On ne peut plus parler d'un simple désir de changement. Les électeurs ont rejeté massivement un gouvernement conservateur dans lequel ils ne se reconnaissaient plus, après dix ans au pouvoir. Et le résultat final positionne avantageusement le Québec.

Le Parti libéral a obtenu la majorité tant convoitée. Et, cette fois, le Québec a sauté dans le train, après avoir boudé les libéraux pendant une décennie, mais aussi le pouvoir pendant un quart de siècle. On peut même parler d'une vague rouge qui a déferlé sur la province, balayant la vague orange de 2011.

Ce faisant, le Québec se donne une voix qui portera à Ottawa. Il peut espérer une forte représentation au conseil des ministres, à commencer par celle du premier ministre lui-même puisque Justin Trudeau a été facilement élu dans Papineau. Le résultat est aussi une bonne nouvelle pour la métropole, qui a souffert de ne pas avoir de représentant à Ottawa au cours des dernières années.

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Au fil des semaines, les sondages avaient montré une remontée des libéraux dans les intentions de vote, mais rien ne laissait présager une telle finalité, même si on sentait la lassitude et le désir de changement dans l'électorat.

S'adressant à ses partisans en liesse, le premier ministre élu s'est montré humble dans la victoire et rassembleur dans le discours. « Les conservateurs ne sont pas nos ennemis, ce sont nos voisins », a-t-il déclaré.

L'issue du scrutin a fait de grands perdants. Stephen Harper d'abord, qui a annoncé sa démission, lui qui était à la tête du Parti conservateur depuis 2004.

Le NDP ensuite, qui a connu une véritable débandade. Non seulement Thomas Mulcair s'est fait doubler sur sa gauche par les libéraux en cours de campagne, mais il n'a pas été en mesure de capitaliser les gains obtenus en 2011 par Jack Layton, même s'il le rappelait constamment à la mémoire des électeurs. Favoris en août, les néo-démocrates ont littéralement vu leurs appuis s'écrouler 78 jours plus tard.

Quant au Bloc québécois, même s'il a fait élire plus de députés qu'en 2011, il a obtenu moins de voix et n'a pas retrouvé son statut de parti officiel. Son avenir et sa pertinence sont plus que jamais incertains. Sans compter que son chef, Gilles Duceppe, s'est incliné face à la néo-démocrate Hélène Laverdière.

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Ceci dit, plusieurs défis attendent le gouvernement libéral. Justin Trudeau devra notamment renouer le dialogue avec les provinces, après des relations difficiles et quasi inexistantes sous l'ère Harper. Avec une majorité de députés libéraux de l'Ontario à l'Atlantique, on assiste à un retour du balancier vers le centre du pays ; le nouveau premier ministre devra non seulement tendre la main, mais rallier les électeurs de l'Ouest.

Enfin, le Parti libéral devra être irréprochable sur le plan de l'éthique. C'est particulièrement vrai au Québec, où les électeurs semblent avoir tourné la page sur le scandale des commandites. Mais il sera sous haute surveillance. Après la démission de l'ex-coprésident de campagne, Dan Gagnier, le parti de Justin Trudeau devra être transparent et prudent face aux groupes d'intérêts, notamment l'industrie pétrolière.