Il suffirait de peu de choses pour faire sauter le cadenas des écoles fermées aux élèves sans-papiers du Québec. Modifier le libellé d'une phrase changerait la vie de dizaines d'enfants laissés pour compte.

Ce n'est pas la première fois que le gouvernement est interpellé. C'est au tour de la Protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain, de l'inciter à régler le problème de façon permanente au lieu de continuer de le gérer au cas par cas. Il doit maintenant agir.

Le Québec compterait quelques centaines de mineurs sans-papiers: les enfants d'immigrants dont le visa est expiré, les enfants de réfugiés dont la demande d'asile a été rejetée et qui sont en processus d'appel, les enfants nés ici d'immigrants en situation précaire, les enfants de clandestins qui ont épuisé tous les recours et qui sont menacés d'expulsion.

Dans son rapport publié au cours des derniers jours, la Protectrice du citoyen souligne que la situation actuelle va à l'encontre de la Convention relative aux droits de l'enfant - signée par le Canada - et par laquelle les pays s'engagent à rendre l'enseignement primaire obligatoire et gratuit, en plus de s'engager à favoriser l'enseignement secondaire.

Actuellement, trois principaux obstacles restreignent l'accès aux écoles pour ces enfants: Pour attribuer un code permanent qui suit l'enfant tout au long de son parcours, certaines commissions scolaires exigent des documents officiels que les parents n'ont pas; elles imposent des droits de scolarité de 5400 à 6800$ qu'ils sont incapables de payer; la confidentialité des renseignements est relative et les familles craignent d'être dénoncées à l'Immigration.

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L'ancien gouvernement avait franchi un premier pas en juin 2013 en élargissant les critères d'admission pour les élèves sans-papiers. Une mesure alors évaluée à 1,6 million, qui a permis certains progrès. Depuis, le ministère de l'Éducation assure s'occuper de tous les cas qui lui sont rapportés.

Or, bien des familles vivent dans la peur et se taisent. Il faut aller plus loin pour que l'accès à l'école soit systématique. La loi sur l'instruction publique prévoit que l'école est gratuite pour les enfants résidents du Québec. Mais contrairement à l'Ontario et la Colombie-Britannique, où la résidence est définie par le domicile, la définition québécoise réfère précisément à un citoyen canadien ou à un résident permanent.

Le gouvernement doit acquiescer à la recommandation de la Protectrice du citoyen de redéfinir le terme de résidence en imitant les autres provinces. Un geste simple à poser par voie de règlement. L'attribution d'un code permanent dès la naissance, pour les enfants nés ici, faciliterait également l'entrée à l'école.

Pendant qu'on tergiverse, des enfants grandissent à l'écart des autres. Les modifications ne sont pas coûteuses et seraient profitables pour l'avenir. Une société éduquée n'est-elle pas une société plus égalitaire?