Il n'y avait là ni caméras de télévision ni paparazzi. Pourtant, les gagnants de ce gala boudé par les médias ont autant de mérite que les musiciens, les humoristes ou les comédiens. Même le premier ministre Philippe Couillard et le maire Denis Coderre y étaient présents.

Je parle du Grand Prix de l'entrepreneur EY, qui a eu lieu le 22 octobre. Ce gala récompense les entrepreneurs les plus méritoires dans des catégories aussi diverses que la fabrication, les médias, la construction ou les technologies vertes, entre autres.

Quand on sait à quel point le Québec doit compter sur les succès en affaires pour alimenter sa croissance économique et ses mesures sociales, il faut rendre hommage à ces bâtisseurs.

«Pour redresser le Québec, il faut s'enlever du chemin des entrepreneurs», a dit Philippe Couillard dans son discours. Compte tenu de la paperasse gouvernementale à remplir, dit-il, il faut environ 35 jours à un entrepreneur pour se lancer en affaires au Québec, contre 10 en Ontario, un écart qu'il veut réduire.

Le premier ministre a rappelé que le Québec ne crée plus autant d'entreprises qu'ailleurs, que la productivité croît faiblement et que le taux de chômage des immigrants est très élevé, même chez les francophones. Bref, bien des défis en perspective!

Le grand gagnant de la soirée s'appelle François-Xavier Souvay, patron de l'entreprise Lumenpulse. En quelques années, Lumenpulse est devenue l'un des leaders mondiaux de l'éclairage DEL. L'entreprise de Montréal fabrique et commercialise 300 produits, prisés des architectes. Elle compte environ 450 employés et des bureaux à Boston, Londres et Singapour, entre autres. Lumenpulse est inscrite en Bourse depuis le printemps 2014.

Parmi les gagnants des diverses catégories, mentionnons les dirigeants des entreprises Flatbook, Mirego, WatchMojo.com, Hatley, Groupe Atis, Aéro Mag 2000, Chocolats favoris, Logisco et ESI Technologies.

Fait à souligner, en cette ère de la parité, il n'y avait aucune femme parmi les finalistes, un reflet du nombre encore très restreint de femmes entrepreneurs dans le secteur privé. Où êtes-vous, les femmes?

Cette année, une mention spéciale a été décernée à une famille qui en est à la septième génération en affaires, les Molson. L'entreprise brassicole Molson a vu le jour en 1786, il y a plus de 228 ans. Depuis, la famille Molson rayonne dans la communauté d'affaires montréalaise, et bien des projets n'auraient pu voir le jour sans sa contribution (hôpitaux, musées, écoles de commerce, etc.).

Les organisateurs ont présenté un montage vidéo où Lucien Bouchard, Jean Coutu, Pierre Boivin, Luc Bertrand et David McAusland se sont dits fiers d'honorer les Molson, notamment Andrew et Geoff Molson. Il a bien sûr été question du Canadien de Montréal, que la famille Molson a racheté avec des partenaires.

En réplique, dans un discours presque entièrement en français, les deux frères Molson ont rappelé les valeurs qui ont valu le succès et l'estime de la famille: l'humilité, l'intégrité, l'ardeur au travail, le respect d'autrui ainsi que... la bière et le hockey.

Le départ de Beaudoin réclamé

Deux professeurs émérites de HEC Montréal jugent que le gouvernement du Québec n'a pas été suffisamment exigeant dans ses négociations avec Bombardier. Et ils réclament que l'entreprise se dote d'un nouveau président du conseil d'administration pour remplacer Pierre Beaudoin.

«Si on veut se dire les vraies affaires, la négociation a été bâclée», affirment Jacques Bourgeois et Francine Séguin, qui ont été professeurs respectivement de finance et de gestion à HEC Montréal.

Ils estiment que le risque d'investir uniquement dans la société en commandite C Series est «beaucoup trop grand», puisque le développement et la commercialisation de l'avion exigeront encore 2,0 milliards de dollars, sans compter que 600 appareils doivent être vendus pour atteindre le seuil de rentabilité, alors que seulement 243 commandes ont été signées.

Selon eux, le gouvernement aurait dû investir son milliard de dollars dans le capital-actions ordinaire de la société mère. Surtout, ils jugent qu'en contrepartie de ces fonds, le gouvernement du Québec aurait dû exiger des postes au conseil d'administration et le remplacement du président du conseil, Pierre Beaudoin.

Enfin, ils auraient réclamé que les détenteurs d'actions à vote multiple (la famille Bombardier-Beaudoin) «ne puissent exercer leur plein vote que dans quelques circonstances exceptionnelles», comme une offre publique d'achat jugée hostile.

Ouf! Leurs demandes sont musclées. À défaut d'avoir été négociées par le gouvernement du Québec, peut-être peuvent-elles servir d'inspiration aux dirigeants de la Caisse de dépôt et placement, qui se préparerait à intervenir dans Bombardier de façon «créative».