Bon, vous regardez rapidement la photo et vous rouspétez: ah non, pas une autre émission de «capines et calèches» à la Jane Austen? Oui et non. Oui, parce que Downton Abbey, une formidable minisérie britannique couronnée au dernier gala des Golden Globes, démarre en avril 1912, au lendemain du naufrage du Titanic et à l'aube de la Première Guerre mondiale.

Et non, parce que le propos de Downton Abbey, comme sa réalisation ambitieuse, demeurent très contemporains pour l'époque dépeinte. Bien sûr, les relations entre les aristocrates et les domestiques nourrissent l'intrigue principale, mais rapidement, l'auteur oscarisé Julian Fellowes (Gosford Park) établit qu'aucune de ces deux classes ne pourrait survivre sans l'autre.

 

Surtout en cette époque charnière de grands bouleversements sociaux, une prémisse qui évoque celle de Mad Men où l'Amérique des années 60 embrasse des idées plus libérales. Downton Abbey reprend un peu la même trame. L'Angleterre s'électrifie, le téléphone s'implante, le mouvement féministe remporte d'importantes batailles, maisDownton Abbey, un majestueux domaine (fictif) de la campagne, où réside la richissime famille Crawley et leur armée de domestiques, reste figé dans ses traditions poussiéreuses plus que centenaires.

Tandis que la société se libéralise, les habitants de l'immense manoir, eux, s'accrochent à leurs rituels bien huilés et détestent tout ce qui frôle le changement. Heureusement, le comte Robert Crawley, qui gouverne cet empire, est un homme moderne et ouvert, contrairement à sa mère, une vieille chipie acariâtre jouée par la délicieuse Maggie Smith.

Mais voilà, les deux seuls héritiers connus du comte Robert Crawley périssent sur le Titanic. Et une vieille loi anglaise incassable empêche le patriarche de léguer sa colossale fortune à l'une de ses trois filles célibataires. Il faut absolument qu'un homme, descendant de la lignée des Crawley, lui succède. Cet homme, c'est un lointain cousin de Manchester, Matthew Crawley, que personne ne connaît à Downton Abbey.

L'arrivée de Matthew Crawley à Downton Abbey, dans le Yorkshire du Nord, provoquera des flammèches. D'abord, il n'appartient pas à ce milieu hyper bourgeois. C'est un avocat, qui, scandale! , désire conserver son emploi. La famille Crawley, elle, chasse, monte à cheval et ne se prépare même pas une tasse de thé sans l'aide de deux domestiques.

Comme dans la série Upstairs, Downstairs, les luttes de pouvoir se déroulent, en parallèle, dans les cuisines et appartements privés des majordomes, gouvernantes et autres employés. Il y a le valet de pied Thomas, un être ambitieux, cruel et calculateur, prêt à tout pour décrocher une promotion. Lui et la sèche Mme O'Brien, femme de chambre de la comtesse, complotent et médisent sur à peu près tout le monde.

Évidemment, autant les riches que les pauvres cachent des secrets, qui demeurent rarement enfouis. Vengeance, trahison, adultère, tout y est. C'est pour cette raison que des miniséries comme Downton Abbey sont aussi fascinantes. Elles mélangent habilement, le comique, le dramatique et une forme de joute politique. Tout ça campé dans des décors sublimes.

Les fans des Vestiges du jour ou de Brideshead Revisited adoreront ce Downton Abbey. Même les plus récalcitrants aux fresques historiques risquent d'y trouver leur compte. Le DVD est déjà sur le marché. Sinon, pour 9,99$, vous pouvez télécharger la première saison au complet, soit sept épisodes d'une heure, sur la boutique en ligne d'iTunes.

Vous replongerez alors dans une époque glorieuse, mais révolue, où les journaux étaient repassés au fer tous les matins, où les grands soupers se chorégraphiaient comme des ballets, où les gens s'habillaient chic même dans les petites occasions et où le noeud papillon, de même que les gants blancs, se portaient au quotidien.

L'argenterie étincelante, la délicate porcelaine, les meubles anciens, les salons de thé, le cristal lumineux: tout respire le luxe dans Downton Abbey.

Et il ne faut pas négliger les liens complexes entre les trois soeurs Crawley, Mary, Edith et Sybil. Mary, l'aînée et la plus belle, doit se trouver un époux et sa grand-mère pousse très fort pour qu'elle marie le fameux cousin éloigné, question que l'argent reste dans la famille. Mais Mary a la tête dure. Et sa soeur cadette Edith, le vilain petit canard, est ultra jalouse. Comment cela va-t-il se conclure? Oh! my Lord, comme j'ai hâte à la deuxième saison.

Je lévite

Avec la chanteuse soul britannique Lianne La Havas. Imaginez un mélange de Feist et d'Erykah Badu. À 22 ans, la Londonienne Lianne La Havas a tout pour elle: talentueuse, belle comme un coeur et dotée d'une voix de miel. Ses deux mini-albums, Lost&Found et Forget, sont parfaits pour un brunch douillet du dimanche matin.

Je l'évite

La controverse autour de Modern Family. Dans l'épisode diffusé mercredi, la petite Lily, fille de Cameron et Mitchell, a échappé son premier juron, un fuck qui a bien sûr été couvert par un bip (l'actrice a dit fudge pendant le tournage). Ça arrive à tous les parents, ce jour maudit où l'enfant chéri emploie, pour la première fois, des jurons. Mais, non: des groupes conservateurs ont demandé à ABC de retirer l'épisode, qui encouragerait, selon eux, les jeunes à sacrer. Pardon? Vivons-nous en 2012 ou à l'époque de Downton Abbey?

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Photo AFP