À son congrès, le Parti québécois (PQ) s’est donné un plan de match pour les prochaines années qui comprend essentiellement la mise au goût du jour d’initiatives passées, qui n’ont pas toujours eu du succès. Mais, heureusement pour lui, il a aussi découvert ce qui pourrait être un canon.

Au premier rang de ces reprises se trouve le « budget de l’an 1 » du Québec souverain, un exercice que le PQ a déjà essayé au moins deux fois et qui ne lui a jamais rapporté les résultats escomptés.

En fait, en 1973, ce fut une des raisons majeures d’une défaite crève-cœur du PQ alors que Robert Bourassa avait remporté 102 sièges sur 110.

Le problème était que, malgré les talents de pédagogue de Jacques Parizeau, qui avait eu pour tâche d’expliquer la proposition, un budget est toujours un document hautement critiquable parce qu’il constitue un ensemble de choix qui peuvent tous être contestés. À la fin, ça ne rassure personne et ça ne donne que des ennuis.

En 1973, on a beaucoup parlé d’une éventuelle monnaie québécoise – ce qui avait permis aux libéraux d’inonder le Québec de « piastres à Lévesque » qui complétaient à merveille leur campagne de peur.

À l’époque, on avait fait porter – injustement – la responsabilité des mauvais résultats à M. Parizeau. Mais le problème n’était pas le messager, mais le message lui-même. Parce qu’à la fin, le PQ n’a jamais réussi à établir que le Québec recevait moins qu’il ne contribuait en impôts à Ottawa.

En 2005, c’est François Legault qui avait tenté l’expérience d’un budget de l’an 1. Un budget qui aurait affiché un léger surplus. Mais M. Legault lui-même, devenu chef de la Coalition avenir Québec (CAQ), devait répudier ce budget. Entre autres parce que les paiements de péréquation et les autres transferts fédéraux avaient considérablement augmenté.

En fait, on a l’impression que la raison pour laquelle le PQ veut refaire le budget de l’an 1 n’est pas pour des motifs pédagogiques, mais bien plus pour enquiquiner M. Legault.

La deuxième stratégie à laquelle le PQ veut donner un rappel est le Livre blanc sur la souveraineté. Ça aussi, ça a déjà été essayé. Souvent. Il y a eu un livre blanc publié par le gouvernement Lévesque peu avant le référendum de 1980. Il y a eu le rapport de la commission Bélanger-Campeau. Il y a aussi eu nombre de livres écrits par des députés ou des dirigeants du PQ au cours des années.

Le problème d’un livre blanc, c’est qu’il risque de provoquer des tensions au sein même du PQ. Parce que si on définit les contours d’un Québec souverain, il faudra nécessairement parler des relations futures avec le Canada.

Souveraineté-association ? Souveraineté-partenariat ? Union monétaire ? Union douanière ? Marché commun ? Toutes ces questions ont causé des débats sans fin dans l’histoire du PQ et, à quelques mois du référendum de 1995, la question des liens avec le Canada avait failli provoquer une rupture entre Jacques Parizeau et Lucien Bouchard.

Le PQ d’aujourd’hui est plus uni que jamais, comme en fait foi le vote de confiance historique donné à Paul St-Pierre Plamondon. Alors pourquoi risquer de le faire retomber dans ses vieilles chicanes ?

Enfin, dans les mois qui précéderont l’élection, le PQ nous présentera sa troisième grande reprise : une définition de la citoyenneté d’un Québec souverain.

On pourrait croire que c’est un exercice assez simple. Mais chaque fois que le PQ a fait l’exercice, ça s’est terminé dans la controverse. La dernière fois, en 2007, le PQ dans l’opposition, il avait présenté un projet de loi sur l’identité québécoise dans lequel la citoyenneté québécoise deviendrait conditionnelle, entre autres, à une « connaissance appropriée » du français et du Québec. Les immigrants auraient aussi dû signer un « contrat d’intégration » de trois ans.

Le projet de loi a suscité la controverse et est mort au feuilleton sans avoir été débattu. Encore une fois, est-ce à ce genre de débat qui divise que veut nous convier le PQ ?

Mais il y a un sujet sur lequel le PQ peut sortir ses gros canons pour marquer bien des points et c’est une opposition farouche à cette « Initiative du siècle », proposée par des gens d’affaires dont le but est que le Canada atteigne 100 millions d’habitants d’ici 2100.

Le gouvernement Trudeau s’est engagé à court terme en se donnant comme cible d’admettre environ 450 000 immigrants par an d’ici 2026. Mais s’il est facile de recruter des immigrants parlant au moins un peu anglais, demander au Québec de trouver et d’admettre plus de 112 000 immigrants francophones chaque année est carrément illusoire.

Sans même un débat en Chambre, le gouvernement Trudeau vient de s’engager à modifier les équilibres linguistiques fondamentaux du pays. L’effet pourrait être de noyer le poids politique du Québec, un thème qui serait évidemment très porteur pour le PQ.

En fait, ce serait un bon filon pour n’importe quel autre parti politique québécois, et c’est à se demander pourquoi ils ne s’en sont pas encore rendu compte.