L'Ordre des pharmaciens a relancé récemment l'idée de permettre aux pharmaciens de faire des tâches qui actuellement sont réservées aux médecins, comme renouveler des prescriptions, les ajuster, administrer des médicaments et faire des prescriptions pour des problèmes bénins: feux sauvages, infections urinaires, otites du nageur.

L'Ordre des pharmaciens a relancé récemment l'idée de permettre aux pharmaciens de faire des tâches qui actuellement sont réservées aux médecins, comme renouveler des prescriptions, les ajuster, administrer des médicaments et faire des prescriptions pour des problèmes bénins: feux sauvages, infections urinaires, otites du nageur.

Ce n'était pas une surprise. Les pharmaciens en parlaient il y a un an. Le PQ a défendu l'idée. J'ai même écrit trois textes là dessus. Les neuf autres provinces ont déjà élargi les responsabilités de leurs pharmaciens, pour réduire les pressions les médecins débordés.

Mais au Québec, l'élargissement du rôle des pharmaciens sera un parcours lent et tortueux dont l'issue est encore incertaine. Voilà une autre illustration de la lourdeur de notre système, victime, dans ce dossier-ci, du corporatisme, de l'inertie gouvernementale, de l'isolationnisme myope et, comme toujours, du mépris du patient.

Commençons par ce qui, dans ce dossier, est le plus désolant, la guerre des fiefs. Il y a quelques mois, les médecins spécialistes sont partis en guerre contre les généralistes. Cette fois-ci, ce sont les omnipraticiens qui partent en guerre contre les pharmaciens. Le président de la Fédération des médecins omnipraticiens, Louis Godin, n'a pas applaudi à cette initiative, comme il aurait dû. «Il faut être prudent», a-t-il dit, parlant d'un «gros problème».

Des craintes qui cachent mal le jupon syndical et le mépris des médecins pour d'autres professionnels de la santé dont on n'utilise pas assez les talents. Surtout quand il affirme ne pas voir en quoi cela pourrait désengorger le système, quand on sait pertinemment qu'une telle mesure éviterait des centaines de milliers de visites chez le médecin ou à l'urgence.

Le deuxième bobo, c'est l'inertie gouvernementale. Le ministre Yves Bolduc promet de s'en occuper. «Je me suis entretenu avec le Dr Charles Bernard du Collège des médecins. On s'est entendu, et on va en parler avec l'Ordre des pharmaciens, de former un comité rapidement pour qu'au cours des prochaines six semaines, ils vont remettre un rapport de façon à ce que des tâches puissent être données aux pharmaciens», a-t-il affirmé à l'Assemblée nationale. «On devrait rapidement procéder à cela. Et par la suite, (là) où il n'y a pas consensus, on devrait s'entendre pour discuter et trouver une solution.»

Bref, Québec semble partir à zéro, quand l'idée circule depuis longtemps et qu'on sait qu'il faut, par tous les moyens, atténuer les effets de la pénurie de médecins omnipraticiens. Il y a du monde qui dort sur la switch quelque part. Et encore une fois, le ministre montre à quel point il semble figé quand on le sort de la gestion pour le confronter à des changements structurels.

Ce à quoi s'ajoute l'isolationnisme. Les neuf autres provinces ont bougé. Les questions que soulève cette réforme ont déjà été débattues et analysées dans des systèmes de santé très proches du nôtre. Pourquoi ne pas s'inspirer de cette réflexion, au lieu de réinventer la roue?

Enfin, on bougerait peut-être plus vite si on tenait davantage compte de l'intérêt des patients. Dans chaque initiative qui touche à la santé, on devrait commencer par se demander si c'est bon pour les gens. Il est évident que le fait de régler des problèmes simples en quelques minutes avec le pharmacien du quartier au lieu d'attendre des heures dans une urgence ou une clinique sans rendez-vous améliorerait considérablement la qualité de vie des gens. Il faut mettre ça dans la balance.

Si le Québec prend du retard dans un dossier aussi simple, il ne faut pas s'étonner du fait qu'il cafouille dans un dossier complexe comme l'informatisation du réseau de la santé.