La nouvelle émission Ici et maintenant de Pénélope McQuade, qui démarre le samedi 14 janvier à 20h sur les ondes de Radio-Canada, s'inscrit dans cette forte vague de «télé inspirationnelle» que fabriquent les Oprah Winfrey et, plus près de chez nous, Josélito Michaud ou Chantal Lacroix.

Dans Mlle court, Chantal Lacroix a filmé des femmes de tous âges s'entraînant pour une longue séance de jogging à relais et nous les avons vues pleurer, suer, se fâcher, rire, se décourager, s'épauler, sacrer, mais, ultimement, triompher au petit écran. Dans Donnez au suivant, Chantal Lacroix et sa vaillante équipe aménagent la cour extérieure d'une jeune maman débordée ou corrigent le sourire édenté d'une dame bossant dans un casse-croûte. Tout ça est très visuel, concret, rythmé et efficace. Difficile de ne pas écraser une larme devant ces longues chaînes de bonheur. Et avouons-le: le moment de la grande révélation (oh, je peux enfin sourire sans cacher mes dents!) est toujours le plus satisfaisant de ces 60 minutes de télévision.

Ici et maintenant, qui nage dans ces mêmes eaux de bonté, adopte une approche complètement différente de Donnez au suivant. La caméra y est plus pudique et le ton, plus introspectif. Toutes les semaines, la blonde animatrice, qui se décrit plutôt comme une guide-accompagnatrice, rencontre deux personnes qui ont besoin de «donner un coup de pouce au destin ou de tordre le bras à la providence».

Le premier cas abordé est celui d'un ingénieur de 37 ans, Alexandre Raîche, père de famille qui a toujours rêvé de devenir pompier. À l'aube de ses 40 ans, il se demande si cette flamme professionnelle s'éteindra un jour. Pour le vérifier, Pénélope McQuade le surprendra à l'aube, le kidnappera et l'amènera suivre une formation de sapeur pendant une journée.

Pendant de trop longues minutes, la caméra d'Ici et maintenant le capte en train d'apprivoiser l'équipement, de ramper dans des tunnels (il est claustrophobe et anxieux, finalement) et de sauver une fausse victime.

Alexandre Raîche enfilera-t-il un jour l'uniforme de façon professionnelle? On ne le sait malheureusement pas. Comme son titre l'indique, l'émission s'attarde à l'ici et au maintenant. Bref, c'est le pouvoir du moment présent, pour paraphraser l'écrivain nouvelâgeux Eckhart Tolle. Comme téléspectateur, c'est frustrant: si nous suivons la quête personnelle et professionnelle d'Alexandre, nous voulons l'accompagner jusqu'au bout, non?

Dans la deuxième partie de l'émission, Pénélope McQuade visite un retraité de 65 ans, Henri-Louis, qui a eu la hanche brisée à la suite d'un accident de travail et qui ne va plus dans le bois aussi souvent qu'avant. Sa fille Nathalie aimerait que son papa revoie un orignal. «Mon père est beau en forêt. Il y est vivant», confie à la caméra cette Nathalie.

Pénélope, Henri-Louis et Nathalie, accompagnés d'un guide, s'enfoncent donc dans une forêt et guettent l'arrivée de ladite bête, tout en reproduisant le fameux «call de l'orignal».

Heureusement pour Henri-Louis, entre plusieurs plans de branches de sapins qui oscillent au vent, l'animal se pointe. Mais Henri-Louis a-t-il repris goût à la nature, à la chasse et à la pêche? Mystère. Pour le téléspectateur, encore ici et maintenant, il manque un gros morceau du puzzle.

À trop vouloir ne pas être racoleur ni larmoyant, l'équipe d'Ici et maintenant a peut-être épuré l'émission de son essence, soit l'émotion brute, qui permet de connecter avec la personne que l'on nous présente. Oui, il y a de la place pour de la télévision plus contemplative, plus lente, mais il faut tout de même raconter une histoire avec un début, un milieu et une fin. Dans ce type de cheminement quasi spirituel, la fin est l'élément le plus important, à mon avis, mais a malheureusement été écartée du concept. Vous n'y retrouverez donc pas de grands frissons comme dans Les anges de la rénovation, par exemple.

L'intention d'Ici et maintenant est louable, soit accompagner des gens - en retenue et en subtilité - dans leurs aspirations. Mais son exécution reste à peaufiner. C'est extrêmement difficile de catapulter à l'écran des moments hyper intimes comme la prise de conscience ou la découverte de soi sans sombrer dans le cucul. Et honnêtement, pour accélérer le tempo, il aurait fallu insérer trois cas dans l'émission au lieu de deux.

Radio-Canada a commandé 13 épisodes d'une heure d'Ici et maintenant, qui remplaceront Le moment de vérité les samedis soirs cet hiver. Pourquoi le samedi? «Pour qu'on se dépose devant la télé après nos semaines de fou, nos semaines de cohue», précise Francine Allaire, directrice à Radio-Canada.

Personnellement, côté «télé-inspirationnelle», je préfère l'approche plus assumée de Chantal Lacroix, même si elle est plus tape-à-l'oeil et flamboyante.