La mesure la plus visible du plan de relance du gouvernement Charest, un crédit d'impôt à la rénovation immobilière, qui pourrait retourner 250 millions dans les poches des contribuables, a été accueillie avec un certain scepticisme.

Le gouvernement libéral prévoit que 170 000 ménages pourraient profiter de la mesure. Les chefs péquiste, Pauline Marois, et adéquiste, Mario Dumont, qualifient d'irréaliste la cible du gouvernement libéral et doutent qu'autant de gens aient les moyens de faire une telle dépense cette année.

 

Le programme subventionne les travaux de rénovation qui dépassent 7500$. Au-delà de cette somme, les ménages auront droit à un crédit d'impôt de 20%. Par exemple, pour des travaux de 17 500$, ils recevraient 2000$ en crédits remboursables. Avec des travaux de 20 000$, ils toucheraient le maximum, 2500$.

Derrière cette incrédulité se profile une conception tout à fait fausse de la nature des difficultés économiques que nous vivons. Comme si nous étions dans les années 30, quand le chômage atteignait 25% et que la production avait été réduite du tiers.

Il est vrai que le Québec, même s'il résiste mieux à la tourmente que ses voisins, est néanmoins entré en récession, qui sera en principe suivie, plus tard cette année, d'une reprise timide. Une récession, c'est un recul de l'activité économique. En 2009, selon les prévisions, la production globale sera inférieure d'un demi d'un pour cent à celle de 2008. C'est un choc considérable pour une économie dont la logique repose sur la croissance.

Mais l'activité économique ne disparaît pas pour autant, elle reste presque au même niveau qu'avant. Les gens continuent de manger, de se divertir, de consommer. Par exemple, les mises en chantier baisseront au Québec de 50 000 à 40 000; il y aura quand même 40 000 nouvelles maisons. Les ventes d'auto ont chuté de 7% en novembre; il s'est néanmoins vendu 129 000 véhicules.

Les gens continuent aussi de travailler et de faire de l'argent. On prévoit par exemple une augmentation du chômage de 7,3% à 8,5% au Québec. Cela représente 50 000 chômeurs de plus, 50 000 drames. Mais 91,5% des travailleurs auront toujours un emploi, le plus souvent sans détérioration des conditions de travail. Les Québécois des classes moyennes ont vu leurs épargnes fondre avec l'effondrement des cours boursiers. Les revenus de la plupart des Québécois n'ont pas baissé et ils ont autant les moyens de rénover que l'an dernier.

Les gens ne sont pas pris à la gorge. C'est d'ailleurs pourquoi l'engagement électoral du PQ, un crédit d'impôt pour aider les propriétaires à payer leur hypothèque, était à côté de la plaque.

Ce qui a changé, pour la plupart, c'est l'incertitude, le fait qu'on ne sait pas ce qui va se produire, combien de temps le marasme économique va durer, si on risque de perdre son emploi. C'est ce que mesurent les indices de confiance des consommateurs qui sont fortement en baisse. Et c'est ce qui incite les gens à la prudence, les amène à épargner, à remettre leurs gros projets à plus tard. Ils ne sont pas ruinés, ils ont peur.

Dans ce contexte, un crédit d'impôt qui va peut-être les convaincre de rénover cette année, plutôt que l'an prochain, est justement le genre de mesures qui peut aider à réactiver l'économie.

C'est réaliste, parce que bien des gens ont les moyens de rénover. C'est moral, parce que la rénovation permet d'augmenter la valeur d'un actif. C'est efficace, parce que l'impact peut être rapide, qu'il est réparti dans les régions, et qu'il favorise bien plus les industries locales qu'une baisse d'impôt qui donnerait peut-être le goût d'acheter une télé à écran plat fabriquée en Corée.