Engrenages de Canal+. Ce sont, hélas! les seuls titres que Radio-Canada a confirmés publiquement.

Essentiellement, le Tou.TV de base conservera sa vocation de rattrapage, tandis que l'Extra ciblera les boulimiques de télé en rafale. Les fameux adeptes du binge watching, comme on dit à Plattsburgh. Au sujet de la langue, il n'y aura aucune télésérie en anglais sur Tou.TV Extra. Netflix Canada devrait prendre des notes ici, car son offre pour la clientèle francophone est famélique.

Pour ses premiers mois d'existence, Tou.TV Extra n'entend pas imiter le Club Illico du rival Vidéotron, qui diffuse des séries (Mensonges, Le dôme) en primeur pour ses abonnés. Le Club illico de Vidéotron, qui fête son premier anniversaire, compte plus de 60 000 abonnés.

Les téléphages dévorent de plus en plus leurs émissions sur des appareils mobiles: depuis le début de l'année, la moitié des branchements à Tou.TV ont été faits à partir d'une tablette ou d'un téléphone portable. L'association d'Extra avec Rogers et Telus n'est donc pas anodine.

Avec ses 44 millions d'abonnés dans le monde, dont une majorité aux États-Unis, Netflix a les moyens d'investir 100 millions dans la confection d'une télésérie originale comme House of Cards. La petitesse de notre marché rend ce type de production quasi impossible pour Tou.TV ou le Club illico.

Et malheureusement pour nos lecteurs floridiens - on les salue, soit dit en passant -, la version Extra, tout comme le Tou.TV original, ne sera pas offerte légalement à l'extérieur des frontières du Canada. Pour consommer de la télé sur Tou.TV, il faut posséder une adresse IP au pays. Les plus ratoureux, qui m'ont communiqué leurs petits trucs par courriel, savent cependant comment contourner cet «obstacle».