Ce sont des lecteurs, non, attendez, ce sont des lectrices, plusieurs lectrices, qui m'ont dirigé vers ce produit télévisuel avec des courriels gênés qui dégoulinaient quasiment de honte: «Tu vas voir, c'est super quétaine comme émission, c'est totalement ridicule, mais c'est extrêmement accrocheur, je ne suis plus capable de m'en passer».

Ce petit plaisir coupable porte le nom de Pretty Little Liars, une série télé du réseau ABC Family adaptée de livres pour ados pondus par Sara Shepard. Pas un autre truc à la Gossip Girl, ai-je soupiré en glanant quelques infos sur l'émission en question, où cinq adolescentes de milieu aisé pataugent dans une mare de secrets boueux.

Un peu à reculons, j'ai payé 2,49$ pour le premier épisode sur iTunes. Puis j'ai acheté le deuxième. Et le troisième. Et pourquoi pas le quatrième, le cinquième et le sixième, tant qu'à y être? Misère. En moins de deux jours, je suis devenu accro à ce soap d'ados. Scoop ici: Vrak.TV a acquis les droits de Pretty Little Liars, Les menteuses, en version française, et programmera cette télé-tabloïd dans sa prochaine grille.

Pretty Little Liars mélange, avec infiniment moins de budget, des éléments de Beautés désespérées, Twin Peaks et I Know What You Did Last Summer. Le feuilleton s'ouvre avec une fête où cinq meilleures amies de 16 ans, gouvernées par la reine blonde Alison, ingurgitent de l'alcool et s'enfoncent dans une histoire pas tellement catholique. Résultat: Alison disparaît et un an plus tard, la police retrouve son corps mutilé.

Les quatre amies restantes savent-elles qui a tué Alison et pourquoi? Aucune d'entre elles ne s'ouvrira la trappe. Car elles ont chacune plusieurs secrets personnels à enfouir. Aria-la-fille-normale fréquente son prof d'anglais en cachette, Hannah-le-pétard vole dans les grands magasins, Spencer-la-parfaite triche à l'école et flirte avec le copain de sa grande soeur, tandis qu'Emily-la-sportive se pose des questions sur son orientation sexuelle.

On s'entend: tout ça baigne dans le gros cliché, les intrigues sont aussi subtiles qu'une blague de François Massicotte et les mères de ces quatre ados ont l'air d'avoir l'âge de leurs filles. Merci Dr Botox! Et merci aux agents de casting de repêcher des actrices de 27 ans pour des rôles qui en requièrent 10 de moins.

Là où ça se corse, c'est que le quatuor de copines reçoit régulièrement des textos anonymes - et menaçants - d'une certaine A qui sait tout, mais absolument tout sur elles. Qui donc est cette A qui menace de faire éclater leurs vies parfaites? Est-ce Alison, qui ne serait pas morte finalement? En plus des SMS, A espionne les quatre filles, les filme à leur insu et laisse des messages barbouillés avec le rouge à lèvres qu'utilisait quotidiennement Alison. Uh-oh.

Si Pretty Little Liars captive autant, c'est qu'il s'assume totalement en tant que soap, en embrasse tous les codes et en beurre même une couche de plus: gros plans sur des visages tordus de peur, décor en carton, musique cheap qui appuie les moments de tension, etc. Comme dans tout bon soap qui se respecte, Pretty Little Liars se déroule dans une ville fictive (Rosewood, en Pennsylvanie), où l'été semble s'être acheté une résidence permanente et où les bonnes gens disputent des parties de tennis au country club. Le tout, en ne portant que des tenues griffées, évidemment.

Peu convaincu du succès que remporterait l'émission, le réseau ABC Family n'avait commandé que 10 épisodes de Pretty Little Liars et les a diffusés l'été dernier. Première surprise: ce «soap» a bien fonctionné chez les 12-24 ans. Deuxième surprise: ce soap un peu cheapo est devenu l'émission de fiction préférée des femmes de 18 à 34 ans.

«Le côté suspense, le côté «qui a tué», c'est ce qu'on aimait là-dedans», indique Dominique Bazay, vice-présidente à la programmation de Vrak.TV. La directrice des acquisitions de la chaîne, Johanne Landry, enchaîne: «Et le type mystère plaît à un public beaucoup plus large.»

Avec ses références plantées dans la culture populaire d'aujourd'hui, comme Twitter ou Lady Gaga, Pretty Little Liars est le genre de série qui vieillira sans doute très mal. Voilà pourquoi il faut la consommer maintenant, avant sa date d'expiration.

Je lévite

Avec Toutes les télés du monde à TV5. Un bel aperçu, sous forme de zapping, des émissions qui défilent sur les petits écrans du Vietnam, de l'Irak, de la Chine ou du Gabon. Du bonbon pour les amateurs de télévision. La case horaire n'est pas évidente, soit les samedis à 22h30, sinon, il y a possibilité de rattrapage au TV5.ca.

Je l'évite

La guerre des empires. Saviez-vous que des producteurs indépendants qui oeuvrent à TVA se font interdire de parler à La Presse? Pas tellement professionnel comme manoeuvre. Surtout que plusieurs émissions du «vrai réseau» sont financées par des fonds publics collectés à même nos poches. Un souhait pour 2011: que toutes ces guéguerres, d'un côté comme de l'autre, cessent.