En septembre, il s'est créé 12 100 emplois dans l'ensemble du Canada. Pendant la même période, il s'en est créé 11 100 au Québec.

Si on regarde ces chiffres rapidement, on pourrait avoir l'impression que la quasi-totalité des emplois créés d'un océan à l'autre l'a été au Québec. Ce n'est pas comme ça que ça se passe. Certaines provinces en ont perdu beaucoup, comme l'Ontario - 34 000 -, d'autres en ont gagné, comme l'Alberta. Mais disons que cet ajout de 11 100 postes constitue un signal positif dans une période où on a beaucoup parlé de la récession observée au Canada.

Je tiens à parler de ces chiffres parce qu'à mon avis, les données sur le marché du travail, l'emploi et le chômage représentent les statistiques économiques les plus importantes. D'abord, parce qu'elles donnent une idée fidèle de l'état de santé d'une économie. Depuis des décennies, j'ai pu voir qu'elles étaient le meilleur baromètre des grands cycles, les récessions ou les reprises. 

Les données sur le marché du travail, l'emploi et le chômage parlent de vraies affaires, qui touchent les gens : le travail, le revenu et la sécurité.

La plus récente enquête sur la population active de Statistique Canada nous dit qu'au Québec, il y a un progrès, quoique modeste, peu importe la mesure que l'on choisit.

La façon la plus simple de regarder les choses, c'est de comparer les résultats de septembre à ce qui se passait il y a un an, en septembre 2014. Le nombre d'emplois est passé de 4 059 600 à 4 106 300, un gain de 46 700 emplois. Avec cette approche, il y a un toutefois un défaut, le fait que parfois, le gain d'une année à l'autre dépend moins du succès de l'année en cours que de la faiblesse de l'année antérieure.

Pour atténuer ce risque, on peut comparer l'emploi moyen des neuf premiers mois de cette année à la même période de l'an dernier, une méthode qui permet de lisser les mouvements temporaires. Ce calcul donne à peu près les mêmes résultats : un gain de 40 900 par rapport à 2014.

On peut enfin regarder comment l'emploi a évolué au fil des mois. Il y avait 45 200 emplois de plus en septembre qu'en décembre dernier. Ça s'est toutefois fait en dents de scie. On a assisté à une forte création d'emplois, 49 800 durant les quatre premiers mois de l'année, suivie d'une chute brutale de 35 800 les deux mois suivants, qui a annulé une bonne partie des gains, et enfin d'une remontée jusqu'en septembre qui nous ramène à 2 500 emplois du sommet d'avril.

On se demandait à l'époque si ces mouvements marqués pouvaient être attribuables aux défauts de l'enquête de Statistique Canada, qui repose sur un sondage. Les données mensuelles sont parfois capricieuses, surtout au provincial, assez pour qu'il soit imprudent de sauter aux conclusions, comme le font souvent les politiciens, sur la foi des données d'un seul mois. Il est plus prudent d'attendre quelques mois pour voir s'il se dégage une tendance.

Mais rétrospectivement, on peut dire que la chute des emplois en mai et juin reflète l'impact sur le Québec de la brève et légère récession que le Canada a connue.

Qu'est ce qu'on peut conclure de tout ça ? D'abord, que le Québec a bien surmonté le choc provoqué par la récession canadienne et les conséquences de la chute des prix du pétrole. Ensuite, que la dynamique de hausse de l'emploi semble bien installée. Et que cela peut avoir des incidences budgétaires. La croissance économique, selon les prévisions des maisons spécialisées, sera un peu plus faible que prévu cette année, ce qui donnera quelque chose d'assez anémique. Mais si l'emploi est en progrès, cela se reflètera positivement sur les revenus fiscaux.

Mais il ne faut pas regarder que les arbres, il faut aussi regarder la forêt. Le Québec, comme le Canada, ne s'est pas complètement remis de la grande crise de 2009. Les emplois perdus ont été retrouvés, le taux de chômage a baissé, mais une autre mesure, la plus fidèle, nous dit que l'économie n'a pas été capable d'offrir autant d'emplois qu'avant. Cette mesure, c'est le taux d'emploi, soit la proportion des gens en âge de travailler qui détiennent un poste. Avant la crise, à la fin de 2007, le taux d'emploi atteignait 61,5 %. En septembre 2015, comme les mois précédents, ce taux d'emplois n'était que de 59,9 %. Ça a l'air d'une petite différence, mais elle signifie qu'il manque 110 000 emplois pour retrouver la situation d'avant la crise. Il ne faudrait pas l'oublier.