Le Parti conservateur du Québec (PCQ) n’est pas, à proprement parler, un nouveau parti. Dans l’ère moderne, il a été fondé en 2009 et a présenté ses premiers candidats à l’élection de 2012. Mais il n’a jamais réussi à obtenir plus de 1,5 % des voix.

Arrive Éric Duhaime et, très rapidement, le parti se retrouve à plus de 10 % des voix dans les sondages — et à l’élection partielle de Marie-Victorin. On lui accorde un siège aux débats des chefs et il n’est plus, soudain, relégué au rang des partis marginaux comme le Parti vert, le NPD-Québec ou les marxistes-léninistes.

Évidemment, ce n’est pas la simple arrivée de M. Duhaime à la tête du parti — tout talentueux qu’il soit — qui aurait pu changer la donne à ce point. C’est aussi et surtout le fait que le parti est devenu le véhicule politique de ceux qui s’opposaient aux mesures sanitaires les plus contraignantes comme le port du masque ou l’obligation du passeport vaccinal.

Ce n’est donc pas étonnant que le PCQ soit plus populaire dans la région de Québec, là où ces mesures ont été les moins populaires et ont été constamment dénoncées par les radios locales.

Même si la pandémie n’est pas complètement disparue du décor — et pourrait toujours reprendre vie — il reste peu probable qu’elle exige l’imposition d’un nouveau confinement ou de mesures très contraignantes.

Pourtant, quand on lit la plateforme conservatrice, on donne encore une grande place à la pandémie. Par exemple, on exige un contrôle strict de l’état d’urgence sanitaire, qui ne pourrait être prolongé que par un vote de 80 % des députés.

« Lors de la crise sanitaire, les Québécois ont été dépossédés de leurs droits civiques et de leurs libertés individuelles… Jamais plus une telle dérive liberticide et autoritaire ne doit survenir au Québec », avertit la plateforme conservatrice sur le ton qu’on réserve normalement pour les dictatures militaires.

« Il faut se débarrasser de ceux qui ont piétiné nos droits et nos libertés », répétait M. Duhaime, dimanche, devant une belle foule pour son lancement de campagne.

Ce n’est pas pour rien que le chef conservateur veut garder vivants les tristes souvenirs de la pandémie. C’est parce que, sur les autres sujets, la plateforme conservatrice est finalement assez banale et, surtout, sans beaucoup d’idées innovantes.

On y reprend beaucoup de mesures proposées, puis abandonnées, par d’autres partis au cours des deux dernières décennies et qui ont rarement bien vieilli.

Ainsi, on ressort encore une fois l’idée d’augmenter la place du privé en santé — y compris le droit de souscrire à un régime d’assurance privé même pour les soins couverts par le régime public. Difficile d’être plus « à deux vitesses » que cela, mais c’est tout sauf une idée nouvelle.

Même constat au sujet des garderies, où on reprend l’idée d’un bon de 200 $ par semaine envoyé directement aux parents, « qui pourront alors choisir pour leur enfant le mode de garde qui leur convient le mieux ». À une certaine époque, c’était le programme de l’Action démocratique de Mario Dumont.

Quant aux transports et à l’environnement, rien de nouveau : pour le troisième lien, contre le tramway de Québec. Rendre les transports en commun par bus gratuit — mais seulement dans la région de Québec — et abolir la taxe sur le carbone.

Si le réchauffement climatique vous inquiète, sachez que c’est pour rien, puisque « l’adaptation au changement sera toujours possible, encore plus demain qu’aujourd’hui ». Bref, pourquoi s’en faire puisque les découvertes scientifiques futures feront le travail.

Et bien peu de choses — en fait rien du tout — dans cette plateforme conservatrice sur les questions identitaires et de langue et sur les controversées lois 21 et 96 qui ont pourtant été si présentes dans le débat politique des dernières années. C’est sans doute parce que les positions de M. Duhaime risquent de ne pas être trop populaires.

Pour lui, l’emploi de la disposition de dérogation — ou « nonobstant » — rend ces deux lois contraires aux libertés fondamentales, ce qui est en phase avec son idéologie libertarienne, mais pas tant avec le nationalisme dont il se réclamait plus tôt dans sa carrière, tant au Bloc québécois qu’à l’Action démocratique du Québec.

Aujourd’hui, pour savoir ce qu’il pense de ces questions, il faut se référer à ses entrevues, puisque le programme n’en traite tout simplement pas.

La question qui se pose pour le Parti conservateur, c’est de savoir s’il y aura encore un électorat pour une plateforme qui est essentiellement composée de vieilles recettes et de réchauffé ?

Sinon, on doit s’attendre à ce que M. Duhaime tente d’exploiter un souvenir de la pandémie qui, malheureusement pour lui, s’estompe de plus en plus.

Personne ne souhaite une huitième vague. Mais avec une plateforme électorale aussi peu novatrice, on comprend qu’elle puisse devenir une véritable planche de salut pour le Parti conservateur du Québec.