Cessons de croire qu'il existe une solution simple et uniforme à l'endoctrinement des jeunes Québécois qui partent faire le djihad.

Bien que nécessaire, ce n'est pas une politique gouvernementale contre la radicalisation, comme celle que présentera sous peu le gouvernement Couillard, ou la nomination d'un observateur de l'intégrisme, comme le propose le Parti québécois, qui permettra de rejoindre les jeunes aussi efficacement que des gestes concrets sur le terrain.

Qu'une vingtaine de jeunes Québécois aient récemment quitté le pays ou aient été interceptés in extremis à l'aéroport - comme ce fut le cas cette semaine - est évidemment préoccupant.

Chercher un responsable, en pointant Adil Charkaoui qui dirige le Centre communautaire islamique de l'Est de Montréal, ou le Collège de Maisonneuve, où étudiaient 11 de ces jeunes, n'estompera pas pour autant l'attrait qu'exerce la Syrie ou l'Irak.

Il importe de comprendre les motivations de ces jeunes, pour la plupart nés ici de parents immigrants, ayant grandi avec un pied dans la culture québécoise et l'autre dans celle de leurs origines, qui ont atteint l'âge où l'on est en quête de son identité. Se sont-ils sentis abandonnés par la société? Est-ce le reflet d'un mal-être qui, dans leur cas, se reflète par la radicalisation?

Le phénomène d'endoctrinement auquel on assiste incite tous les établissements d'enseignement à la vigilance. Il les force à réfléchir sur le rôle qu'ils ont à jouer pour développer le sens critique des étudiants et contribuer à diffuser une information réaliste sur le djihad, bien différente de l'image romantique et idéaliste propagée par les réseaux sociaux.

Le principal défi consiste à détecter des signes de radicalisation sans tomber dans le profilage et l'exclusion.

Les parents et les amis sont les plus habilités à percevoir des changements de comportement inquiétants, mais même eux se retrouvent désemparés quand le jeune disparaît sans qu'ils n'aient rien vu venir.

Et s'ils sont inquiets, la seule avenue qui s'offre à eux est d'alerter les policiers. Quand ils se résignent à le faire, c'est en désespoir de cause... et il est souvent trop tard.

Le travail de renseignement et la collaboration des corps policiers sont primordiaux - on l'a vu avec les dix jeunes arrêtés à l'aéroport -, mais ce n'est pas suffisant. Il est indispensable de tisser des liens entre les autorités et les communautés, par le biais de leaders ou d'imams, et de mettre à leur disposition des ressources en qui elles auront confiance.

On le voit, chercher une réponse unique pour lutter contre la radicalisation n'est pas la solution, pas plus d'ailleurs que de balayer le problème en affirmant qu'il n'existe « aucune excuse ou aucune raison pour un Canadien de devenir djihadiste », comme l'a fait le premier ministre Stephen Harper. La réalité est drôlement plus complexe.