Pour accueillir les participants du Congrès mondial de l'énergie, dont les travaux ont commencé dimanche à Montréal, des groupes environnementaux québécois ont eu l'idée de poster des gars et des filles en maillot de bain, badigeonnés de mélasse, pour dénoncer les gaz de schiste.

Pour accueillir les participants du Congrès mondial de l'énergie, dont les travaux ont commencé dimanche à Montréal, des groupes environnementaux québécois ont eu l'idée de poster des gars et des filles en maillot de bain, badigeonnés de mélasse, pour dénoncer les gaz de schiste.

La plupart des médias ont plus parlé de cette poignée de militants que des activités des milliers de délégués. Les filles en maillot de bain, ça marche à tout coup, dans les causes militantes comme dans la vente de voitures - car les médias, faut-il s'en étonner, ont davantage braqué leurs objectifs sur les militantes que sur les militants.

Pourquoi parler de cet incident ? Parce qu'il illustre bien ce qui rend les débats énergétiques si difficiles : le fléau du simplisme. Le simplisme militant. Le simplisme encouragé par la culture de spectacle du monde médiatique. Et la résultante, la version politique du simplisme, le populisme, qui mène à la recherche de solutions simples et attrayantes.

C'est un problème parce que les enjeux énergétiques, et leur interaction avec les enjeux environnementaux, sont d'une effroyable complexité. Quand les problèmes sont complexes, les débats publics devraient refléter cette complexité, les solutions aussi.

Quels sont ces enjeux ? D'abord, une projection terrifiante, qui est au coeur des échanges de ce congrès mondial. Le fait que la demande mondiale pour l'énergie doublera d'ici 2050, parce que les besoins seront énormes, ceux des pays émergents en forte croissante, et ceux de tous les pays qui, pour l'instant, n'ont pas un accès suffisant. Il faudra donc produire plus, diversifier les sources d'énergie, mais rechercher des sources de plus en plus coûteuses et de plus en plus inaccessibles.

Ensuite, une autre projection, tout aussi terrifiante. Selon le Groupe international d'experts sur le climat, pour limiter les dégâts du réchauffement de la planète, il faudra réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % par rapport à leur niveau de 1990 d'ici 2020, et de 80 % d'ici 2050. Il s'agit d'un effort considérable qui nécessitera à toutes fins pratiques l'abandon des énergies fossiles.

L'atteinte de ces deux grands objectifs, en apparence antinomiques, exigera des transformations profondes de nos sociétés et de nos économies, pour modifier les habitudes de consommation, pour se diriger vers des sources d'énergie renouvelables, pour réduire la demande à travers l'efficacité énergétique. Cela appelle une révolution industrielle, mais aussi une révolution culturelle.

Ce double virage doit passer à travers une course à obstacles - résistances idéologiques, tensions mondiales, la défense de leurs intérêts économiques par les pays et par les industries, contraintes politiciennes, gestion difficile d'horizons temporels très longs, évolution constante de la technologie, pour le meilleur et pour le pire.

À ces problèmes compliqués, il faudra des solutions compliquées. Pas une solution, mais une palette de mesures, locales et globales à la fois, dont la mise en place ne sera pas linéaire.

Juste dans le cas du Québec, on peut voir à quel point il est difficile de comprendre la logique des stratégies énergétiques et environnementales. On comprend tous que les éoliennes ne produisent pas de GES. Mais on est moins à l'aise avec l'augmentation de la production hydroélectrique et des exportations, pour remplacer des énergies fossiles hors du Québec. On comprend mal que le gaz, une énergie fossile, puisse jouer un rôle très utile en remplaçant le pétrole, beaucoup plus nocif. On n'accepte pas l'augmentation des tarifs d'électricité, même si c'est essentiel pour réduire la consommation et favoriser les énergies alternatives.

Tout cela est très compliqué. Et ça ne se résume pas en une photo, même si on dit qu'elles valent 1000 mots.