À entendre les réactions des leaders syndicaux et de plusieurs commentateurs, les offres du gouvernement Couillard aux employés du secteur public sont dignes d'un patron d'usine du XIXe siècle. Mettons de côté les arguments démagogiques lancés de part et d'autre et prenons un peu de recul.

D'abord, une évidence: le gouvernement a déposé cette semaine ses offres de départ, en vue d'une négociation qui durera plusieurs mois. Il y a quelques semaines, les centrales syndicales avaient fait de même. Le gouvernement offre le minimum; les syndicats demandent le maximum. Les Québécois ont vu le film si souvent qu'on s'étonne qu'ils ne connaissent pas tous le scénario par coeur: négociations, crises de nerfs, manifestations, moyens de pression... À la fin, ou bien il y aura entente in extremis, ou bien il y aura une loi spéciale.

Rappelons maintenant le contexte. Contrairement à ce qu'on entend sur toutes les tribunes, absolument rien n'indique que les libéraux s'apprêtent à passer la tronçonneuse dans le secteur public. Ils cherchent seulement à réduire la croissance des dépenses de l'État à un niveau compatible avec la croissance de ses revenus. Les autres avenues, l'augmentation de la dette ou la hausse du fardeau fiscal, sont bloquées, pour des raisons évidentes.

Certains éléments des offres gouvernementales ont attiré plus d'attention. C'est le cas des modifications proposées au nombre d'élèves par classe. Québec remet en question la diminution de la taille des classes mise en place graduellement au cours des dernières années. Cette diminution, si elle a été plus marquée dans les écoles des milieux défavorisés, a été étendue à tous les établissements, de la première année au deuxième secondaire. Or, les recherches menées dans plusieurs pays ont montré que cette mesure est peu efficace et particulièrement coûteuse (au moins 300 millions dans le cas du Québec). D'ailleurs, l'entente conclue avec les syndicats prévoyait qu'au terme du contrat de travail, le gouvernement allait «décider si les mesures seront prolongées, avec ou sans modifications.» Ces «acquis» n'étaient donc pas acquis du tout.

Du côté du réseau de la santé, la représentante des infirmières, Régine Laurent, a réagi avec colère aux offres gouvernementales, rappelant les conditions de travail difficiles de ses membres. La profession d'infirmière n'est certes pas de tout repos. Néanmoins, il y a aujourd'hui 2619 infirmières de plus dans le réseau qu'il y a quatre ans. Se peut-il que cet ajout n'ait pas du tout allégé le fardeau du personnel en place?

Aucun doute, ces négociations-ci seront difficiles. Cela ne signifie pas que l'employeur méprise ses employés. Simplement, il veut, ou plutôt il doit limiter la croissance de ses dépenses. Des dépenses qui ont sensiblement augmenté au cours des dernières années, notamment en raison de l'évolution des coûts de main-d'oeuvre.