Le niveau d'endettement des ménages est l'une des grandes préoccupations des économistes. Mois après mois, des bulletins répètent que l'endettement atteint des sommets, ce qui menace la santé de l'économie (et des familles), surtout à l'aube d'une récession.

Or, deux études de Statistique Canada viennent significativement nuancer ce constat. Personnellement, dois-je dire, je suis allergique à l'endettement, surtout s'il est relié à des biens de consommation courante (téléviseurs, laveuses-sécheuses, voyages, automobiles). Je préfère économiser chaque mois avant d'acheter plutôt que d'acheter et de faire des paiements mensuels par la suite.

Cela dit, l'endettement des ménages ne serait pas aussi important qu'on le dit, selon ce qui ressort d'une première étude de Statistique Canada. Le ratio d'endettement serait même en décroissance au Canada !

La mesure universellement utilisée pour mesurer l'endettement des ménages est le cumul de leurs dettes divisé par leurs revenus annuels après impôts. Et à ce chapitre, c'est vrai, le ratio d'endettement a crû très rapidement ces dernières années. Il est passé de 105 % des revenus disponibles en 2000 à environ 155 % en 2010 et à près de 175 % aujourd'hui. Wow !

Le hic, c'est que cet endettement s'est principalement fait avec l'achat d'une maison et que la valeur des maisons depuis 20 ans a explosé (avec des taux d'intérêt en baisse). Ainsi, en comparant plutôt la dette sur l'actif total des ménages, le portrait de l'endettement change considérablement.

Ce ratio d'endettement moyen des Canadiens est ainsi passé de 14 % de l'actif en 2000 à environ 19 % en 2010, mais il est en recul marqué depuis 10 ans, atteignant environ 16,5 % aujourd'hui. En moyenne, les emprunts hypothécaires représentent environ 80 % de la dette des ménages canadiens.

Autre élément intéressant de l'étude : l'écart important de l'endettement entre les régions et les niveaux de revenus. Ainsi, les ménages pauvres de la région de Montréal, soit ceux du premier quintile de revenus, ont une dette qui équivaut à 105 % de leurs revenus annuels, ce qui est quatre fois moindre qu'à Toronto ou Vancouver (plus de 400 %). Cet écart est un des éléments qui expliquent pourquoi la part des ménages sous le « seuil de pauvreté » est significativement moindre ici qu'ailleurs.

Tous niveaux de revenus confondus, ce ratio d'endettement des ménages est moindre à Québec (131 % des revenus) et Montréal (154 %) qu'à Toronto (210 %) ou Vancouver (230 %), en raison du prix moins élevé des maisons.

Par ailleurs, l'endettement moindre des ménages québécois s'explique non seulement par la valeur plus faible des maisons (qui exige une moins grande hypothèque), mais aussi par la proportion moins élevée de propriétaires.

Dans la région de Montréal, la valeur médiane des résidences était de 300 000 $ en 2016, contre 700 000 $ à Toronto et 850 000 $ à Vancouver. Et le taux de propriété était d'environ 50 % à Montréal, contre 58 % à Toronto et 55 % à Vancouver.

Le corollaire de ces données, c'est que la richesse relative des ménages québécois est nettement plus basse qu'à l'ouest de la rivière des Outaouais. Et l'écart s'accroît avec le temps, malheureusement.

Les familles médianes de Montréal avaient une valeur nette de 170 000 $ en 2016 (actifs moins dettes). Ce niveau de richesse est 2,3 fois moindre qu'à Toronto ou Vancouver. Étonnamment, les résidants de Québec seraient en bien meilleure posture que ceux de Montréal, selon l'étude (335 000 $ de valeur nette médiane).

Depuis 17 ans, les ménages montréalais se sont enrichis de 78 000 $, contre 200 000 $ à Toronto et 283 000 $ à Vancouver, selon Statistique Canada.

Enfin, hier, Statistique Canada a publié une autre étude éclairante sur le sujet, cette fois sur l'endettement et la richesse des personnes âgées.

Il en ressort que les personnes endettées de 65 ans et plus ont vu leur dette presque tripler entre 1999 et 2016, une fois l'inflation retranchée (en dollars constants). Cette dette est passée en moyenne de 9000 $ à 25 000 $ (voir notre texte à ce sujet à l'écran 8).

En revanche, la valeur de leur actif, principalement la maison, a aussi beaucoup augmenté, si bien que leur richesse relative est bien plus grande. Plus précisément, la valeur nette des personnes endettées de 65 ans et plus était de 537 400 $ en 2016 au Canada, soit une hausse de 238 500 $ par rapport à 1999 (en dollars constants).

Malheureusement, cette augmentation de la richesse des aînés est bien plus faible au Québec (+ 105 600 $ depuis 1999) que partout ailleurs (+ 238 500 $), y compris les provinces atlantiques (+ 177 000 $).