C'est un diagnostic très rassurant sur l'état de santé de la télévision québécoise. Entre 20h30 et 21h dimanche, au plus fort du trafic télévisuel, 4 408 000 francophones ont consommé de la télé. Pas sur le web. Pas sur un téléphone portable. Mais en allumant leur écran plat ou leur bonne vieille Panasonic à cadran.

Encore plus réjouissant, 82 % de ces 4,4 millions de téléphiles ont syntonisé TVA ou Radio-Canada, les deux grandes chaînes généralistes québécoises qui ont respectivement proposé Star Académie et Tout le monde en parle. Comme quoi, les grands rendez-vous du petit écran, lorsque bricolés par des artisans chevronnés tels Guy A. Lepage, Julie Snyder ou Stéphane Laporte, ont encore cette faculté quasi magique d'attirer des millions de curieux.

Mis à part RDS et ses spectaculaires parties du Canadien de Montréal, aucune chaîne spécialisée québécoise ne dispose d'un pouvoir d'attraction aussi colossal. Et ces cotes d'écoute astronomiques ne comprennent pas les téléspectateurs qui ont enregistré l'une ou l'autre de ces émissions canon, pour les consommer plus tard.

Sur le front de la guerre du dimanche, la nouvelle mouture de Star Académie à TVA a cloué 2 306 000 téléspectateurs devant leur appareil pendant 3h07. C'est plus que le double de l'audience récoltée à l'autre poste par Tout le monde en parle (1 132 000). Guy A. Lepage et Dany Turcotte ont beaucoup souffert de la présence des 14 nouveaux académiciens, perdant plus de 400 000 fidèles par rapport à leur moyenne de l'automne (1 588 000). Quant à la cérémonie des Grammys, relayée chez nous par Global, elle n'a pas intéressé plus de 50 000 fans.

Bien honnêtement, la dernière édition de Tout le monde en parle n'a pas été la plus reluisante de la saison, loin de là. Mettons que la playmate Anne-Krystal Goyer n'a pas élevé le niveau de discussion autour de la grande table (ouf!). Et il manquait d'invités prestigieux (Érick Remy, vraiment?) pour affronter Star Académie à armes égales. Comme dans la quotidienne de Star Académie, en septembre 2005, la femme de théâtre Pol Pelletier, intense et magnétique, a insufflé un délicieux vent de folie sur le plateau.

De retour à Star Académie, je tergiverse encore sur le choix de 1000 coeurs debout de Cali comme chanson thème, une pièce complètement inconnue des téléspectateurs québécois. D'un côté, l'absence d'un hymne québécois m'agace beaucoup. De l'autre, Julie Snyder et Stéphane Laporte ont enfin fouillé ailleurs que dans des bacs poussiéreux des années 60 et 70 pour repêcher leur chanson emblématique.

Mais pourquoi verser des redevances à un auteur-compositeur français, alors qu'un artiste d'ici aurait facilement pu les encaisser? La démone blonde a tellement martelé en entrevue que Star Académie faisait vendre des tonnes et des tonnes de copies de disques québécois que sa volte-face étonne. Là-dessus, vos courriels ont été unanimes: personne n'a aimé 1000 coeurs debout. Personne non plus n'a bien décodé ses paroles, que les élèves de Sainte-Adèle ont marmonné sans jamais les articuler correctement (beaucoup de travail en perspective pour Sophie Faucher).

Le texte de 1000 coeurs debout colle parfaitement à Star Académie: «Nous sommes des milliers, un fleuve extraordinaire. Notre force est sublime, elle emportera tout. Et s'ils essaient encore, ils se frotteront à mille coeurs debout.» J'imagine (et j'espère) que les bonzes de l'Académie ont épluché tout le répertoire québécois avant de jeter leur dévolu sur Cali.

Deux dernières observations sur Star Ac. Deux amis y ont fait leur entrée. La Pink de Drummondville, Brigitte Boisjoly, 26 ans, a souvent chanté en duo avec le conseiller financier Olivier Beaulieu, 24 ans, au resto-bar La Mezzanine, rue Lindsay. Ensuite, le candidat avec l'étoile (filante) de Star Académie tatouée sur son torse, Simon Morin, de Lachenaie, a finalement souffert pour rien. Il n'a pas grimpé dans le bus dimanche soir. Oups.

Mad Men à Télé-Québec?

Une taupe bien fouineuse me relaie cette info croustillante: Télé-Québec aurait mis le grappin sur l'excellente série américaine Mad Men, qu'elle diffuserait, bien sûr, en français. Remarquez l'emploi du conditionnel, car «Télé-Québec n'est pas en mesure de confirmer ou d'infirmer l'acquisition de la version française de Mad Men avant la semaine prochaine», a soufflé une porte-parole de la chaîne publique québécoise hier.

Vous pouvez acheter le coffret DVD de la première saison de Mad Men, qui ne comprend toutefois pas de piste en français. Ordinaire.

Plantée au début des années 60 dans la prestigieuse et fictive agence Sterling Cooper, Mad Men raconte la vie d'un groupe hétéroclite de publicitaires new-yorkais avec, en toile de fond, les bouleversements sociaux qui sculptent les États-Unis. La reconstitution de l'époque, autant dans les décors que dans les comportements sociaux, est d'une précision chirurgicale. De la grande télévision.

En anglais, Mad Men, un surnom donné aux requins de la réclame, renvoie à Madison Avenue (la prestigieuse artère où toutes les grandes agences logent à New York), ainsi qu'à ad men, l'appellation anglaise des publicitaires.

Quel titre portera cette formidable série chez nous? Prions pour que Télé-Québec ne choisisse pas Fils de pub. Plus capable de ce jeu de mots douteux.

 

Photo: François Roy, La Presse

L'animatrice Julie Snyder en compagnie de cinq des candidates de Star Académie IV Geneviève Breton (23 ans), Émilie Lévesque (25 ans), Vanessa Duchel (19 ans), Sélène Bérubé (23 ans) et Amélie Hall (25 ans).