Trois ans après le printemps érable, nous voilà de retour à la case départ, à débattre de la légitimité ou non d'une grève étudiante et à déplorer la pseudo-démocratie qui règne dans certaines assemblées générales.

Il ne suffit pas d'affirmer, comme le fait le ministre de l'Éducation, François Blais, que les cours doivent être maintenus et que les établissements d'enseignement ont «les moyens de faire respecter les règles de vie», pour régler l'épineuse question.

Dès le premier jour de grève, lundi, les protestataires ont forcé l'intervention de policiers à l'Université Laval. Au Québec, la majorité des cours visés par le mouvement ont été annulés. Le climat n'est pas propice aux apprentissages quand des étudiants bloquent l'entrée des salles de cours ou font du tapage.

L'accalmie qui a suivi la coûteuse crise de 2012 aurait dû inciter le gouvernement à prendre des mesures pour encadrer de futures grèves étudiantes - car il y en aura d'autres. Ce serait reconnaître implicitement le droit de grève, et Québec s'y refuse.

Favoriser un processus démocratique transparent apaiserait les tensions. Le déroulement de certaines assemblées générales a l'effet inverse: les rassemblements s'étirent pendant des heures, les procédures se multiplient, des anarcho-syndicalistes prennent le contrôle, et le tout se conclut par un vote à main levée.

Le vote est un devoir auquel devraient s'astreindre tous les étudiants. Implanter un système de votation secret qui se tiendrait par exemple sur une journée, favoriserait la participation d'un plus grand nombre.

Le recours au vote électronique au Cégep André-Laurendeau a permis à 84% de la population étudiante de se prononcer... à 50,5% contre la grève. La plupart des établissements d'enseignement disposent de la technologie nécessaire. Ce sont les associations étudiantes qui la refusent. Au Cégep Édouard-Montpetit, l'assemblée générale où la question a été débattue a tourné en foire d'empoigne.

Les associations étudiantes sont régies par la Loi sur les compagnies et sont considérées comme des entités autonomes. Les universités et les cégeps affirment ne pas pouvoir intervenir dans leur gestion.

Les établissements doivent toutefois prendre leurs responsabilités quand c'est nécessaire, notamment pour faire respecter leur politique interne quant aux débordements. À l'UQAM, des étudiants sont menacés d'expulsion pour des gestes commis en 2013 et 2014, une mesure exceptionnelle. Mais ces procédures prennent du temps; elles ne règlent pas une crise.

Refuser d'encadrer le droit de grève, ou à tout le moins le processus de consultation, exacerbe les tensions et favorise la judiciarisation des conflits. Le mouvement d'opposition à la grève étant mieux organisé cette année, le recours aux tribunaux promet de se multiplier. Ce n'est pas la solution. Forcer la tenue des cours à coups d'injonctions et d'interventions policières ne mène nulle part. Le dossier est délicat, mais le gouvernement doit avoir le courage d'agir.