Je suis conscient du fait que les médias s'évertuent à dénoncer les pratiques douteuses, le mode d'opération insensible et le manque d'humanité de plusieurs CHSLD. S'il est vrai que cette dénonciation médiatique est souhaitable et utile à l'amélioration globale du système de soins, elle n'est pas étrangère à l'apparition de certains préjugés qui rejaillissent parfois injustement sur l'ensemble des CHSLD et laissent planer un doute dans la population quant à la qualité des soins prodigués à nos aînés.

À défaut d'avoir côtoyé le système auparavant et donc dépourvu d'expérience pratique, mais marqué par cette mauvaise réputation faite aux CHSLD, j'avoue que lorsque l'an dernier, nous avons été contraints, mes soeurs et moi de placer notre mère au Trèfle d'Or, à Châteauguay, j'étais personnellement un peu inquiet.

Maman est décédée le 1er mai au Trèfle d'Or. Elle y est restée environ un an. Durant cette année, mes soeurs et moi sommes allés visiter maman en alternance de façon à ce qu'elle reçoive la visite de l'un d'entre nous à peu près chaque jour. Tout au long de cette année, j'y ai découvert un monde auquel je ne croyais plus tellement.

Souvent, lorsqu'on parle de héros, on pense aux militaires, aux policiers, aux pompiers. Ces héros qui revêtent souvent de beaux uniformes clinquants et portent la plupart du temps des médailles attestant de leurs faits d'armes. À ce CHLSD, j'ai découvert un monde où les héros au quotidien sont légion. Ils n'ont pas de médailles et ne portent pas d'uniforme prestigieux. Simplement, ils accomplissent leur tâche de leur mieux. Jour après jour, ils font un travail souvent ingrat; un travail qui rebuterait la plupart des gens ordinaires. Ils le font sans tambour ni trompette. Ils font leur devoir d'État.

Je ne pense pas qu'en arrivant au paradis, maman ait été dépaysée outre mesure par la présence des anges, car elle en a côtoyé plusieurs au cours de l'année qu'elle a passée dans cette institution. En effet, qu'il s'agisse de préposées aux soins, d'infirmières auxiliaires, d'infirmières ou même d'autres employés moins directement impliqués auprès des bénéficiaires, j'ai eu la chance de rencontrer là du personnel admirable; j'ai eu l'honneur de connaître des femmes et des hommes toujours prêts à s'investir et à fournir ce petit effort additionnel qui souvent a fait la différence auprès des bénéficiaires et de leurs familles. J'ai senti de l'intérêt, de la sincérité, de la compassion, voire de la tendresse émanant de la plupart des membres du personnel à l'endroit des bénéficiaires.

Je sais qu'il est risqué d'énumérer des personnes, car ce faisant, on en oublie souvent plus qu'on ne le voudrait. D'un autre côté, je m'en voudrais d'occulter ma reconnaissance et celle de ma famille envers les membres du personnel de cet établissement, et plus particulièrement ceux du deuxième étage. Je pense ici aux Chantal, Elvine, Raymond, Alex, Carmen. Je pense à l'autre Chantal et à cet infirmier très gentil du quart de soir; je pense à la dame préposée à l'entretien; je pense aussi à cette préposée d'origine gaspésienne qui souvent a détendu l'atmosphère en faisant rire tout le monde et en mettant de la vie pendant les repas. Je pense à tous ceux et celles dont les noms m'échappent, mais desquels le visage est bien présent dans mon esprit. Je pense nécessairement aussi au Dr Lacoste et à l'abbé Daoust.

Merci à la direction de l'établissement et au personnel pour tous les soins prodigués à notre mère au cours de son séjour, mais aussi pour tous les soins prodigués jour après jour à nos ainés, et pour le respect et la compassion qui leur sont démontrés.