En Grèce, le parti Syriza a été porté au pouvoir il y a un mois en promettant de libérer le pays de l'austérité imposée par ses créanciers. Le plan de réformes soumis à ces derniers (Union européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) montre que le nouveau gouvernement grec a dû plier l'échine. Plusieurs des promesses faites pendant la campagne électorale devront être laissées de côté ou considérablement diluées.

Syriza s'était engagé à dépenser 2 milliards d'euros pour s'attaquer à la «crise humanitaire» provoquée par la récession: électricité gratuite et subventions alimentaires pour 300 000 familles pauvres, baisse de la taxe sur le mazout, etc. Dans sa lettre aux «institutions» (le nouveau nom de la «troïka»), Athènes précise que «la lutte à la crise humanitaire ne devra pas avoir d'effet fiscal négatif.» Premier recul.

Le parti d'Alexis Tsipras avait promis d'annuler la diminution de 22% du salaire minimum. La lettre envoyée à Bruxelles parle d'une hausse «progressive» du salaire minimum «de manière à protéger la compétitivité et les perspectives d'emploi.» Second recul.

Il devait aussi y avoir abandon du processus de privatisation de services et entreprises d'État, en particulier la vente du Pirée, le plus grand port du pays. Le ministre des Finances, Yanis Varoufakis, a fait savoir que le port serait bel et bien cédé au privé. Il s'est aussi engagé à ne pas annuler les privatisations déjà conclues ou en cours. Troisième recul.

Le premier ministre Tsipras a camouflé sa capitulation sous des déclarations tonitruantes. «Nous avons vaincu les forces conservatrices aveugles qui voulaient asphyxier la Grèce!», a-t-il soutenu. Les sceptiques sont nombreux.

La sincérité de Syriza ne fait pas de doute. À l'intérieur du cadre serré imposé par l'Europe et le FMI, M. Tsipras et son équipe vont tout faire pour diminuer l'impact de l'austérité sur la population. Cependant, les «institutions» ne leur permettront pas d'échapper à la nécessité de rétablir la situation financière de l'État et de libéraliser l'économie. Syriza compte sans doute sur la crainte suscitée par une éventuelle sortie de la zone euro. Cette crainte est grande, en effet, mais la patience des Européens et du FMI a des limites.

Selon un sondage, seulement 21% des Allemands approuvent la prolongation pour quatre mois du plan d'aide à la Grèce. Ce n'est donc pas de gaieté de coeur que les députés allemands approuveront cette prolongation aujourd'hui. D'autant que le flamboyant ministre grec des Finances y est allé d'une autre déclaration-choc, comparant ses homologues européens «aux médecins du Moyen-Âge qui, voyant que la saignée qu'ils ont prescrite a aggravé l'état du malade, lui en imposent une autre.»

Ces propos n'ont rien pour calmer la colère des citoyens et politiciens du Vieux Continent pour qui c'est plutôt l'Europe et le FMI qui ont été saignés - de 165 milliards d'euros-au profit de la Grèce.