Homme heureux dans la cinquantaine, marié depuis plus de 30 ans, j'apprends en juillet dernier que je suis atteint d'un mélanome, qui s'avère un triste héritage de ma jeunesse où les crèmes étaient faites non pas pour protéger, mais plutôt pour soulager nos coups de soleil volontaires ou involontaires «attrapés» en jouant du matin au soir dans les rues et les cours familiales.

Que de nuits passées à devoir rester immobiles dans notre lit, «crémés» par nos mères attentionnées, et le lendemain à comparer avec nos amis de la veille lequel d'entre nous pouvait se retirer le plus de peaux mortes... Quelle tristesse maintenant que l'on sait!

Or, il y a maintenant une vingtaine d'années, un «grain de beauté» apparaît et indique, sans que je ne m'en méfie à ce moment, que mon «quota» de soleil est atteint. En juillet 2011, une visite de routine chez le dermatologue m'annonce que ce souvenir de ma jeunesse a évolué. Un mélanome, aussi sournois et insoupçonné que la fumée secondaire peut l'être, décide alors de frapper et de transformer ma vie que j'ai soudainement peur de perdre. Comprenant que cet intrus est le cancer de la peau le plus grave, pouvant être mortel, c'est pour mes proches et moi-même un long et pénible cauchemar qui débute.

Ce «nuage noir dans mon ciel bleu» est suivi rapidement d'une première chirurgie où on excise l'ennemi. De longues semaines d'attente s'écoulent ensuite avant de connaître le diagnostic, faisant vivre d'interminables nuits d'insomnie et découvrir toute la profondeur qu'une angoisse peut atteindre.

Après un chemin «indescriptiblement» douloureux, surtout moralement, mais soutenu par mes proches ainsi que par un personnel clinique et des spécialistes des plus qualifiés, une deuxième chirurgie, plus mutilante cette fois, permet de confirmer que «l'ennemi» a été «capturé à temps» et de combler son absence par une greffe importante de la peau.

Les mois suivent - durant lesquels les plaies sont traitées - et on m'annonce finalement que «ma garantie est renouvelée». Cette nouvelle étant de bon augure, une réadaptation difficile autant physique que psychologique s'ensuit, celle-ci m'empêchant de réintégrer complètement mon emploi, même après six mois d'absence.

On dit que «l'expérience s'acquiert et qu'elle ne s'achète pas». Loin de moi l'idée de vouloir oublier ce chapitre de mon existence (qui ne sera d'ailleurs plus jamais pareille), mais plutôt d'en faire profiter les autres, car je ne souhaite à personne de vivre de tels moments de détresse profonde.

C'est donc en m'appuyant sur cette nouvelle page de ma vie que j'aspire maintenant à sensibiliser les gens qui m'entourent et qui portent peut-être aussi en eux des «souvenirs de jeunesse» accumulés ou qui sont à les construire inconsciemment, de façon naturelle par une exposition au soleil mal gérée, ou de façon artificielle par ces «cancers en boîte» que l'on appelle salons de bronzage.

La prévention a bien meilleur goût, et il faut combattre tous ensemble cet ennemi juré qu'est le cancer, ce «tueur en série» qu'il faut anéantir, avant qu'il nous anéantisse, avoir sa peau avant qu'il ne prenne la nôtre! S'il m'est possible, par ce témoignage, d'aider de près ou de loin l'interdiction des salons de bronzage aux jeunes et de bien éduquer la population aux dangers du soleil, je pourrai dire: «mission accomplie!».