Le nombre d'élèves en difficulté a bondi dans les classes, entraînant une hausse du budget et du personnel. Pourtant, les professeurs se disent plus essoufflés que jamais, les parents sont démunis et trop d'enfants sont laissés à eux-mêmes. Visiblement, ça ne tourne pas rond.

En l'espace d'une décennie, le nombre d'enfants avec l'étiquette EHDAA - élève handicapé ou en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage - a bondi pour toucher un élève sur cinq. Comment est-ce possible ? Il est urgent de tenter de répondre à cette question pour mieux intervenir.

Un débat a émergé le printemps dernier. Un document gouvernemental circulant à la Commission de révision permanente des programmes évoquait une « course aux codes » dans les commissions scolaires, puisqu'elles reçoivent un budget plus élevé pour les élèves en difficulté. Une hypothèse aussitôt rejetée. Plusieurs s'interrogent aussi sur un possible surdiagnostic de certains troubles. Déjà, l'an dernier, le rapport Champoux-Lesage sur le financement, l'administration et la gestion des commissions scolaires s'interrogeait sur ces enjeux.

Mais le couvercle a vite été remis sur la marmite. 

À Québec, on justifie maintenant la hausse des cas par « un meilleur dépistage ». Et l'idée de revoir le financement n'est plus dans l'air.

Le débat n'a pas été fait pour autant. Les manifestations d'enseignants et les chaînes humaines organisées par les parents témoignent que dans les écoles, ça ne va pas. Les cas sont différents et complexes. Des élèves nous échappent.

Ce n'est pas nécessairement faute d'argent. Le budget a doublé depuis le tournant des années 2000 pour dépasser les 2,1 milliards. Sait-on si cet argent se rend en totalité aux élèves en difficulté ? Plus de transparence serait souhaitable.

Des spécialistes et du personnel de soutien ont été embauchés. Mais leurs efforts sont souvent disséminés dans plusieurs écoles. Près de 40 % de leur temps est consacré à des tâches administratives. Sans compter que certaines spécialités - comme l'orthophonie - sont presque en voie de disparition dans les écoles.

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Il est pourtant possible d'agir auprès de certains enfants : il faut notamment dépister et intervenir dès la petite enfance. Un jeune de 3 ans qui présente un retard de langage qui n'est pas corrigé risque de développer, à 7 ans, un trouble d'apprentissage en lecture et en écriture. Son problème se cristallisera pour devenir un retard scolaire, provoquant démotivation et décrochage.

Il faut créer plus de ponts pour que la santé, l'éducation et les intervenants du milieu se concertent davantage, surtout quand on sait que certains troubles ne sont pas neurologiques, mais résultent des conditions sociofamiliales dans lesquelles grandissent les enfants.

Les connaissances sont là, la capacité de poser des diagnostics aussi. Les remèdes existent. Il reste à agir adéquatement et cela signifie, entre autres, d'intervenir avant qu'il ne soit trop tard.