En 2003, le gouvernement fédéral, alors libéral, a signé une entente historique avec les provinces, en assurant à celles-ci un financement de 41,3 milliards de dollars sur une période de 10 ans, pour résoudre un certain nombre de problèmes du système de santé, comme les temps d'attente, l'accès à des soins en tout temps, le développement du dossier électronique, les soins à domicile.

En 2003, le gouvernement fédéral, alors libéral, a signé une entente historique avec les provinces, en assurant à celles-ci un financement de 41,3 milliards de dollars sur une période de 10 ans, pour résoudre un certain nombre de problèmes du système de santé, comme les temps d'attente, l'accès à des soins en tout temps, le développement du dossier électronique, les soins à domicile.

Ce plan décennal a été enclenché en 2004. Eh bien, sept ans plus tard, malgré des dépenses d'environ 30 milliards, les résultats sont mitigés, selon un rapport d'étape publié hier par le Conseil canadien de la santé, un organisme mis sur pied par les premiers ministres des provinces pour faire le suivi de la réforme.

Il y a eu des progrès, mais ils ne sont pas à la hauteur des espérances et ils n'ont pas permis aux provinces d'atteindre les objectifs qu'ils s'étaient fixés. Il y a eu réduction des attentes pour une courte liste de chirurgies, mais la situation s'est empirée ailleurs, tant et si bien que le Conseil estime que «la réponse n'est pas claire». Il y a eu des progrès dans l'informatisation, mais pas dans le dossier patient. On fait du sur-place pour les politiques de médicaments.

Une partie de l'insatisfaction que suscite ce bilan tient au fait que la santé sera toujours un trou sans fond, en ce sens que nos besoins sont pratiquement infinis. Peu importe les efforts, nous ne serons probablement jamais satisfaits.

Mais ce qui est beaucoup plus inquiétant, c'est la disproportion entre les ressources que l'on consacre à la santé et les résultats que l'on obtient. On injecte des milliards et des milliards. On accepte que la croissance annuelle de ces dépenses soit bien au-delà de l'inflation. Et les services, au bout de la ligne, n'augmentent pas de façon perceptible, les problèmes ne sont pas résolus. On met de l'argent, et il ne se passe presque rien.

Cette anomalie s'explique en partie par la complexité des enjeux, mais aussi par la lourdeur des systèmes. Pour réaliser des progrès mesurables, il faut apprendre à faire les choses autrement. Augmenter le financement dans un système figé, c'est un peu comme espérer vaincre l'obésité avec une liposuccion sans changer son mode de vie et ses habitudes alimentaires.  

Nos systèmes sont obèses, dans les autres provinces tout autant qu'au Québec, étouffés par leurs structures, les corporatismes, ce qui se double au Canada par une rigidité nourrie par la peur que les réformes remettent en question les grands principes qui sous-tendent le système. Cette peur atavique du changement nous empêche d'introduire des éléments de concurrence, de repenser la façon dont on alloue les ressources, d'ouvrir la porte au privé, mais surtout, de mettre le système au service du patient.

La façon dont s'articule le fédéralisme en santé n'aide pas. Les provinces se battent pour que le gouvernement fédéral paie le plus possible et s'implique le moins possible. Cela engendre un effet pervers en déresponsabilisant les provinces, parce que ce financement fédéral leur permet d'augmenter leurs dépenses en santé et à remettre à plus tard les réformes qui s'imposent.

C'est encore plus net au Québec, qui ne participe pas à ce Conseil canadien de la santé, pour exprimer ainsi sa pleine juridiction en santé, mais qui se prive du même coup des outils d'analyse et de comparaison qui le confronteraient.

Comment s'en sort-on? En commençant par admettre qu'il y a un problème. Constater qu'il est insoluble dans l'état actuel des choses. Reconnaître qu'il empirera avec le temps et qu'il nous mènera à l'impasse. À moins qu'on accepte de changer.