Le 45e locataire de la Maison-Blanche hérite d'une situation économique beaucoup plus saine que celle qui prévalait à l'arrivée de Barack Obama aux commandes de la première puissance mondiale, mais il aura à lancer des chantiers semés d'embûches.

En novembre 2008, quand le 44e président a été élu, la Grande Récession était amorcée depuis quelques mois, mais c'était avant tout de crise financière qu'on parlait, crise qui commençait toutefois à déteindre dangereusement sur l'économie réelle.

Trois mois plus tard, au moment où M. Obama a prêté serment, les licenciements se chiffraient en plusieurs centaines de milliers tous les mois. De janvier 2009 à janvier 2010, près de 5 millions d'emplois seront supprimés, portant l'hécatombe de la récession qui a commencé en décembre 2007 à 7,8 millions. En octobre 2009, le taux de chômage grimpera même à 10 %.

À cause de la mollesse de la reprise amorcée en juillet 2009, il faudra cinq ans pour récupérer les emplois perdus. Depuis deux ans, le marché du travail va toutefois nettement mieux : le taux de chômage n'était plus que de 4,9 % le mois dernier.

En 2016, Wall Street, le grand responsable de la crise financière avec sa flopée de produits dérivés non réglementés et souvent ésotériques, en mène toujours très large - trop large, diront plusieurs. Reste que la loi Dodd-Franck adoptée en 2010 pour policer le système financier et la recapitalisation forcée des grandes banques ont diminué les risques de revivre les cauchemars de 2008 et 2009.

Relancer la croissance et sauver le système financier a coûté cher. La dette fédérale détenue par le public atteint 14 000 milliards et équivaut à environ 75 % de la taille de la première économie du monde. Heureusement, les taux d'intérêt sont faibles pour l'instant.

Dans les objectifs économiques de son premier mandat, le président Obama souhaitait voir doubler la valeur des exportations américaines.

Cet objectif n'a pas été atteint. Les États-Unis traînent toujours un déficit commercial imposant. Celui avec la Chine, qui fait particulièrement litige, s'est creusé tous les ans depuis l'entrée de l'empire du Milieu dans l'Organisation mondiale du commerce, en 2001. Seule exception : 2009, alors que la Grande Récession a fait chuter le commerce mondial.

Le déficit avec la Chine est en bonne partie causé par la délocalisation de la production américaine. Ce qui est « fièrement conçu aux États-Unis », comme la kyrielle de gadgets électroniques d'Apple, est composé de maints éléments fabriqués dans plusieurs pays d'Asie et assemblés en Chine.

Ce n'est pas la même situation avec d'autres partenaires commerciaux comme le Mexique et le Canada.

Selon Angelo Katsoras, de la Banque Nationale, seulement 4 % des pièces présentes dans les biens importés de Chine proviennent des États-Unis, contre 40 % pour les importations du Mexique.

On peut ajouter que, depuis l'entrée en vigueur du Pacte de l'auto entre les États-Unis et le Canada en 1965, des intrants des deux pays composent les véhicules assemblés à Detroit ou à Windsor.

Dans la gérance du courant protectionniste actuel, il faudra établir la distinction entre le commerce international de biens finis et celui des composants entrant dans les chaînes de valeur des entreprises américaines. Faute de quoi ces dernières éprouveront à court terme des difficultés d'approvisionnement et à moyen terme des hausses de coûts de production qui les rendront moins compétitives et nourriront indûment l'inflation.

Tout ça, sans compter la capacité des pays touchés par d'éventuels réflexes protectionnistes de répliquer à leur tour. Bref, entre la ratification de nouveaux accords tel le Partenariat transpacifique, la remise en question de traités en vigueur comme celui signé avec le Canada et le Mexique et des mesures protectionnistes ponctuelles et ciblées comme cela semble, hélas ! vouloir se produire avec le bois d'oeuvre canadien, il y a beaucoup d'espace pour les jeux d'alliances et les moyens de pression.

Comme dans tous les autres pays occidentaux, la population américaine vieillit. 

Cela pose des problèmes pour le contrôle des coûts des soins de santé et des médicaments, ainsi que pour le renouvellement des rangs de la population en âge de travailler au moyen de l'immigration.

Depuis 2009, les prix des médicaments d'ordonnance brevetés ont bondi de 240 %, alors que ceux des médicaments génériques ont diminué de plus de moitié. Les États-Unis sont parmi les rares pays à ne pas négocier les prix des nouveaux médicaments avec les géants pharmaceutiques. Les pressions populaires s'accentuent pour mettre fin à cette situation indécente, mais le lobby de l'industrie est puissant...

Quant à l'immigration, il serait fort étonnant qu'on trouve une situation acceptable d'ici quatre ans tant les avis sont partagés et la réalité, complexe.

Évidemment, le locataire de la Maison-Blanche ne pourra consacrer tout son temps à l'économie. Il faut aussi trouver comment sortir de façon honorable du bourbier en Syrie et en Irak, tenir à l'oeil la Russie et rester prêt à faire face à toute velléité terroriste...

Infographie La Presse