En principe, la chute du prix du pétrole devait profiter aux provinces qui n'en produisent pas en stimulant la consommation des ménages. Celle du dollar canadien devait en outre stimuler les exportations hors ressources.

En pratique, cette belle théorie se vérifie pas mal en Ontario, mais elle est moins évidente au Québec. Du moins, après trois trimestres en 2015.

L'Institut de la statistique du Québec (ISQ) rapportait hier que la croissance réelle avait progressé de 1,1 % de juillet à septembre, en rythme annualisé. En octobre, la production de biens et services a cependant reculé de 0,5 %. (Ces chiffres tiennent compte des récentes révisions de Statistique Canada, ce qui explique le long délai de publication.)

En comparaison, la croissance trimestrielle réelle était de 2,3 %, d'un océan à l'autre, et de 3,5 %, en Ontario dont les comptes nationaux ont été publiés la semaine dernière.

Si le Canada dans son ensemble a connu une légère récession technique au premier semestre, l'an dernier, le Québec a pu l'éviter avec une modeste croissance à chacun des trimestres (1,2 % et 0,4 %).

De son côté, l'économie ontarienne a connu une expansion modeste durant l'hiver (0,8 %) qui s'est accélérée au printemps (1,7 %).

Les détails de la croissance québécoise montrent que les consommateurs étaient encore les moteurs de l'expansion, durant l'été, les autres secteurs paraissant atteints d'anémie.

Le plus malade d'entre tous est certainement celui des investissements des entreprises en machines et équipements. Ils ont chuté de près de 20 % durant le trimestre. Exprimés en valeur ou en volume, ils ont atteint durant l'été leur niveau le plus faible depuis 2002. À l'époque, rappelons-le, le dollar canadien était sous la barre des 65 cents américains, soit bien plus faible que durant l'été.

On pourra objecter que le commerce international a contribué à la croissance. À l'examen, c'est pour les mauvaises raisons : les importations ont diminué davantage que les exportations.

En outre, la volonté de réduire la dette de l'État entraîne une diminution de la contribution des gouvernements à l'activité économique.

La variation de l'activité économique exprimée en dollars courants (le PIB nominal) progresse de 2,4 %, en rythme annuel. Cette variation sert de jauge à la croissance de l'assiette fiscale. À ce rythme, Québec devra trimer ferme pour dégager un surplus de 1,5 milliard affecté à la réduction de la dette (ou au pari risqué dans Bombardier, c'est selon), prévu dans le budget du ministre des Finances Carlos Leitao.

FAIBLESSE DE LA PRODUCTION

Calculée par industrie, la production québécoise en octobre a été beaucoup plus faible que celle du Canada dans son ensemble, qui a pourtant fait du surplace. C'est de fort mauvais augure pour le dernier trimestre puisque les indicateurs économiques publiés jusqu'ici suggèrent que la production canadienne était en panne durant l'automne. Le Québec, lui, a commencé la saison par un recul.

Un rebond des exportations serait bien surprenant : l'économie américaine a ralenti durant l'automne à un rythme estimé aux environs de 1 %, contre 2 % durant l'été pendant lequel le Québec n'a pas su tirer son épingle du jeu.

En octobre, la faiblesse de l'économie québécoise était généralisée puisque 15 segments sur 20 ont reculé, dont l'extraction minière, la fabrication, la construction et la production électrique. Le temps clément observé en novembre et décembre ne permet pas d'espérer de redressement dans la production d'Hydro-Québec.

Les nouvelles sont un peu plus encourageantes du côté de la fabrication. Après des reculs marqués en septembre et octobre, Statistique Canada nous a appris mercredi que la production en usine avait rebondi de 1,2 % en novembre. Elle reste néanmoins plus faible qu'un an plus tôt, ce qui n'est pas du tout le cas de l'activité manufacturière ontarienne, qui paraît en plein essor.

Tous ces chiffres montrent une chose : depuis 2012, l'économie du Québec progresse à peine de 1 à 1,5 % par année. La démographie y est pour quelque chose, mais le sous-investissement l'est bien davantage. L'année 2016 sera sans doute de la même eau.

Ce sera tout de même un peu mieux que 2015, où le rythme d'expansion a sans doute été contenu à 1,1 ou 1,2 %.