Jean Charest a fait du Plan Nord son cheval de bataille. Il cherche manifestement à ce que ce grand projet définisse son gouvernement et il est assez évident qu'il voudra en faire un enjeu de la prochaine campagne électorale.

Il n'est donc pas étonnant que l'opposition du Parti québécois concentre son tir sur ce grand projet. C'est de bonne guerre dans notre genre de démocratie parlementaire. Et c'est le rôle de l'opposition de mettre en relief les imprécisions du projet - il y en a - et de forcer le débat sur les enjeux que soulève cette forme de développement.

Mais il y a des limites à ne pas franchir. Parce que le Plan Nord est une bonne idée. L'enrobage politique est peut-être trop lourd. On peut ne pas aimer le messager. Mais les efforts pour ouvrir le Nord, encadrer son développement, miser sur son potentiel minier pour contribuer aux mieux-être des Québécois, constituent un projet porteur qui doit être soutenu et encouragé.

Quand les critiques à l'égard du gouvernement contribuent à discréditer ce projet, à compromettre sa réalisation, à miner les appuis dont il a besoin, le jeu partisan devient une forme de sabotage économique et politique qui nuit aux intérêts du Québec.

Cette limite, Pauline Marois l'a franchie plus d'une fois dans ce dossier avec des attaques qui, à mon avis, caractérisent ce qui est devenu sa marque de commerce, une pointe d'hystérie et un manque de jugement dans la critique. Les attaques sont si violentes, si radicales qu'on se demande ce que ferait le Parti québécois s'il prenait le pouvoir.

Cette semaine, dans une autre attaque à l'emporte-pièce, Mme Marois a accusé le gouvernement d'avoir accordé d'importants rabais d'électricité à une société minière, Adriana Resources, qui équivaudraient à une subvention de 100 millions.

Ce n'était pas vrai. Le chiffre de 3,6 cents le kilowattheure brandi par le PQ n'était qu'une hypothèse de la société, dont le projet est très loin de la réalisation. Hydro n'a pas l'intention de consentir de rabais, le gouvernement Charest a répété qu'il n'y aurait pas de rabais d'électricité pour les minières du Plan Nord. L'opposition officielle, qui dispose d'un service de recherche, aurait pu faire quelques téléphones.

Mme Marois marquera sans doute des points, parce que les attaques, même fausses, ont plus d'impact que les réponses. Mais le résultat, c'est qu'elle nourrit les préjugés et qu'elle mine le climat. Quand on sait à quel point ces courants d'opposition peuvent compromettre des projets, même bons, elle contribue à rendre le développement difficile, sinon impossible.

Les débats sur les grands projets sont légitimes et nécessaires. Mais, sur le gaz de schiste, ou sur le Plan Nord, il doit y avoir une différence entre les élans des groupes militants et les prises de position d'un parti qui s'apprête à diriger le Québec. La demande de moratoire du PQ sur le gaz de schiste, quand il y a un mécanisme d'évaluation, est inutile. Sa proposition de doubler les redevances minières, sans justification fouillée, est puérile.

Et dans chaque cas, le PQ joue sur les mêmes thèmes anti-capitalistes primaires, que l'on brade nos ressources, au profit de méchantes minières, de surcroît étrangères, qui se préparent à nous exploiter. Ça peut aller dans la bouche de Amir Khadir. Mais on s'attendrait à plus de retenue de la part de Mme Marois.

Oui, il faut être vigilants. Mais il faut aussi se souvenir que le Québec a besoin d'investissements, d'emplois, de revenus fiscaux s'il veut maintenir sa qualité de vie et la pérennité de ses services publics. C'est ça que le PQ de Mme Marois compromet en jouant le jeu de ceux qui ont érigé le moratoire en religion.