Pour la première fois en quatre ans, les investissements des entreprises et des organismes publics seront à la hausse cette année au Québec.

C'est du moins ce que révèlent les données annuelles de l'Enquête sur les dépenses en immobilisations, publiées hier par Statistique Canada.

Les intentions formulées par un échantillon de quelque 4600 entreprises et organismes (sur un total pancanadien de quelque 25 000) font état de dépenses projetées en immobilisations, construction non résidentielle et matériel et outillage de 36,27 milliards. Cela représente une hausse de 7,1 % sur les résultats provisoires de 2015.

Cette augmentation contraste avec la baisse de 4,4 % des intentions à l'échelle canadienne. Elles totalisent néanmoins 241,57 milliards. Autrement dit, la part québécoise des dépenses projetées s'établit tout juste à 15 %, assez loin derrière celle de l'Ontario qui stagne cette année et celle de l'Alberta qui plonge une deuxième année d'affilée.

Cette augmentation est surtout attribuable au bond de 9,6 % du secteur public. Les intentions du secteur privé sont plus modestes et représentent, au bout du compte, 11,9 % seulement des investissements privés projetés à l'échelle pancanadienne.

L'augmentation annoncée au Québec dans un contexte canadien déprimé par la chute des investissements pétroliers et gaziers présage néanmoins le possible début d'un rattrapage très attendu.

On en aura toutefois la confirmation seulement dans un an.

Entre les intentions d'investir et leur matérialisation, il y a parfois un monde. Ainsi, l'an dernier, la même enquête avait signalé des intentions de 37,32 milliards au Québec. Elles représentaient une augmentation de 3,2 % sur 2014. Les données provisoires font plutôt état d'investissements de 33,85 milliards.

Bref, si les intentions de 2016 devaient toutes se concrétiser, alors les investissements resteraient néanmoins inférieurs d'environ 1 milliard aux intentions de 2015.

Voilà pourquoi le ministère des Finances a été bien avisé de miser sur la stabilisation du niveau des investissements non résidentiels des entreprises pour l'année en cours dans la préparation du budget.

Si on ne s'en tient qu'aux intentions, les chiffres québécois sont un peu encourageants. Ainsi, sur les quelque 2,4 milliards d'augmentation, 1 milliard est destiné au secteur manufacturier (portant le total à 4,16 milliards) alors que l'investissement annoncé recule de 2,1 milliards d'un océan à l'autre.

Les segments bénéficiaires sont surtout la première transformation des métaux, les aliments, les produits du pétrole, les produits chimiques, plastiques ainsi que minéraux non métalliques.

Des baisses significatives sont attendues, en revanche, dans le matériel de transport, les produits métalliques et du bois.

Il serait étonnant que tout cela se concrétise toutefois. L'enquête a été réalisée entre octobre et janvier. Il n'y a pas moyen de vérifier si a été prise en compte l'annulation de l'investissement de 400 millions de FerroAtlantica dans une usine de silicium à Port-Cartier ou de celui de 2 milliards par un consortium formé de la Coop fédérée et par IFFCO dans une usine d'urée à Bécancour. Les deux ont été annoncées à la mi-décembre.

Le Québec peut aussi s'attendre à des investissements accrus dans les services publics, dans l'extraction minière et l'exploitation en carrière, dans l'information et les industries culturelles.

Il pourra surtout compter sur un bond de 1 milliard dans les dépenses des administrations publiques, dont la moitié viendra d'Ottawa.

Dans ce dernier cas, ce pourrait être davantage : l'enquête s'est déroulée avant la présentation du budget du ministre Bill Morneau qui prévoit une augmentation de quelques milliards pour les infrastructures.

Malgré la hausse encourageante des intentions au Québec, la baisse des investissements dans le secteur manufacturier à l'échelle canadienne est de nature à inquiéter la Banque du Canada pour deux raisons.

L'enquête sur les perspectives des entreprises menée sur une base trimestrielle par la Banque avait capté la baisse des investissements, dans sa livraison hivernale. Réalisée entre le 12 novembre et le 8 décembre, elle révélait les plus faibles intentions d'investir du présent cycle. Celle réalisée entre le 11 février et le 7 mars reflétait un léger redressement des intentions d'investir.

Les données publiées hier par l'agence fédérale à partir d'un échantillon beaucoup plus vaste viennent confirmer que la croissance sera faible à court terme. À moyen terme, elles signifient que la fabrication est loin d'être prête à prendre le relais des ressources comme moteur du commerce extérieur, en dépit de la dépréciation du huard face au billet vert depuis 2014.