Le scooter semble minuscule à côté du gros autobus. Et pourtant, à l'intersection, c'est le plus petit qui attire les regards. Curieux, le chauffeur de la STM ouvre même sa fenêtre pour examiner le deux-roues. Puis son visage s'illumine : «Hein!?! Y est vraiment électrique? Toute?»

Signe d'acquiescement. Sourire. Puis le scooter file à vive allure dans un silence complet, sans l'ombre d'un nuage polluant.

Fabriqué par une entreprise taïwanaise, l'EVT-168 ne possède pas de bougies, de réservoir à essence, de catalyseur ou même, de pot d'échappement. Totalement électrique, il est plutôt doté d'un ensemble de batteries et, ce qui le caractérise, d'un moteur-roue (oui, oui, comme celui qu'a abandonné Hydro-Québec).

Oubliez donc les centimètres cubes, ce scooter est équipé d'un moteur de 1500 W, la puissance la plus élevée de sa catégorie (équivalent à 49 cm3). Un watt de plus et le permis de moto est obligatoire.

Il ne s'agit donc pas ici d'un vélo déguisé en scooter, comme il y en a tant en ville. Mais plutôt d'un réel cyclomoteur capable d'atteindre près de 60 km/h en quelques secondes, d'emprunter les ponts Jacques-Cartier et Victoria, de se faufiler dans la congestion la plus lourde et de se stationner presque n'importe où, tout à fait gratuitement.

Mais bon, que valent tous ces avantages, si le scooter tombe en panne sèche (sic) après seulement quelques kilomètres? Qu'en est-il donc de l'autonomie du bolide?

L'EVT-168 est dotée d'un bouton qui vous permet d'alterner entre deux modes de conduite : «économie» ou «puissance». Entre les deux, 10 km/h de différence... et toute une capacité électrique.

Vous vous maintenez à «économie» et acceptez ainsi de ne pas dépasser 45 km/h (ce qui est loin d'être évident)? Vous obtiendrez une autonomie d'environ 70 km, soit l'équivalent du tour de l'île de Montréal à vol d'oiseau. Si, au contraire, vous roulez constamment «dans le tapis», vous ne dépasserez pas les 30 km (40 km selon le manufacturier, mais croyez plutôt celui qui a dû pousser le scooter après le 29e km...)

Bref, l'autonomie varie entre 30 et 70 km, ce qui n'est pas suffisant pour le «vendeur de commerce», il est vrai, mais qui l'est amplement pour les navetteurs urbains, même ceux de la proche banlieue. Surtout s'ils ont accès à une prise de courant au bureau.

Car pour charger la bête, rien de plus simple. On la branche dans une prise conventionnelle. En une heure, la batterie est rechargée aux deux tiers, en quatre heures, elle est pleine. Le coût : moins de 10 ¢ la charge...

«Elle est finie l'époque où les scooters électriques étaient peu fiables, peu rapides et manquaient d'autonomie, estime David Goldmann, propriétaire de la boutique Ecomoto, à Montréal. Mais leur popularité est néanmoins limitée, car les gens ne font pas encore la différence entre un vélo électrique et un scooter.»

Mais il n'y a peut-être pas que cela. Si le scooter électrique jouit d'incontestables avantages, il compte aussi certains désagréments : l'absence de bornes de recharge en ville comme il en existe à Paris, la courte durée de la saison de scooter et surtout, le prix de ce dernier.

Doté de batteries au lithium, le EVT-168 se détaille 5000 $, soit le même prix qu'une Vespa italienne de beaucoup plus grande qualité. Suffit de rencontrer un nid-de-poule pour s'en convaincre... La facture baisse certes à 3700 $ avec des batteries au plomb, mais ces dernières ne durent qu'un peu plus de deux ans (600 $ le remplacement).

«C'est vrai, mais pourquoi exiger d'un scooter ce qu'on ne demande pas à une auto? s'interroge David Goldmann. Quand vous achetez une voiture, demandez-vous le prix des freins, de la batterie ou des pneus d'hiver?»

Bon point. Malgré les problèmes environnementaux qui s'aggravent, nous exigeons encore aujourd'hui que les produits «éco» soient au même prix que les produits nocifs pour l'environnement, voire moins cher encore. Prenez la Prius , par exemple, on ne l'achètera que si le prix de l'essence est assez élevé pour «rentrer dans notre argent», même si on n'exige pas la même chose d'une auto luxueuse, d'un VUS ou d'une voiture sportive.

Comme si le faible impact environnemental d'un véhicule, qu'il ait deux ou quatre roues, n'était pas en soi une valeur ajoutée.

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Les deux motocyclettes électriques homologuées par Transport Canada

EVT (168 et 4000)

Vitesse max : 60 km/h

Autonomie : de 30 à 70 km

Temps de charge : 4 heures

Prix : de 3700 à 5000 $

 

 

Photo: La Presse

Vectrix VX-1E

Vitesse max : 80 km/h

Autonomie : de 30 à 50 km

Temps de charge : 5 heures

Prix : non disponible à Montréal

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Scooters populaires

La popularité des scooters ne se dément pas au Québec. Au cours des trois dernières années, quelque 4000 cyclomoteurs se sont ajoutés annuellement sur les routes. On comptait l'an dernier un peu plus de 38 000 scooters dans la province, soit plus du double qu'en 2002, où l'on en dénombrait 18 000. Le côté pratique des mobylettes, mais aussi l'amélioration de leurs performances environnementales ces dernières années leur a permis de devenir un choix intéressant en ville. Si des métropoles comme Paris  et Toronto  l'ont compris, en subventionnant l'achat de scooters ou en offrant des places de stationnement spécifiques, ce n'est pas encore le cas de Montréal.