Lors du congrès national du Parti québécois, Gilles Duceppe et Pauline Marois ont établi un lien direct entre une victoire du Bloc québécois aux élections fédérales, qui semblait alors acquise, la victoire à venir du PQ au provincial, et ensuite une victoire référendaire. La marche vers la souveraineté reposait ainsi sur une espèce de crescendo en trois temps.

Lors du congrès national du Parti québécois, Gilles Duceppe et Pauline Marois ont établi un lien direct entre une victoire du Bloc québécois aux élections fédérales, qui semblait alors acquise, la victoire à venir du PQ au provincial, et ensuite une victoire référendaire. La marche vers la souveraineté reposait ainsi sur une espèce de crescendo en trois temps.

Si une victoire du Bloc québécois devait servir de tremplin et de levier à la souveraineté, il n'est ni impoli, ni incorrect de souligner que cette logique joue dans les deux sens. L'échec cuisant du Bloc québécois aux élections de lundi, qui perd 45 de ses 49 sièges, qui voit ses appuis fondre de 38,1% à 23,4%, constitue une véritable catastrophe pour la souveraineté.

Le mouvement souverainiste n'est évidemment pas mort. Il peut compter sur l'appui de 40% des Québécois. Ce n'est pas assez pour permettre une victoire de la souveraineté, et rien n'indique que cela changera un jour. Mais les résultats de lundi nous permettent d'aller plus loin. Ils montrent qu'on se méprend sur la nature du soutien à la souveraineté.

Près de 40% des Québécois se disent souverainistes parce qu'ils le sont dans leur coeur. Mais bon nombre d'entre eux ne veulent pas faire la souveraineté, n'y croient pas, ne veulent en entendre parler, ne veulent pas de référendum. Et quand on les matraque avec un discours souverainiste enflammé, ça rentre par une oreille et ça sort par l'autre. C'est ainsi que bien des électeurs souverainistes n'ont pas écouté Jacques Parizeau ou Pauline Marois et ont voté pour un parti fédéraliste.

L'appui massif du Québec au NPD, qui passe de 12,2% en 2008 à 43%, nous dit autre chose. Si la moitié de ces gains spectaculaires provient des électeurs bloquistes, l'autre moitié provient d'électeurs fédéralistes, libéraux ou conservateurs.

Dans cette rencontre entre souverainistes et fédéralistes, émotive et aberrante à plusieurs égards, les Québécois n'ont pas appuyé le programme du NPD, qu'ils ne connaissent pas, ils n'ont pas viré à gauche, ils n'ont manifestement pas été séduits par la qualité des candidats, puisqu'ils ont envoyé une armée de poteaux à Ottawa.

En choisissant en masse le NPD, les Québécois ont plutôt voté de façon tribale. Ils ont misé sur le parti qui, à leur avis, servirait le mieux le Québec. Cet appui au NPD s'inscrit dans une logique nationaliste, autonomiste même, que l'on voit à la façon dont les Québécois, tournés sur eux-mêmes, sont indifférents à l'impact de leur choix sur le reste du pays et se contentent de s'installer dans l'opposition.

Il y a là un pattern. Les Québécois ont appuyé Pierre Elliott Trudeau en masse, parce que c'était un Québécois. Ils ont basculé en masse pour les conservateurs de Brian Mulroney, un petit gars du coin. Ils ont ensuite voté en masse pour le Bloc québécois. Ils ont maintenant remplacé le Bloc en masse pour le NPD. Et si Michael Ignatieff a moins bien fait que Stéphane Dion au Québec, 13,9% contre 23,7%, c'est probablement, hélas, parce qu'il n'est pas Québécois.

Reste à savoir ce qu'ils ont trouvé de québécois chez Jack Layton et son parti. Son français familier? Ses origines montréalaises? Les ouvertures du NPD au Québec sur la langue, la nation, les promesses de réformes constitutionnelles?

Mais il ne faudrait pas faire l'erreur de confondre ce sentiment nationaliste avec un appui potentiel à la souveraineté. Le vote de lundi s'inscrit dans un autre pattern, où bien des Québécois tentent par tous les moyens de s'extraire du débat constitutionnel dont ils sont prisonniers depuis 40 ans. Cela a donné l'ADQ, le succès instantané de François Legault, et maintenant cet appui au NPD. Il y a là un message clair.