C'est un signal fort que le premier ministre Justin Trudeau vient d'envoyer aux peuples autochtones. Le signal d'un gouvernement déterminé à réaliser ses engagements.

En jetant rapidement les bases d'une commission d'enquête portant sur la disparition ou l'assassinat de 1181 femmes autochtones, le gouvernement marque clairement un changement de direction.

En mandatant trois ministres - la ministre des Affaires autochtones et du Nord, la ministre de la Condition féminine et la ministre de la Justice, elle-même une autochtone - pour mettre cette commission en place, il démontre aussi l'importance qu'il accorde à ce dossier.

Un lien de confiance doit être rétabli entre le fédéral et les peuples autochtones. Le premier ministre Justin Trudeau n'en est pas seulement conscient, il en semble convaincu. « Nous dirons la vérité. Si nous faisons des erreurs, comme en font tous les gouvernements, nous les reconnaîtrons et nous en tirerons des leçons », a-t-il déclaré hier devant l'Assemblée des Premières Nations.

Ottawa veut prendre le temps de faire les choses « correctement ».

Et du temps, il en faudra pour s'attaquer à un dossier aussi complexe, qui s'échelonne sur une longue période et qui touche autant d'enjeux.

Voilà qui explique pourquoi le gouvernement procèdera en deux étapes, en lançant d'abord une précommission. La pratique n'est pas courante, mais elle est avisée dans ce cas-ci. Elle permettra de définir le mandat de l'enquête nationale, mais aussi d'entendre les familles des disparues et les organismes qui travaillent avec les autochtones, concernés au premier plan.

Pour faire la lumière sur cette « tragédie nationale », il ne faut pas penser refaire les enquêtes de police ou retrouver les assassins. Il ne faut pas se limiter à voir les victimes comme de simples statistiques. Il ne faut surtout pas se contenter d'un énième rapport brossant seulement un triste constat quant aux conditions de vie misérables dans lesquelles vivent plusieurs communautés autochtones. C'est pourquoi cette commission d'enquête prendra du temps.

La violence envers les femmes autochtones étant intimement liée à des enjeux de pauvreté, de toxicomanie ou de chômage, le gouvernement ne pourra en faire abstraction. Impossible également de fermer les yeux sur les problèmes liés au manque de logements, à la santé, à l'éducation ou même au racisme et à la négligence qui subsistent envers les autochtones, même au sein de services gouvernementaux.

Les attentes sont très grandes et le risque est élevé de s'éparpiller, ne serait-ce que parce que cette commission est attendue, réclamée et espérée depuis si longtemps.

Osons toutefois espérer qu'en mettant des mots sur des maux, elle forcera une réelle prise de conscience. D'où l'importance de bien fixer son mandat et son objectif, car, après le constat, le Canada devra avoir le courage et l'honnêteté d'agir pour sortir les Premières Nations du tiers monde dans lequel elles croupissent depuis trop longtemps.