Minuit, le soir a été une puissante et poignante série sur la condition masculine et 19-2, le nouveau produit policier de la SRC, qui démarre le mercredi 2 février à 21 h, s'inscrit dans cette lignée: dure, violente, intense, réaliste et crue.

Cette oeuvre, signée à plusieurs mains, dont celles de Réal Bossé, Joanne Arseneau (Tag, 10-07) et Danielle Dansereau (Le négociateur), explore avec beaucoup de finesse les zones d'ombre de deux policiers dissemblables, soit Nick Berrof (Réal Bossé) et Ben Chartier (Claude Legault).

Dans les premières secondes de 19-2, on reconnaît tout de suite la touche inspirée de l'un de nos plus brillants réalisateurs, Podz, avec sa caméra nerveuse, mais pas trop, qui se colle aux deux flics, toujours plongés dans l'action du quartier Centre-Sud de Montréal.

Donc, Nick l'enragé (Réal Bossé) est le plus difficilement aimable du duo. Il râle tout le temps, enguirlande ses collègues et hait toute forme d'autorité. Vous comprendrez rapidement pourquoi. Au tout début de la série de 10 épisodes, Nick Berrof commet une bourde impardonnable lui faisant perdre Harvey (Vincent Graton), son partenaire de patrouille.

Après un arrêt de travail de trois mois, le commandant du poste 19, Marcel Gendron (Jean Petitclerc), impose à Nick Berrof un nouveau compagnon de voiture, la recrue Ben Chartier (Claude Legault), policier à la Sécurité du Québec (la SQ) depuis 14 ans.

Ben est exactement le contraire de Nick: posé, droit, professionnel et campagnard, ce qui lui vaut le surnom de «chevreuil». C'est le classique du bon cop, bad cop, mais sans le burlesque.

Mais tout n'est pas blanc ou noir dans 19-2, un chiffre qui désigne le numéro de l'auto conduite par Ben et Nick. Si Ben a quitté la SQ, fui son patelin rural et laissé temporairement sa copine Catherine (Fanny Mallette) pour déménager à Montréal, c'est qu'il vit très mal avec un événement douloureux de son passé. Je n'en révèle pas plus.

La vie personnelle de Nick ne va guère mieux. Séparé de sa femme Isabelle (Julie Perreault), qui travaille comme sergent-détective au même poste 19, il revoit constamment la scène (ensanglantée) de son erreur professionnelle. En plus, il a trompé sa femme avec une collègue. Ça va mal à la shop.

Comme dans Minuit le soir, la détresse des protagonistes de 19-2, enfermés dans leurs malheurs, se vit beaucoup dans le silence et la solitude. Encore une fois, Podz filme ses acteurs avec une superbe sensibilité. Je pense notamment à une scène d'amour entre Claude Legault et Fanny Mallette, d'une beauté et d'une tendresse incroyables. Un moment d'intimité parfaitement capté.

À l'opposé, 19-2 renferme des moments de misère humaine et de violence difficiles à regarder. Voir Nick engueuler et brasser son préado de 12 ans pour une banale histoire de chaussures de sport nous rend profondément mal à l'aise. Il y a aussi quelques scènes de fractures ouvertes au bras et de balles transperçant des crânes qui évoquent Au nom de la loi, qui portait - bien sûr - la signature visuelle inquiétante de Podz.

Le générique d'ouverture, tout blanc, comme dans Trauma, est très joli et la musique de Nicolas Maranda appuie parfaitement la trame dramatique, exactement comme dans Minuit, le soir, avec violoncelle et xylophone. Les messages passent tout aussi bien dans les scènes sans parole, où seuls les néons grésillent.

Podz aime bien travailler avec sa gang de comédiens fétiches. Il a ainsi ramené le couple de son film Les sept jours du talion (Claude Legault et Fanny Mallette), ainsi que le jeune Robert Naylor, si bon dans 10 1/2. Robert Naylor joue Théo, le fils de Réal Bossé (l'otage d'Au nom de la loi) et Julie Perreault (la gérante de bar de Minuit, le soir).

Si l'ensemble est plutôt noir, un détail de 19-2 m'a cependant bien fait rire: Nick et Ben travaillent pour le Service de police métropolitain. Le SPM. Ça ne s'invente pas. Insérez ici votre propre gag.

La série 19-2, qui a d'abord porté le titre de Deux beux, a été criblée de problèmes, dont l'épique chicane entre Réal Bossé et Claude Legault, une chicane qui a forcé Legault à claquer la porte du projet, puis à y revenir. Le format est aussi passé de trente minutes à une heure en cours de route.

Hier midi, Podz a - pour une rare fois - évoqué publiquement la guéguerre qui a secoué son équipe. «Il y a eu des conflits. Ça s'est pogné et ça s'est réconcilié», indique le réalisateur, sans toutefois préciser l'origine du problème.

Le producteur Luc Châtelain de Films Zingaro 2 a refusé de dévoiler le budget de 19-2, qui serait supérieur à celui de Trauma. Chose certaine, beaucoup d'argent y a été investi. La caméra nous transporte au coeur des endroits chauds de Montréal, dans les ruelles, appartements miteux et bars de paumés. Si vous avez aimé Minuit, le soir, 19-2 comblera vos mercredis soir, c'est certain, 10-4, le message a-t-il bien été reçu?

Photo: Radio-Canada