Retour sur l’image : dernières élections au Québec, 2018. La troisième de François Legault à la tête de la CAQ. Deux défaites au compteur. Une troisième et c’en est fait de sa carrière. Il deviendra un passage à vide dans l’histoire politique du Québec. Un statut de perdant, sa vie durant. Lourd, très lourd !

Il a vénéré Lévesque et Parizeau. Il voulait être dans leurs pas. L’accomplissement passait par là.

Alors pas de farfinages cette fois-ci. On en met plein la gueule avec les promesses et on verra ensuite pour les détails ; les coûts. Ce que le peuple veut, je le veux. La région de Québec est incontournable pour faire la fête ? On pique une idée des radios : le troisième lien. Ah, les radios ! Ce terreau de grandes vérités à Québec.

François s’est engagé, il a gagné et il est pris avec la maudite promesse. Le pire, c’est qu’il l’aurait remporté sans elle.

Depuis, François joue au Lego. Un tube, deux tubes. Six voies, quatre voies. Très à l’est, moins à l’est. Mais le Lego ne sert pas à questionner le pourquoi, plutôt à bâtir le comment. Pas connaître le besoin, mais développer la solution. L’envers du bon sens.

Malgré moi, j’ai eu un petit rôle dans ce film, muet, parce que je n’en ai pas su beaucoup plus que le public.

Délicate, l’affaire. On me les tenait par en dessous avec le tramway. J’ai poussé à bout l’utilisation du verbe tergiverser. J’ai joué l’horloge, comme au hockey. Oui, non, peut-être, la baboune et quoi encore. Mais bonimenteur comme c’est pas possible, je confiais à mes proches que je n’y croyais pas, que le troisième lien ne se ferait pas. Je le pense toujours.

François et sa liste de paye s’immoleront en jurant le contraire. Jusqu’à prétendre, sans rire, qu’ils le creuseront sans l’argent du fédéral. Arrêtez l’image ! On parle, oui, ici d’un pipeline à votes pour octobre prochain, comme aux dernières élections, ne cherchez plus.

Mise en exploitation en 2032 qu’on prétend. Je serai mort ou sur le seuil d’un CHSLD. Dossier d’affaires en 2025 ? Pas à la veille d’autres élections, ça ? Et François n’y sera peut-être même pas pour un troisième mandat en 2026. Bon, l’héritier ramassera le paquet. Grec, le cadeau.

Et s’il revient, aux alentours de 2025-2026, il pourrait nous fredonner un air connu sur le thème des risques et coûts trop élevés, des finances publiques et du « j’voulais mais j’peux pas ». Un classique.

Mais pas payant politiquement, ce scénario. Une séquence plus simple fera glisser la strap.

Le fédéral ne mettra pas un kopeck là-dedans, c’est écrit dans le ciel. Pas de fit avec ses programmes, qui investissent dans le transport en commun. Et on ne rigole pas avec la conformité aux programmes à Ottawa.

Dans la capitale fédérale, on veut aussi y aller avec sa propre évaluation environnementale sur le projet, et on a le droit, ça touche au fleuve. D’expérience, cela pourrait durer des années. Québec contestera la juridiction de cette évaluation, prétextant une autre intrusion du fédéral dans les affaires du Québec. Vous êtes surpris ? Ottawa demandera des études, qui mettront une éternité à venir, etc.

Ottawa ne confirmera pas de financement, du moins pas de mon vivant.

Dans les bureaux du grand chef François à Québec, on le sait trop bien que pour se débarrasser du problème, il doit s’incarner dans une autre grosse crise contre le fédéral, qui doit devenir la piñata du projet. Il faut que ça merde ! Ainsi, nous revivrons un autre « smog » politique pour plusieurs semestres.

À moins que M. Poilievre ne devienne éventuellement premier ministre, et décide de contribuer en cryptomonnaie…

Elle est bien futée, la petite combine politique, mais elle coûtera cher.

Si le projet de tramway à Québec a pris autant de retard, c’est qu’il était assujetti politiquement à l’avancement du projet de troisième lien.

Pas question que sa construction démarre avant d’avoir contenté les partisans du nouveau lien. Un coût additionnel de 100 millions de dollars par année de retard pour le tramway, selon le Vérificateur général de la Ville de Québec. Au moins deux ans de perdus jusqu’ici, un coût additionnel de 200 millions facile déjà là. Un minimum selon mon expérience. Additionnez au tout les 325 millions consentis pour les travaux de planification du bureau de projet du troisième lien, et on dépasse le demi-milliard de huards.

Le plus désolant, c’est que des besoins immémoriaux existent partout au Québec pour faire survivre des réseaux routiers tout en ornières et crevasses, et pour démarrer des projets publics de transport collectif qui trébuchent sans cesse.

Je préférerais quasiment être à côté de mes pompes avec mes hypothèses, ne pas avoir raison dans ce feuilleton politique hallucinant.

Entre nous

Je l’avais lu à sa sortie en 2020, et j’ai décidé de le relire. Poutine, les oligarques, le conflit avec l’Ukraine, etc. Encore plus d’actualité qu’en 2020. Incroyablement pertinent.

Putin’s People : How the KGB Took Back Russia and Then Took on the West

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Farrar, Strauss and Giroux