Savez-vous que, depuis le 1er avril, il y a une mesure appelée «Google Tax» contre l'évitement fiscal? Bon d'accord, elle n'est pas en vigueur au Canada, mais elle se répand vite et risque d'avoir des répercussions ici.

La «Google Tax» est imposée au Royaume-Uni, où certaines multinationales américaines ont été critiquées parce qu'elles y font de juteuses affaires sans déclarer de profits. Elle s'appelle plus précisément la «Diverted Profit Tax».

Des exemples d'abus dénoncés? Certaines entreprises comme Google facturent à leurs clients anglais des services offerts depuis l'Irlande, où les taux d'imposition sont très faibles. Google évite donc des impôts anglais.

D'autres entreprises, comme Starbucks, minimisent leurs profits au Royaume-Uni en facturant à leur filiale anglaise de coûteux services rendus dans des juridictions où le taux d'imposition est très faible. Tout est légal, mais contestable.

Désormais, le Royaume-Uni imposera ces entreprises avec un taux de 25% pour les profits jugés détournés. Si ces entreprises intégraient ces revenus dans une filiale anglaise, les profits seraient plutôt imposés au taux usuel de 20%. Seules sont visées les entreprises déclarant plus de 10 millions de livres (18 millions de dollars canadiens).

Londres espère ainsi récolter 3 milliards de livres sur cinq ans (5,6 milliards CAN). Et l'Australie a annoncé qu'elle songe à suivre l'exemple anglais.

Comment la «Google Tax» pourrait-elle affecter le Canada et les autres pays? La mesure risque de pervertir les conventions fiscales bilatérales, en vertu desquelles les profits sont imposés en fonction de la présence d'un établissement permanent, d'une part, et non imposés deux fois, d'autre part.

«Une entreprise internet installée au Canada qui vend au Royaume-Uni sans y avoir d'employés ni d'adresse devra-t-elle payer des impôts deux fois sur les mêmes profits, soit au Canada et au Royaume-Uni?», s'interroge Éric Labelle, fiscaliste pour PwC.

La plupart des pays de l'OCDE préfèrent une approche multilatérale plutôt qu'unilatérale au problème complexe de détournement de profits. À la mi-mars, justement, les responsables des principaux pays se sont à nouveau réunis, à Paris, pour trouver des solutions globales au phénomène d'érosion de la base d'imposition et au transfert des bénéfices (acronyme BEPS en anglais). L'OCDE planche sur un projet pour l'automne sur certains aspects du problème, auquel adhérerait le Royaume-Uni.

La «Google Tax» est imparfaite, mais elle aura au moins l'avantage de mettre de la pression pour endiguer le phénomène. Et elle envoie un signal clair aux multinationales: la créativité fiscale internationale a ses limites.

Choisir son médecin en Alberta

Ma récente comparaison des compressions en Alberta et au Québec m'a valu quelques commentaires, dont une lettre fort intéressante de Geneviève Groulx, une Québécoise vivant à Calgary. Jugez-en par vous-mêmes:

«J'ai été expatriée au Royaume-Uni pendant quelques années. À mon retour au Québec, en 2010, je ne peux compter le nombre d'heures de travail manquées afin de m'occuper de la paperasse (RAMQ, permis de conduire, etc.). Pas très loin des 12 travaux d'Astérix. À mon arrivée à Calgary, j'ai pu obtenir ma «Health Card», mon permis de conduire et mes immatriculations en 30 minutes à un seul endroit. Oui, il y a des frais pour le service [environ 50$ pour tout ça], mais aucune heure de travail manquée... Faites le calcul.

«À mon départ du Québec pour l'Alberta, en 2012, je n'avais toujours pas de médecin de famille. Ici, on peut même le choisir. Une liste de médecins acceptant de nouveaux patients est disponible en ligne. On trouve un médecin en entrant notre code postal et hop, voici la liste dans un rayon de 10 km. D'autres critères de sélection sont aussi disponibles: genre, langues parlées, etc. On peut même avoir une rencontre «Meet&Greet» avant de choisir ce médecin (comme une entrevue) afin de s'assurer de la bonne compatibilité.

«Est-ce que les gens sont moins pauvres? Peut-être, mais il y a de la pauvreté aussi. Des familles qui n'arrivent pas à joindre les deux bouts, il y en a, mais c'est beaucoup moins visible. La différence est l'implication de la communauté, du secteur privé et des fondations afin de créer ce filet de protection pour les plus démunis.

«Vous avez raison de dire que les Albertains sont en général plus sensibles à une hausse des impôts et taxes, mais je trouve qu'ils sont beaucoup plus généreux avec les dons de charité (en argent et aussi en temps). Des fois, j'ai un peu l'impression qu'au Québec, on ne se sent pas interpellé individuellement par les besoins des plus démunis et qu'on s'attend à ce que ça soit pris en charge par l'État. On s'offusque collectivement, mais on ne fait pas grand-chose individuellement.

«Oui, les garderies sont chères, mais des subventions très généreuses existent pour les familles ayant un revenu plus faible. Les crédits d'impôt personnel de base sont aussi plus élevés ici (17 787$ contre 11 305$ au Québec).

«Est-ce parfait? Loin de là. Mais j'ai le sentiment que la population va se serrer la ceinture et veiller à garder la productivité élevée en ces temps difficiles. Les soubresauts du pétrole ne sont pas nouveaux et comme les gens disent ici, «This is not our first rodeo!» »