À l'avant-veille de négociations qui s'annoncent difficiles avec la Ligue nationale, le directeur général de l'Association des joueurs, Donald Fehr, s'entend au moins sur un point avec son vis-à-vis Gary Bettman et son bras droit, Bill Daly, ils devront faire leur deuil des vacances familiales cet été.

«Permettez-moi de préciser qu'il y aura des vacances familiales encore, mais que je ne pourrai en profiter cet été», a convenu Donald Fehr, qui a longuement échangé avec les journalistes, mercredi soir, au Prudential Center, après la conférence de presse du commissaire Gary Bettman sur l'état de santé de la Ligue et de quelques-unes de ses 30 équipes. Une conférence que Fehr a suivie avec attention, entouré de ses principaux collaborateurs.

Pourquoi s'afficher ainsi? Pour intimider son adversaire à la veille d'un combat qui sera long et difficile?

«Pas du tout. Je tiens à être ici pour tout entendre et pour saisir la façon dont les réponses sont données. Gary et moi commençons à bien nous connaître. Nous nous parlons plusieurs fois par mois au téléphone. À la veille des négociations, je trouve important d'être ici ce soir», a plaidé  Fehr, qui ira aussi faire un tour à Los Angeles au cours de la finale.

Heureux hasard ou bras de fer intentionnel de la part des deux hommes, Fehr et Bettman se sont retrouvés face à face pendant une minute ou deux avant de quitter la salle d'entrevues où ils ont tour à tour été en vedette. Il ne manquait qu'un face à face, des poings brandis et des yeux méchants pour que l'on puisse croquer une photo et placarder la LNH d'affiches annonçant la tenue du combat de titans qui s'annonce.

Au fait, c'est pour quand ce combat?

«Nous n'avons pas encore arrêté de date précise. Mais comme l'a indiqué Gary tout à l'heure, nous sommes prêts à amorcer les rondes préliminaires et ils le sont aussi. Ça ne devrait donc pas tarder», a convenu Fehr, qui devrait revoir Bettman à la table des négociations seulement.

Scénarios catastrophes

La convention collective signée il y a sept ans après un lock-out qui a privé les amateurs de hockey de spectacles et les joueurs de leur salaire pendant un an viendra à échéance le 15 septembre.

Plusieurs observateurs prévoient déjà que le début de la saison prochaine sera retardé. Qu'un bras de fer entre la LNH et le syndicat représentant ses joueurs pourrait se prolonger pendant deux, voire trois mois. Que la saison pourrait même être compromise.

Après avoir confirmé que les revenus de sa ligue avaient franchi le cap des 3,3 milliards de dollars, que les amphithéâtres étaient remplis à 96 %, et que le nouveau contrat avec NBC Sports et l'offensive sur les médias sociaux assuraient à la LNH une visibilité jamais encore obtenue, Bettman s'est inscrit en faux devant ces scénarios catastrophes.

«Est-ce que vous pouvez au moins nous donner le temps de nous asseoir et de dévoiler nos positions respectives avant de parler de conflit? », a plusieurs fois répété Bettman.

Syndicat fragile

On veut bien. Mais après les conflits qui ont marqué les négociations dans la NFL et la NBA, et avec les prétentions selon lesquelles la LNH pourrait réclamer que la portion des revenus versée aux joueurs passe des 57 % actuels à 50 %, il est normal d'anticiper le pire.

Mais voilà! Le syndicat des joueurs est-il assez uni pour permettre à Donald Fehr d'adopter la ligne dure si jamais la LNH décide de mettre cette solidarité à l'épreuve?

Plusieurs joueurs croisés au fil des dernières semaines croient que non. Les séquelles du dernier lock-out - une année de salaire perdue et une remise de 24 % à la LNH lors de la saison qui a suivi le retour au travail - sont encore fraîches dans la mémoire des joueurs.

«Le spectre du dernier conflit est présent en toile de fond», a d'ailleurs reconnu  Fehr lors du long échange qu'il a eu avec les journalistes mercredi.

Vincent Damphousse, l'un des architectes du plan qui a permis de dénouer l'impasse lors du dernier conflit, craint justement que la LNH profite des souvenirs laissés par le dernier lock-out pour jouer dur.

«L'évolution des revenus de la Ligue et des joueurs confirme ce que j'ai toujours cru : nous avons signé une entente qui était bonne pour les deux parties il y a sept ans. Il y a eu beaucoup de magouille menée par un petit groupe de joueurs mécontents - groupe dirigé par Chris Chelios - et cela a déstabilisé l'Association avec les départs successifs de Bob [Goodenow], Ted Saskin et Paul Kelly. Mais je crois que Donald Fehr a réussi à regrouper les joueurs depuis son arrivée - décembre 2010 -, mais c'est une chose d'être solidaire en début de négociations, c'en est une autre quand ça fait six mois qu'on attend dans le salon. Avec des données aussi positives sur les finances de la Ligue, je demeure convaincu qu'il y a moyen de satisfaire les deux côtés encore une fois. À moins que la Ligue ne veuille donner un autre grand coup.»

On le saura bientôt.