Après cinq débats au sommet, les quatre candidats à la direction du Parti québécois ont croisé le fer lundi soir à Québec pour la dernière fois, dans une confrontation polie et lisse qui contrastait avec ce qu'ils nous ont offert au cours des derniers mois.

Du premier débat à l'Université de Montréal, au début du mois de septembre, en passant par ceux de Sherbrooke, Montréal, Saguenay et Drummondville, le ton et les échanges se rapprochaient parfois de la Tomatina, cette fameuse fiesta espagnole qui consiste essentiellement à se balancer des tomates dans la tronche dans une foire populaire indescriptible.

Lundi soir, pour le dernier débat, organisé celui-là par le quotidien Le Devoir, les aspirants chefs du PQ ont plutôt participé à quelque chose qui ressemblait davantage à un festival de la tarte aux pommes. La tarte aux pommes, c'est bien connu, tout le monde est pour.

Les deux seuls petits accrochages de la soirée, j'insiste sur « petits », ont eu lieu entre Alexandre Cloutier et Jean-François Lisée sur les questions d'immigration et de laïcité.

Pour le reste, on a assisté à une belle unanimité sur les questions d'éducation, de culture, de protection du français, etc.

Normal. À ce stade-ci, la course est finie. Non, pas finie comme la dernière course était finie (dès le début) avec la victoire prévue de Pierre Karl Péladeau, mais finie sur la scène. Ce n'est pas là que ça se passe, c'est dans le quartier général de chaque candidat. La bataille, ce n'est plus une affaire de performance dans un débat, de « one liner » qui fait mouche ou d'effets de toge, c'est maintenant une affaire de machine, de sortie de vote, de mobilisation.

Lundi soir, les deux favoris (Alexandre Cloutier et Jean-François Lisée) devaient mettre les gants de boxe de côté et mettre un chapeau de chef du Parti québécois, de chef de l'opposition et, surtout, de premier ministre en attente.

À ce chapitre, MM. Lisée et Cloutier ont bien fait tous les deux, s'élevant au-dessus des petits commentaires et des attaques. Après plusieurs débats, Alexandre Cloutier semblait même, finalement, avoir trouvé son ton et son costume de favori présumé.

Trop tard ? La parole est maintenant aux membres du PQ (ils sont environ 73 000, mais combien voteront ?), mais Alexandre Cloutier a voulu leur envoyer un message, lundi matin, en disant qu'il est « à quelques centimètres de la victoire ». La tactique est risquée : d'abord, M. Cloutier pourrait être accusé d'arrogance et il semble envoyer le message à ses militants que leur vote n'est pas absolument crucial pour gagner, puisque c'est presque dans la poche.

Le vote des membres du PQ commence demain et il durera deux jours, par téléphone et par internet, les militants étant invités à faire un premier, un deuxième et même un troisième choix.

À ce stade-ci, la vraie question est de savoir à qui les supporters de Martine Ouellet donneront leur deuxième vote.

Logiquement, on pourrait penser que les deuxièmes votes de Martine Ouellet iraient vers Alexandre Cloutier, moins réfractaire à la tenue d'un référendum, mais les questions identitaires, dominantes dans cette course, pourraient pousser les pro-Ouellet vers Jean-François Lisée.

C'est la crainte, en tout cas, du clan Cloutier. Et l'espoir ultime du clan Lisée.

Résultat vendredi soir, entre 21 h et 22 h, en direct de Lévis. Oubliez toutefois le grand suspense propre aux congrès à la direction d'une autre époque. Pas d'alliance de dernière minute, pas de ralliement, pas de manoeuvre sur le « plancher ».

Le seul suspense de la soirée, ce sera pour le logiciel utilisé pour le décompte des deuxième et troisième tours.

L'autre suspense, une fois le nouveau chef connu, sera de savoir comment celui-ci (oui, la forme masculine s'impose ici) recollera les morceaux de la famille péquiste.

« Martine, Martine, vient, on se colle, on se colle », a lancé Jean-François Lisée à la toute fin du débat (son micro était encore allumé), au moment où il était bras dessus bras dessous avec Paul St-Pierre Plamondon, visiblement heureux de sa course, et Alexandre Cloutier, visiblement mal à l'aise devant cet élan de fraternité de son rival.

Martine Ouellet, elle, à quelques mètres d'eux, semblait déjà prête à quitter la scène.