Lundi dernier, les météorologues annonçaient une tempête «historique» qui enterrerait New York sous 90 centimètres de neige. Par mesure préventive, les rues et le métro ont été fermés. Or, en fin de journée mardi, la métropole avait reçu moins de 30 centimètres.

Cette prévision erronée a fourni des munitions aux négationnistes des changements climatiques. «Ce sont les mêmes personnes qui prétendent prédire le climat dans 50 ou 100 ans!», a ironisé l'animateur Rush Limbaugh.

Les experts répliquent que les prévisions météorologiques et les projections du climat à long terme sont deux exercices foncièrement différents. Malheureusement, les climatologues eux-mêmes sont en partie responsables de la confusion. Avant que la tempête ne touche la côte est lundi soir, plusieurs d'entre eux soutenaient que des perturbations de cette envergure se produisent plus souvent de nos jours à cause du réchauffement. «Nous le disons depuis des années, de tels événements extrêmes sont les conséquences prévisibles des changements climatiques», a déclaré Don Wuebbles, professeur des sciences de l'atmosphère à l'Université de l'Illinois.

Un climatologue à qui on demande s'il y a un lien entre une tempête donnée et les changements climatiques devrait répondre «non», point. Dans son plus récent rapport, le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) souligne à quel point il est difficile de prévoir l'évolution à court terme (20 ans) du climat. Aussi le Groupe se contente-t-il de qualifier de «probable» (plutôt que «très probable» ou «pratiquement certaine») l'augmentation de la fréquence et de l'intensité des fortes précipitations.

S'il y a consensus dans la communauté scientifique sur la tendance au réchauffement de la planète, des débats ont cours sur certains aspects particuliers du phénomène. Ces échanges sont sains et il est dommage que le grand public en entende peu parler. Par exemple, on a constaté que le rythme du réchauffement a diminué au cours des deux dernières décennies, une évolution que les modèles climatiques n'avaient pas prévu. Les causes de cet écart font l'objet de nombreuses recherches.

Des chercheurs américains et canadiens viennent de publier une analyse de l'évolution de la glace dans l'Arctique. Après avoir rapidement diminué entre 2001 et 2007, l'étendue de la glace s'est stabilisée. «Certains se sont servis de cette «pause» pour prétendre qu'il n'y a pas de réchauffement climatique; d'autres avaient utilisé le déclin rapide de 2001 à 2007 pour prédire la disparition de la glace arctique aussi tôt que 2015. Ni l'une ni l'autre de ces thèses n'est fondée», affirment les auteurs.

Afin de convaincre les gouvernements de l'urgence d'agir, plusieurs climatologues ont minimisé, dans leurs communications publiques, les incertitudes inhérentes à l'étude d'un système aussi complexe que le climat. À court terme, ce militantisme a peut-être servi la cause. À la longue, cependant, il risque de miner leur crédibilité.