Il y a un mois à peine, Chris Kreider n'était qu'un nom figurant sur la liste des prospects des Rangers. Un très bon prospect que les Blueshirts ont sélectionné en première ronde (19e sélection) du repêchage de 2009. Mais un prospect quand même...

Ce matin, son nom fait la manchette dans les pages sportives des journaux de New York et du New Jersey. Il est sur toutes les lèvres des partisans des Rangers qui découvrent une autre jeune vedette qui aidera cette équipe à trôner sur la LNH pour des années encore, de celles des Devils qui le maudissent sans oublier celles des amateurs de hockey du reste de la LNH qui ne connaissaient rien, ou pas grand-chose, de ce jeune patineur qui vient d'avoir 21 ans.

En passant, vous n'avez pas à vous flageller parce que vous ne connaissiez pas Kreider. Que non! Son entraîneur-chef John Tortorella ne le connaissait pas lui non plus. De fait, il ne le connaît pas encore vraiment.

«Je lui ai parlé trois ou quatre fois. Je ne sais rien de lui. Rien, si ce n'est qu'il a un don sur la patinoire. La rondelle le suit. Elle le rejoint en fait, car il a cette qualité de s'en éloigner pour se créer de l'espace et de la retrouver. Lorsqu'il est en possession de la rondelle, il sait quoi faire. C'est excitant de voir tout ce qu'il accomplit alors qu'il arrive directement des rangs universitaires. C'est particulièrement emballant quand on pense à ce qu'il pourra nous donner à compter du début de saison l'an prochain», indiquait l'entraîneur-chef des Rangers après la victoire de 3-0 des Blueshirts au Prudential Center samedi.

Dans le livre des records

Si Chris Kreider fait la manchette des quotidiens new-yorkais dimanche matin au lendemain de la victoire des Rangers à laquelle il a contribué en marquant un but, le jeune Américain s'est aussi assuré d'une place de choix dans le livre des records de la LNH.

Car avec ce but, son cinquième des séries, et les sept points qu'il affiche après 15 matchs de séries éliminatoires, Kreider détient le record de buts marqués et de points récoltés en séries éliminatoires par un joueur n'ayant pas encore disputé un seul match dans la LNH. Et les séries sont loin d'être terminées.

Le jeune attaquant des Rangers a ainsi devancé Eddie Mazur qui a marqué quatre buts et récolté six points en séries avec le Canadien en 1951, 1952 et 1953 et l'actuel directeur général des Capitals de Washington, George McPhee, qui a marqué trois buts et ajouté trois passes, avec les Rangers au printemps 1983.

D'où vient Chris Kreider? Il arrive directement de Boston College avec qui il a remporté le championnat universitaire américain ce printemps.

Pendant que des rumeurs associaient les noms de Rick Nash et de Jeff Carter aux Rangers avant la date limite des transactions, le directeur général Glen Sather et ses hommes de confiance élaboraient leur stratégie pour rapatrier leur jeune prospect aussitôt sa saison terminée.

Pour y arriver, il fallait aussi le convaincre de tourner le dos aux Eagles, avec qui il a marqué 23 buts et récolté 45 points en 44 matchs l'hiver dernier, et à sa carrière universitaire qu'il aurait pu prolonger d'une autre année.

Un contrat de trois ans d'une valeur de 2,4 millions $ et l'assurance qu'il aurait la chance de jouer en séries l'ont convaincu.

Les modalités de ce contrat permettent aussi à  Kreider d'empocher ses premiers dollars à titre de hockeyeur professionnel. Car si les joueurs de la LNH ne touchent pas de salaire en séries, Kreider, selon le collègue Bob McKenzie de TSN a touché 300 000 $ en primes personnels jusqu'ici : 25 000 après cinq rencontres, 100 000 après 10 rencontres et 175 000 samedi lors de son 15e match.

Pas de cadeaux pour le jeunot

Avec ses six buts, dont deux ont assuré des victoires, Chris Kreider n'est devancé que par Brad Richards au sommet des francs-tireurs de Rangers.

Au New Jersey samedi, il a effectué plusieurs présences avec Richards et Gaborik en remplacement de Carl Hagelin, une autre recrue, qui est toujours en quête d'un premier but en séries (trois passes).

Comme l'assurait le gardien Henrik Lundqvist, Kreider mérite tout ce qu'il obtient : «Il est en uniforme parce qu'il contribue et aide l'équipe à gagner et non parce qu'il est un joueur prometteur qui pourra nous aider dans un an ou deux. Nous avons tous des rôles à jouer et il joue très bien le sien. De plus, il s'est très vite adapté à l'équipe et au style de jeu. Nous devons lui accorder tout le mérite qui lui revient. Mais encore une fois, il est hors de question de lui accorder des passes-droits en raison de son âge et de son inexpérience», soulignait le gardien des Rangers après sa victoire de samedi.

De passe-droit, Kreider n'a pas eu. C'est d'ailleurs du haut de la galerie de presse qu'il a suivi les deux premiers matchs de la série Ottawa-New York en première ronde. Et bien qu'il ait obtenu plus de 16 minutes d'utilisation lors de la rencontre de samedi, l'ailier gauche a dû se contenter de soirées de moins de 10 minutes à cinq reprises en 15 rencontres.

«Autant je suis heureux de ce qui m'arrive, autant je suis conscient de l'envergure de la situation. Il est donc hors de question de me sentir déjà à ma place. Encore moins d'afficher de la complaisance dans ma façon de jouer. Je veux contribuer à l'attaque, mais je dois aussi être alerte en défensive où les erreurs sont coûteuses alors que tu peux te retrouver avec un différentiel de moins-2 avant d'avoir compris ce qui se passait autour de toi», expliquait Kreider après le premier match de la finale de l'Est. Match au cours duquel il avait inscrit le 2e but des siens. Comme samedi.

C'est à Montréal, en 2009, que Chris Kreider a été repêché. Une sélection qui est passée pas mal inaperçue. Pourquoi? Parce qu'au moment où les Rangers l'ont réclamé le Centre Bell était sens dessus dessous en raison de a sélection du Québécois Louis Leblanc par le Canadien. À l'exception de ses parents et amis qui l'accompagnaient à Montréal, personne n'a porté attention à ce solide attaquant de 6'3'' et 230 livres lorsqu'il s'est présenté sur l'estrade pour enfiler le chandail des Rangers.

On le remarque facilement aujourd'hui alors que le chandail numéro 20 file à vive allure sur la patinoire et que le gros gaillard qui se trouve sous le chandail affiche déjà beaucoup de talent. Mais le plus beau de l'affaire pour les Rangers et leurs partisans, c'est que le meilleur est à venir dans le cas de Kreider et de plusieurs de ses jeunes coéquipiers avec les Blueshirts.