Pour une deuxième année d'affilée, le ministre des Finances Carlos Leitao présente un budget équilibré qui prévoit un dépôt substantiel au Fonds des générations dédié à la réduction de la dette.

Ce dépôt de 2,03 milliards fait suite à celui de 1,4 milliard pour l'exercice qui prend fin le 31 mars.

M. Leitao a souligné jeudi que son troisième budget reflète une croissance des revenus plus rapide que celle des dépenses, une condition essentielle à des finances publiques saines.

«Si nous avions démoli l'économie, nous n'aurions pas obtenu une bonne tenue des revenus», a soutenu le ministre devant la presse.

Ainsi, la croissance des recettes fiscales tirées de l'impôt sur le revenu des particuliers augmentera de 4,1 % et 3,8 % cette année et l'an prochain, celle de l'impôt sur les revenus des sociétés, de 2,5 % et 4,2 % et celui des taxes à la consommation, de 2,7 % et 2,6 %.

Les hypothèses économiques qui servent d'assise au budget misent sur une croissance réelle de 1,5 % et de 1,6 % et une croissance nominale (en dollars courants) de 3,2 % et 3,3 %, en 2016 et 2017. Il s'agit de prévisions légèrement plus faibles que celles présentées dans la mise à jour de l'automne. Pour 2015, la croissance réelle est estimée à 1,1 % seulement. Les chiffres seront divulgués à la fin du mois par l'Institut de la statistique du Québec.

Cette année, les moteurs de la croissance seront la consommation des ménages, les exportations internationales et les investissements non résidentiels des entreprises.

Dans ce dernier cas, il s'agit du colmatage d'une hémorragie dramatique qui a duré trois ans plutôt que d'une augmentation réelle.

Cette carence répétée nuira sûrement à la capacité du Québec de profiter des occasions qu'offre la robustesse de la croissance américaine. Fait à signaler, le budget fait aussi l'hypothèse d'un taux de change moyen de 70,6 et 71,9 cents américains en 2016 et 2017. Ces jours-ci, le huard vaut 76 cents US.

Cet optimisme est heureusement isolé.

Les autres grands paramètres du budget sont marqués du sceau de la prudence. 

Ainsi, la croissance des dépenses de programmes est contenue à 2,7 % et 2,8 % cette année et l'an prochain, ce qui reste néanmoins davantage que la hausse modeste de 1,7 % pour l'exercice en cours. Les prévisions de dépenses incluent aussi une provision pour éventualités de 400 millions, en 2016 et 2017.

Les revenus autonomes augmentent quant à eux de 2,5 % et 2,8 %. La hausse de 6,9 % et de 3,8 % des transferts fédéraux vient heureusement sauver la mise, assurer une croissance plus élevée des revenus que des dépenses et dégager le surplus de quelque 2 milliards dédié à la diminution de la dette. 

«On a affaire à un Parti libéral qui tolère une économie qui dépend de plus en plus des transferts fédéraux.» - Le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault

Consolidés, les transferts fédéraux totalisent 20,1 milliards sur des revenus de 102,6 milliards. De cette somme, la péréquation représente quelque 10 milliards, en hausse d'un demi-milliard, sur l'exercice en cours. On attend encore un demi-milliard de plus en 2016-2017. 

Coïncidence cocasse, les versements d'Ottawa en péréquation équivalent grosso modo au service de la dette qui coûtera 10,4 milliards en 2016-2017, en hausse de 3,6 % par rapport à 2015-2016.

Pour 2016, la dette brute est estimée à 207,7 milliards, en hausse de 3,7 milliards. Elle équivaut à 55 % de la taille de l'économie (le produit intérieur brut nominal), c'est-à-dire la valeur de la production annuelle de biens et de services produite, projetée à 389,6 milliards cette année. 

Il s'agit d'une diminution de un dixième du ratio de la dette brute sur le PIB nominal, la première depuis 2009. «Les investisseurs ne seront certainement pas rassurés par cela», a noté Nicolas Marceau, député péquiste de Rousseau et titulaire précédent du portefeuille des Finances.

Pour assurer sa note auprès des grandes agences de notation, Québec s'est engagé en 2010 à réduire ce ratio à 45 % d'ici 2026.

Sans le Fonds des générations, dont la valeur comptable est estimée à 8,5 milliards en 2015.

Sans ce Fonds, le ratio de la dette brute sur le PIB nominal grimpe à 57,5 %.

Infographie La Presse