Philippe Couillard voit dans le résultat des quatre élections partielles de lundi un appui à ses décisions, notamment budgétaires. Il a fort probablement raison, mais on constate, encore une fois, que la confiance de ce gouvernement est en train de se transformer en condescendance face à l'opposition et en arrogance devant ses critiques.

Pourtant, hormis ses succès électoraux, le gouvernement n'a pas de quoi pavaner, ces jours-ci. Le nébuleux retrait (départ ?) dans la honte de la ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault, la grogne dans le milieu de l'éducation, la colère des médecins, le douteux et risqué sauvetage de Bombardier avec des fonds publics et la gestion en amateur du « flushgate » sont autant de facteurs qui devraient amener le gouvernement Couillard à un peu plus de modestie. Ils devraient aussi l'inciter à écouter les Québécois plutôt que de jouer à « Papa a raison ».

Sans rien vouloir enlever à la « machine » libérale, relativisons d'abord les victoires de lundi. Ces quatre partielles, déclenchées en pleine campagne électorale fédérale, reposaient sur une double stratégie : premièrement, miser sur la « fatigue » des électeurs, qui venaient de se farcir la plus longue campagne fédérale de l'histoire du Canada, et deuxièmement, devancer la publication du rapport de la commission Charbonneau, qui sera assurément dommageable pour le Parti libéral.

En raison du taux de participation pitoyable dans Fabre et Saint-Henri-Sainte-Anne (23 %), les deux nouvelles députées du PLQ se retrouvent à l'Assemblée nationale avec à peine 10 % d'appui des électeurs appelés à voter. Les libéraux devraient avoir le triomphe modeste dans les circonstances.

C'est vrai aussi de quelques ministres, dont Gaétan Barrette, qui vient de faire passer son projet de loi 20 malgré une profonde opposition dans le milieu de la santé et chez ses critiques. On craint, notamment, que l'encadrement des frais accessoires (de plus en plus communs) ne les normalise et que ceux-ci ne se multiplient. Le ministre Barrette rejette toutes ces inquiétudes avec l'arrogance dont il est capable. La meilleure défense, c'est bien connu, c'est l'attaque, un principe auquel adhère notre ministre de la Santé.

J'ai été renversé, mercredi, par le ton frondeur et condescendant de M. Barrette en entrevue avec Geneviève Asselin à l'émission Midi info, à la radio de Radio-Canada.

« Je suis très déçu par la façon dont vous formulez votre question », a-t-il d'abord lancé à l'animatrice, qui a fort justement précisé qu'elle ne faisait que reprendre les craintes et les critiques entendues dans le milieu.

« Ah, alors je suis très déçu de la façon dont vous relayez cette information qui démontre leur incompréhension et leur biais [...] » Lorsqu'on n'aime pas le message, on tire sur le messager, ça aussi, c'est un vieux truc connu.

Et puis, quelques minutes, plus tard, à Mme Asselin, qui insistait trop à son goût : « Si ça vous dérange pas, je vais vous répondre... », avant de mettre lui-même fin à la discussion : « À moins que vous ayez d'autres questions, j'imagine qu'on va bientôt terminer l'entrevue. »

« Très déçu de la formulation de question », M. Barrette ? Réponse hors sujet. Il n'était pas en entrevue (dans un train ou ailleurs) avec Josélito Michaud, mais bien à une émission « hard news » d'affaires publiques. Ses états d'âme quant à la formulation des questions ne nous intéressent pas. 

On voudrait seulement qu'il explique son projet de loi, qu'il dise en quoi il est bon pour les Québécois. Au lieu de cela, M. Barrette ridiculise ses opposants et les traite d'ignorants, ce qu'il a d'ailleurs déjà fait à l'Assemblée nationale, avec le même mépris, à sa critique péquiste, Diane Lamarre.

La diplomatie n'est pas la principale force du ministre Barrette, comme l'a dénoncé cette semaine le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec, Louis Godin. « Les débats politiques entourant ce projet de loi digne de l'ère soviétique ont donné lieu à beaucoup de déclarations calomnieuses teintées de préjugés non fondés à l'égard des médecins de famille », a déploré le Dr Godin.

Pourtant, les questions et inquiétudes sont légitimes lorsqu'on impose de telles réformes dans le monde de la santé.

Par ailleurs, le ministre du Développement économique, Jacques Daoust, est certes plus affable que son cassant collègue à la Santé, mais il est tout de même agaçant de l'entendre parler du gouvernement à la première personne du singulier, comme si le 1,3 milliard investi dans Bombardier sortait de ses REER. « Ce que je fais... », « Mon but est de... », « Je protège des emplois »... Il serait bon de rappeler au ministre Daoust que ce sont tous les Québécois qui investissent dans Bombardier et qui en assument les risques.

Une bonne note, toutefois, au gouvernement Couillard, qui a (enfin !) déposé hier un projet de loi pour revoir la rémunération et le régime de retraite des députés, en plus d'abolir les « allocations de transition » versées aux députés démissionnaires ou battus. Il était plus que temps.

GROS NOVEMBRE POUR TRUDEAU

C'était Noël en novembre, hier, pour les journalistes de la tribune parlementaire, à Ottawa, qui ont eu droit au plus long point de presse d'un premier ministre depuis près d'une décennie. Même après avoir décrété la fin du point de presse, Justin Trudeau est revenu au podium pour répondre à plusieurs autres questions.

On a appris, notamment, qu'il rencontrerait Barack Obama la semaine prochaine en privé au sommet de l'APEC, qu'il a convoqué les premiers ministres provinciaux à Ottawa pour parler d'environnement le 23 novembre et qu'il sera reçu par la reine Élisabeth II au palais de Buckingham deux jours plus tard, avant de se diriger vers Paris pour le sommet sur le climat.

Élisabeth II, qui a eu quelques rencontres épiques avec Pierre Elliott Trudeau, fera connaissance avec son fils, qui a décroché le portrait de la reine au ministère des Affaires étrangères pour raccrocher deux toiles de Pellan retirées par l'ancien gouvernement conservateur.

Autre signe de rupture avec le précédent régime, les libéraux ont également l'intention de biffer les mentions « royales » de l'appellation de la marine et de l'aviation canadienne.

Beau sujet de conversation pour prendre le thé à Buckingham Palace...